Perdus dans le désert culturel de l’été, les Ecossais d’Arab Strap n’en font qu’à leur tête et investissent la Guinguette Pirate pour un double concert en plein mois de juillet. Si la qualité de la programmation reste enthousiasmante, la salle reste inadaptée à la popularité du groupe, beaucoup de monde ne pourra en effet malheureusement pas embarquer et beaucoup de ceux entrés dans la jonque n’ont pu s’ils n’étaient dans les premiers rangs n’apercevoir que fugitivement la scène.
Donc une fois ce préalable d’être rentré et bien installé devant, l’occasion de retrouver Arab Strap dans un environnement intime et avec une formation inédite reste un événement rare. En effet, loin de l’orgie électrique de leur tournée de 2001, Malcolm Middleton à la guitare acoustique et Aidan Moffat au chant et (quand elle veut bien marcher) à la boite à rythme ne sont épaulés que par les arrangements d’une pedal steel, d’un violon et d’un violoncelle.
Au-delà des très nombreux incidents techniques qui ont surtout pénalisé le deuxième soir, leur interprétation permet de redécouvrir l’univers d’Arab Strap dans un contexte plus proche du conteur d’histoire mis en scène par la musique. La sincérité de l’engagement d’Aidan Moffat est à fleur de peau (et puis un garçon qui arbore fièrement un t-shirt de Low n’est, au minimum, pas dénué de goût) et il assure l’essentiel de la présence scénique; Malcolm restant quant à lui d’avantage en retrait, apparemment totalement blasé par ces problèmes de sonorisation à répétition.
Le nouvel album est bien défendu avec notamment la perle "Who names the days" et des titres plus rageurs comme "Fucking Little Bastards" ou "Act of War" qui fonctionnent très bien malgré une ampleur sonore limitée. Ils se permettent même une virée proto-dance-floor avec le tubesque "Shy Retirer" tout en cassure de rythme ou encore une reprise d’AC/DC qui est incontestablement réussie (ne me demandez pas si elle ressemble à l’original).
Les anciens morceaux sont principalement joués par Malcolm et Aidan seuls, et ce minimalisme leur convient parfaitement notamment sur "Packs of Three" délicieux et impudique. Arab Strap se montrent alors tels qu’ils sont et convainquent de la pertinence de leur originalité formelle dans ces conditions particulières qui ont sans doute participé la déception de certains.
En première partie notable (inutile en effet de s’appesantir sur la fausseté apprêtée de Porcelain) Malcolm Middleton seul avec sa guitare reste une bonne surprise. Au delà du simple exercice du guitariste avide de liberté hors de la structure Arab Strap, il séduit par un set à la fois personnel et bercé d’influences respectables : un jeu fin et riche et une voix sans affect curieusement très expressive, un exercice nombriliste sans grosse tête qui rappelle le premier album de Graham Coxon dans l’intention. Une succession de titres dans l’ensemble peut être trop peu variés mais quelques-uns sincèrement magnifiques qui excitent la curiosité. Une escapade en solo qui va quelque part et qui mérite de l’intérêt.