C'est la fin de la saison pour la tournée Inrockuptibles / Nokia qui
a fait venir près de chez vous les groupes que vous aviez envie de voir
(ou presque). Une initiative certes commerciale mais qui a eu pour résultat
un peu plus de musique dans nos oreilles et pas seulement à Paris.
La tournée 2003 se termine donc et c'est à grand renfort de T
shirts célébrant celle-ci que nous sommes accueillis à
l'Elysée Montmartre qui mettra un peu de temps à se remplir mais
qui offrira à An Pierlé et à Venus une salle comble (mais
quand même un peu tiède).
Au programme ce soir, Playground, An Pierlé et Venus.
Commençons donc par Playground, premiers à débarquer
sur scène. Et quand je dis "débarquer" je pèse
mes mots, c'est vraiment l'artillerie lourde pour ce set de 30 minutes de musique
médiocre et beaucoup trop forte.
Ce groupe semble largement privilégier l'attitude à la musique
et malheureusement ça se voit beaucoup trop. Poitrine en avant dans son
tshirt "Gilbert et George" le chanteur se prend pour Mick Jagger
et déambule sur la scène en essayant de se faire entendre
par dessus le boucan terrible de la musique, d'autant plus désagréable
que le son n'est pas très bon et encore moins intéressant. Même
les morceaux acoustiques ne sont pas au point. Tellement pas que, après
une vaine tentative de faire fonctionner la guitare sèche, le groupe
décide que finalement ils feront la chanson en électrique!
Ne nous attardons pas plus, on ne tire pas sur une ambulance chargée
de blessés. Courte pause avant de passer à ce que l'on prend au
début pour un amuse bouche avant Vénus et qui on le verra plus
tard sera belle et bien LE concert qu'il ne fallait pas manquer.
An Pierlé arrive enfin sur scène, souriante
dans sa petite robe d'été accompagnée de son groupe (basse,
guitare, batterie). A peine le temps de saluer le public et la voilà
installée derrière son piano. Non pas comme tout le monde assise
gentiment sur un traditionnel tabouret académique recouvert d'un beau
velours rouge mais sur un gros ballon translucide. Idée originale et
du jamais vu pour ce qui me concerne qui nous emmène bien loin du pianiste
très statique et du concert emmerdant sauf si ledit pianiste joue debout
comme le disait si bien (!) France Gall (d'ailleurs An Pierlé
jouera aussi debout, comme quoi ...).
Assise sur un ballon donc, An Pierlé n'aura de cesse d'aller de droite
et de gauche, d'avant, d'arrière et accessoirement de haut en bas puisque
le ballon a la faculté de rebondir sous les impulsions fessières
de la dame. Et si elle est tout à fait capable de jouer du piano debout
elle sait aussi jouer du piano à bretelles (plus connu sous le nom d'accordéon)
et nous donnera l'occasion à 2 reprises de le constater de visu.
Il serait assez difficile de définir précisément la musique
de An Pierlé, parfois très folk-rock, comparable à une
Tori Amos ou une Heather Nova, parfois totalement barrée
et déconnante, qui prend toute sa dimension en live. On sent que la scène
ne lui fait pas peur et que le plaisir de jouer est aussi fort que celui que
nous avons à les écouter et les voir. Car pour An Pierlé
il est bien question de jouer sur scène, ainsi elle est très bavarde
entre les morceaux et a toujours un bon mot à dire, assorti d'un accent
belge à couper à la tronçonneuse ("on ne se met jamais
tout nu en concert, c'est marrant, allez enlevez tous vos vêtements"...
m'enfin quand même !). Elle essaie même de faire chanter le public,
tel un choeur géant en nous apprenant à faire "whouhouhou"
en se déhanchant ... et elle réussit à faire monter un
couple sur la scène pour danser un slow pendant qu'elle chante.
Bonne ambiance, certe mais surtout excellent concert d'un groupe qui fait vraiment
des efforts pour son public. Concert qui se terminera par une reprise "spécialement
pour vous les parisiens" de Jacques Dutronc, "Il est
5 heures", dans une version très rock'n'roll accompagnée
d'un accordéon en furie.
Nous aurions aimé un rappel ... Nous aurons seulement droit au concert
de Venus.
Car vous l'aurez compris, en un mot comme "émile", le concert
de Vénus fut dé-ce-vant (oui je sais ça fait trois mots
mais enlevez les tirets pour voir...).
Pourtant j'en gardais un excellent souvenir des concerts de Vénus,
notamment celui de la Cigale il y a presque 4 ans déjà. Epoque
bénie où le groupe s'amusait sur scène, faisait le spectacle
et reprenait en rappel "le port d'Amsterdam" de Brel
en anglais.
Ce soir là, si la reprise est toujours au programme du rappel, comme
une vieille habitude que l'on ne songe même plus à supprimer, elle
a beaucoup moins de charme que jadis et le spectacle sur scène est bien
fini. Les Vénus restent plantés derrière leur micro comme
posés là attendant qu'on vienne les rechercher. Le "est ce
que ça va ? je vous entend pas, est ce que ça va" ne jette
même pas assez de poudre aux yeux pour feindre l'enthousiasme, ni de la
part du groupe, ni, juste retour, de la part d'un public que l'on sent déçu.
Pourtant on ne peut pas reprocher à Vénus de mal jouer leurs
morceaux. Tout est en place, batterie, contrebasse, guitare, chant, violon et
même en renfort 2 demoiselles venues tater du clavier. Mais ce qui leur
manquait ce soir là, c'était le génie, ce petit éclair
qui illumine un morceau tout juste moyen pour en faire un quasi chef d'oeuvre
en live. A trop vouloir s'appliquer, Vénus s'est planté et à
vouloir en garder sous le pied ils n'ont jamais vraiment ouvert les vannes pour
se libérer complètement.
Un concert que le groupe n'a même pas pris le risque d'entamer sur un
de leur titre mais sur une reprise de Johnny Cash, bel hommage à
ce génie récemment décédé mais qui n'aurait
rien perdu à être joué en final, au lieu de se lancer sur
un de leur morceau phare qui est souvent déterminant pour la suite. Cela
étant, Loopkin m'a confirmé que leur prestation au début
de l'été au Café de la danse fût peu ou prou du même
acabit.
N'insistons donc pas et comme beaucoup de spectateurs ce soir là, allons
prendre notre métro un peu plus tôt que prévu.
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