Remarqué
l’été dernier avec un EP ("Black Rooster")
aussi terrassant qu’intriguant (avec une couverture d’où
transpire la célèbre photo de Florence Rey), ce groupe
originaire de Londres, proche des Libertines, vient de donner au rock
du 21e siècle un de ses premiers classiques : Keep On Your
Mean Side.
Tout comme les White Stripes, les Kills sont un duo
garçon-fille (Hotel et VV) mais la ressemblance s’arrête
là car lorsque les seconds invoquent PJ Harvey ou le Velvet
Underground, les premiers préfèrent convoquer les fantômes
de Robert Johnson ou Dolly Parton. Rock’n roll jusque
dans l’éthique, le groupe n’entre pas dans le moule du business
circus refusant par exemple une interview au NME (chat échaudé
craint l’eau froide, Hotel a déjà, dans une vie antérieure,
subi les revers médiatiques de la médaille) ou bien veillant à
ce que "Keep On Your Mean Side" soit vendu en mid-price (11€
chez tous les bons disquaires).
Musicalement parlant, à l’heure où nombre de groupes à
guitares mous du genou éclosent ça et là, les Kills retracent
la ligne à suivre en réinjectant la dose d’urgence que le
mouvement en "The" semblait avoir perdu ces derniers temps.
L’entame du disque est imparable : "Superstition",
"Cat Claw" (qu’on croirait écrite par Polly
Jean à la grande époque) et "Pull A U", toutes
bâties sur des riffs tranchants, entêtants, appuyées par
une boîte à rythme d’où émerge et ne semble
subsister que la voix déchirante d’agressivité de VV.
Alternant morceaux tendus et calmes, voix masculine et féminine (parfois
en simultané "Hand" ou "Hitched"),
ce disque intrigue, met mal à l’aise comme s’il se voulait
à l’image de notre société.
Après un tubuesque "Wait", les deux londoniens lèvent
finalement le pied sur "Fuck The People" et "Monkey
23", comme pour laisser l’auditeur sur une note un peu moins
pessimiste… |