8 mars, journée de la femme, voilà une date judicieusement choisie pour démarrer un festival consacré à la musique indépendante féminine.
10 années plus tard, le festival des Femmes S’en Mêlent, continue avec brio sa route (du rock) avec cette année encore une programmation extrêmement riche. Du garage rock, de l’éléctro-rock, de l’électro-clash, de la pop, du punk, du post-rock, de la chanson et du folk.
C’est d’ailleurs ce dernier qui nous intéressera plus particulièrement ce soir. Joueront dans quelques instants sur la scène de la Maroquinerie, Your Heart Breaks remplaçant au pied levé la norvégienne Ane Brun, Marissa Nadler et la très attendue Laura Veirs et ses Saltbreakers de musiciens.
Le billet annonce le début des festivités à 19h30, c’est donc la course pour rejoindre cette salle de La Maroquinerie crâneusement perchée tout là haut sur la colline de Ménilmontant. En retard donc, la salle est déjà pleine comme un œuf (hypothèse personnelle : la fonction public doit, contre tout attente, avoir son noyau dur de fans folkeux). "Snif, snif" merci aussi à la canicule d’août d’arriver en avril, merci de déclencher avec 3 mois d’avance le processus naturel de la sudation, offrant ainsi à mes douces narines ces réjouissances olfactives. Voilà pour l’atmosphère.
Sur scène, un batteur orné d’un bonnet de licorne, un clavier (les deux Karl Blau et Steve Moore, s’avéreront également être deux membres du groupe de Laura Veirs alias The Saltbreakers) et un autre garçon au micro. Euh… doute… réflexion… un festival de meufs, le principe c’est quand même d’en avoir au moins une dans le groupe non ?…
J’en déduis que Clyde Petersen est la chanteuse de Your Heart Breaks. Cheveux blonds très courts, une féminité parfaitement cachée sous un jean et un t-shirt, une paire de lunettes aux montures exagérément présentes jusqu’au milieu des joues. Même le son de sa voix rappelle celui d’un adolescent en pleine mue(tation), sans les brusques oscillations heureusement. Passons ces détails esthétiques sans importance pour nous intéresser à la musique. Du folk donc, de très bonne facture.
Un chant clair, des histoires émouvantes et drôles, des arrangements simples mais mélodiques et surtout efficaces. Les morceaux sont courts, ce qui ne laisse absolument aucune place à l’ennui. Les interventions de Clyde la rendent extrêmement touchante. Son attitude est celle de la gêne et de la timidité, pourtant sa voix est paradoxalement pleine d’assurance. Elle prend soin de raconter au public l’histoire des chansons qu’elle interprète. Délicate attention en particulier lorsqu’il s’agit de folk, anglophone de surcroît.
Bref entracte.
Marrissa Nadler fait son entrée sur scène, seule avec sa guitare sèche. Longs cheveux foncés, robe noire à fanfreluches, hauts talons noires. Après quelques soucis de balance, la belle commence son set. La Maroquinerie est soudainement plongée dans une atmosphère gothico-romantico-tragique.
Marissa possède une voix puissante et cristalline qui n’a rien à envier au chant des sirènes, hypnotique et dérangeante à la fois. Pour apporter une dimension encore plus mystique, la brune utilise 3 micros, chacun étant réglé de façon à apporter un écho plus au moins prononcé dans sa voix aérienne. Ceci ayant pour effet de transformer la salle de concert en nef d’église. C’est d’ailleurs dans un silence religieux que la demoiselle officie. Un folk hanté et tourmenté qui rappelle des artistes comme Joni Mitchell, Leonard Cohen ou Nick Cave.
Les thèmes abordés foutent littéralement la banane : l’amour déçu, la tristesse ou la mort. Marrissa chante la beauté de la tristesse avec talent, indéniablement… mais pour apprécier totalement le genre, encore faut-il être d’humeur…
Bref entracte bis.
La salle est plus que jamais pleine à craquer. Le public veut Laura Veirs.
La dame aux faux airs de JP Nataf et ses musiciens arrivent rapidement sur scène pour faire face à une véritable ovation. Ils se trouveront d’ailleurs à plusieurs reprises confrontés aux acclamations exagérées d’un public conquis voire lèche-cul.
Peu importe, Laura joue et chante, d’une voix mature et assurée, son folk écologique emprunt d’images minérales. Dans son dernier album, à l’honneur ce soir "Saltbreakers", "Pink Light", "Cast a hook in me", Laura concilie ses thèmes favoris, à savoir son amour pour la nature et ses amours tout court.
Fascinants, la blonde et son band n’utilisent aucun artifice (à part peut-être des costumes aux broderies "très natures très discutables) et parviennent ainsi, en toute sobriété, à faire vibrer la salle.
Laura Veirs crée aussi de l’intimité avec son public en multipliant les interventions. Elle parle de sa tournée, explique l’historique des costumes sus-cités et présente un désormais fameux CD concept. Pour la petite histoire, une chorale d’écoliers de Cognac a repris 10 titres de la folkeuse pour en faire un joli disque. La maîtresse devant sans conteste être une des fans hardcores de l’américaine.
L’initiative ayant plu à la muse, celle-ci en fait donc la promo pendant sa tournée. La chanteuse illustre le propos en jouant "Galaxies", titre présent sur le disque des CE2. "Don’t lose yourself" issu du dernier opus. Original, le texte de cette petite perlouse musicale est en partie emprunté à l’écrivain portugais et Prix Nobel, José Saramago. Finish glorieux donc. Sous la pression des applaudissements et des cris de ce public définitivement hystérique, Laura Veirs et les Saltbreakers reviennent pour un inévitable rappel de 2 titres.
Si de leur côté, la chanteuse-songwriteuse à lunettes et ses acolytes ont prouvé tout leur talent, le public parisien a, quant à lui, prouvé son indéfectible soutien, promesse d’une présence à coup sûr renouvelée à leur prochain passage capital(e). |