Et dire qu’on crie au génie en écoutant The Spinto Band ou les Hidden Cameras… Voilà bien des dizaines d’années que cette pop naïve et fraîche existe mais il aura fallu une réédition, plus précisément celle des albums des Triffids, pour s’en rendre compte.
Resituons le contexte. Les années 80, voilà la mort de grands groupes de rock et la pré-naissance de groupes qui deviendront culte à leur tour ;une période peu riche musicalement.
C’est dans ce contexte de "vide" musical que les Triffids , groupe de pop australien, de Perth exactement, enregistre In The Pines (1986) et Calenture (1987).
Emmené par le chanteur à tête d’ange David McComb, le groupe ne connaitra qu’un vague succès et ne marquera que très peu les esprits. Vingt ans après, Domino reprend le travail achevé en rééditant tous les albums du groupe. Voilà l’occasion rêvée de redécouvrir deux albums qui aurait pu devenir deux grands classiques de la pop musique.
Commençons pas In The Pines, album enregistré pour pas un rond au milieu de leur Australie natale (leur plus gros investissement pour cet enregistrement aurait été la bière).
Un son un peu crade, des chansons enregistrées rapidement, en prise unique, et une lueur de génie que l’on n’a aucune peine à voir et plaisir à suivre au fil de ces dix-huit titres.
C’est le cas avec cette valse un peu lugubre qu’est "Born Sandy Devotional", "Only One Life", "She's Sure the Girl I Love” ou encore la ballade "In The Pines".Les guitares occupent évidemment le premier rôle, bien que sur certains titres la basse et la batterie lui vole la vedette comme sur "«With to See No More".
La fraicheur et la spontanéité de ces titres cachent cependant une certaine tristesse. Sans doute la vitrine d’une vie ennuyeuse dans une ville isolée d’un pays immense.C’est cette poésie remplie de solitude ainsi que ce talent inné de la mélodie accrocheuse que l’on retrouve tout au long des dix huit titres de l’album.
Les Triffids vont alors connaître un succès relatif et vont décider de s’installer en Angleterre.
C’est dans ce nouveau pays d’adoption que les australiens vont enregistrer un an plus tard Calenture, avec plus de moyens dans un grand studio. C’est aussi un moyen de tourner une page, mais la mélancolie du groupe est toujours bien présente et l’est même beaucoup plus que dans In the Pines.
Toutes ces ballades avec pour thème principal le malheur amoureux le prouvent ("Bad news always remind me of you" en est le meilleur exemple ).
Le son est parfait, travaillé et arrangé par Gil Norton, à qui l’on doit une rythmique digne de Joy Division. Cet album a sans doute été enregistré à des fins plus commerciales, avec des chansons dans l’air de l’époque comme ce "Love The Fever", un morceau new wave dansant qui ne correspond pas du tout au style habituel du groupe.
Ce Calenture est un spectacle lugubre, alternant tragédie et joie avec autant de talent que de fragilité. Douze titres totalement opposés In the Pines, mais ne dit-on pas que les contraires s’attirent et se marient parfaitement ?
En bonus de cette nouvelle version de Calenture, on retrouve sur un deuxième cd des inédits (démos, lives, inédits). Voilà une bonne raison pour les amateurs comme les nouveaux futurs amateurs de se procurer au plus vite ce chef d’œuvre !
In The Pines et Calenture : deux albums qui laissaient présager une fin bien tragique pour un groupe si talentueux. Le mystère "Triffids" n’est pas près d’être résolu, et ces rééditions ne font que le prolonger… |