Spectacle de danse, chorégraphie de Nadine Brulat avec Etienne Berthelot, Félix Cordonnier, Jérémy Deshoux, Benoît Fauchier, Romain Hinault, Marie Jarnet, Rémi Leblanc-Messager, Arthur Letertre, Anouck Montreuil, Marion Pinsard, Marion Rapilliard et Camille Visage (Compagnie Hors Mots)
Obscurité. Un bruit de vent. La pluie... Puis la voix de Léo Ferré dans le noir. Immortelle et tellement émouvante. Des silhouettes bientôt découpent l'espace, deux torches pour seul éclairage. Ils sont douze jeunes rennais tout de noir vêtus, explosant sur le plateau vide l'un après l'autre. Une fois rassemblés, droits et dignes ils se présentent au public pour perpétuer l'oeuvre du maître.
Et c'est soudain une adresse à Baudelaire qu'on entend. De poète à poète. Le grand Léo évoque la solitude de l'artiste, "la musique de la solitude ". Les danseurs prennent le relais, se répondent avec les mots du poète puis soudain les interprètent avec leurs corps. C'est simple, habité et terriblement poignant. Des bras tracent des lignes, des jambes des cercles, dessinant l'espace de formes géométriques ou partent sur des impulsions, souffle court, avec une agilité et une grâce animale.
Il y a des fulgurances de génie dans ce spectacle. Et les douze sont tous beaux. De cette beauté de ceux qui ont fait des sacrifices pour toucher leur rêve du bout des doigts. Il y a là montré les rivalités d'un groupe, les séparations, l'amour, la tristesse parfois; des choses qu'on quitte, le voyage vers sa vie d'adulte, un chemin qui se peint pour vivre ses songes...
Tout est dit gestuellement, mais c'est suffisamment fort. Les moments de tension succèdent au calme et c'est un feu d'artifice d'énergie. On ressent un groupe compact et soudé. Ils ne jouent pas : ils sont. Simplement ça. Ferré est ressuscité et des artistes sont en train de naître devant nos yeux émerveillés par cette grande pureté.
Le spectacle est court mais extraordinaire d'émotion, de beauté et d'humilité. Il est à l'image de ces jeunes danseurs convaincants et bien au dessus de ce monde. Tous ont commencé la danse au collège avec ce groupe, il y a quelques années. C'est leur premier Avigon et ils appréhendaient d'être à la hauteur.
Avec l'aide de la "Légende" Ferré et du très grand talent de la chorégraphe Nadine Brulat ( par ailleurs leur professeur depuis le début), le pari est largement gagné : ils sont tout là-haut , flottant au dessus de la Cité des Papes, quelque part parmi les étoiles dont ils font partie...
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