Comédie dramatique de Marie Ndiaye, mise en scène par Elisabeth Chailloux, avec Céline Barbier, Elisabeth Chailloux et Etienne Coquereau.
Au Studio Casanova, le Théâtre des Quartiers d’Ivry présente sous le titre "Petit triptyque de la dévoration" qui explore l’univers de l’écrivain Marie NDiaye à travers trois pièces dont "Hilda".
Mme Lemarchand, bourgeoise, de gauche comme elle aime le préciser, jette son dévolu sur Hilda pour laquelle elle semble éprouver une fascination saphique, tant sur sa jolie personne que sur son prénom, pour en faire sa femme de service. Une femme de service qui deviendra vite une femme de corvée et de devoir totalement inféodée et manipulée.
A partir de cette situation banale et ordinaire, avec une écriture simple, concise et ciselée, mais elliptique et subtile, Marie NDiaye jongle avec une pluralité de thèmes en distendant jusqu’à l’extrême la quête du sens intime, qui peut confiner sinon au fantastique du moins au singulier.
La servitude moderne, la possession, la substitution d’identité, la détresse du vide intérieur, le vampirisme intellectuel, l’attachement affectif, autant de pistes de réflexion qu’elle dissémine au fil des dialogues et qui tissent une atmosphère d’inquiétante étrangeté.
Au terme d’une progression dramatique en crescendo, le spectateur est mentalement amené au bord du gouffre de l’insoutenable et de l’horreur alors même que le personnage titre et le processus de phagocytose ne sont jamais représentés. Car Marie NDiaye ne montre pas, elle plonge elle aussi par le pouvoir des mots, le spectateur au cœur de ses propres peurs archaïques.
Dans un dispositif scénique minimaliste de Yves Collet, un fauteuil, une cimaise à panneaux mobiles et la projection ponctuelle des images mentales qui situent les lieux où se déroulent les scènes, Elisabeth Chailloux a conçu une mise en scène brute, tirée au cordeau, nette et sans bavure qui met en pleine lumière le texte sans effets superfétatoires.
Face au mari d’Hilda, instrumentalisé par l’argent et la parole, qui lâche prise (Etienne Coquereau parfait), tour à tour péremptoire, odieuse, mielleuse et pathétique, elle incarne le rôle principal avec une très grande sobriété et intelligence. |