Longue file d'attente, à l'entrée du Divan du Monde, sous une pluie timide. La venue de David Eugène Edwards et son projet parallèle, devenu une occupation principale, déplace les parisiens.
Sur la scène, The Good Life a déjà entamé son set. Il ne ressort de ce groupe du Nebraska, aucun relief, la prestation est d'une platitude navrante. Le public ne s'y trompe pas, discutant au cours de leur prestation, comme si il s'agissait d'un fond sonore quelconque.
Applaudissements polis à la fin des chansons, pas toutes. Il faut dire que leur attitude est peu avenante.
Le chanteur à l'air visiblement content de jouer. En revanche, les autres ont l'air de s'ennuyer fermement, particulièrement la bassiste.
Leur prestation se termine sans que nous nous en rendions vraiment compte.
La mise en place de Woven Hand est un peu longue et le public commence à s’impatienter. Finalement, le rideau se lève sur les musiciens qui entrent en ordre dispersés.
David Eugène Edwards porte maintenant une moustache, un bandeau retient ses cheveux et il a pris du poids. Bonne surprise, Pascal Humbert, bassiste de Sixteen Horsepower, tiendra se soir la basse, ce qu’il fera admirablement, comme à son habitude. Ordy Garrison à la batterie et Peter van Laerhoven à la guitare complètent la formation. Leur arrivée déclenche des manifestations de joie, pourtant, cela ne fait pas si longtemps qu’ils ont joué ici.
David prend place sur un siége au milieu de la scène, sa guitare rouge en main, qu’il laissera pour un accordéon et ce qui semble être un banjo, dont le corps, en bois, fait penser à une mandoline.
Dés les premières notes David commence à bouger frénétiquement sur son tabouret, lève une jambe tremblante, comme en transe. Les mouvements de ses mains et ses tics sont impressionnants, il vit complètement sa musique.
A ses cotés, Peter semble impassible, et ne bouge quasiment pas. Pascal Humbert, égal à lui-même, demandera du temps pour se laisser aller.
La musique de Woven Hand a toujours été sombre et tragique, là c’est presque une apothéose. Le résultat est chamanique, terrestre, ou plutôt sous terrain. Des forces telluriques se déchaînent et la basse de Pascal y est pour beaucoup.
Ce climat est renforcé par l’absence d’interruption entre les morceaux, il y a en permanence un habillage sonore (mis à part quelques ratés) fait de sons d’ambiance, de voix enregistrées et de petits éclats de guitare. Tout ceci à d’ailleurs un effet terrible (et pathétique) sur la jeune femme devant moi, elle se contorsionne, joue avec ses mains, comme possédée par un démon, dont les forces primitives l’habite.
Plus le concert avance et plus David semble pris par sa musique, folie qui gagne les autres musiciens, Ordy martèle ses fûts avec mailloches et balais le regard vide. Pascal le nez en l’air est pris par les convulsions déclenchées par les notes graves qui sortent de son instrument. Seul le guitariste reste impassible.
Le quatuor exécutera quelques titres de Sixteen Horsepower pour la plus grande joie de tout le monde. La discographie du groupe sera largement explorée. A la fin du rappel, les musiciens remercieront chaleureusement le public de ses encouragements, seul David remerciera un spectateur invisible, perdu dans des cieux improbables. |