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Entretien de mars 2008  (Paris)  14 mars 2008

Le 1er mars 2008 Jean-Laurent Cochet et son quartet féminin de "Aux deux colombes" saluaient une dernière fois sur la scène du Théâtre Pépinière-Opéra après 6 mois de succès. Sans regret puisque que c'est en tournée, dès octobre 2008, qu'ils reprendront la partition exquise écrite par Sacha Guitry.

Et puis, pour Jean-Laurent Cochet, sans même avoir le temps d'un regret dès lors que le 4 mars suivant avait lieu, au Théâtre 14, la première de "La Reine morte" de Montherlant qu'il met en scène et dans laquelle il interprète le rôle du roi Ferrante qui s ejouera jsuqu'au 19 avril 2008.

C'est tout naturellement que cet entretien de mars 2008 avec Jean-Laurent Cochet, pour ce rendez-vous mensuel qu'il veut bien nous accorder pour dérouler le fil de sa vie et de son métier, est consacré à ce nouveau spectacle qui se joue déjà à guichet fermé.

L'actualité du mois de mars c'est bien évidemment "La Reine morte" de Montherlant que vous avez mis en scène et que vous jouez au Théâtre 14. Nous ne reparlerons pas de Montherlant que vous avez évoqué à différentes reprises dans ces entretiens, et notamment dans celui de janvier 2008, mais je vous propose de consacrer celui-ci au spectacle que vous proposez au public. En premier lieu, pourquoi avoir choisi cette pièce de Montherlant ?

Jean-Laurent Cochet : "La Reine morte" est un spectacle que je connais depuis toujours pour l'avoir lue enfant et pour l'avoir vu interprétée dès mon jeune âge. Quand j'ai commencé cette aventure que fût le Théâtre Hébertot, il était évident que cette pièce devait figurer à l'affiche et j'ai fait appel à Jacques Eyser qui venait de quitter la Comédie Française pour le rôle du roi Ferrante. Ensuite, j'avais repris le rôle à sa mort sans en avoir l'âge, même si un rôle n'est pas qu'une question d'âge. Donc, quand on m'a sollicité pour les festivals, j'ai bien évidemment pensé à "La Reine morte" qui est une pièce faite pour ce genre de manifestation et que le public a toujours plaisir à retrouver.

Nous avons donc joué "La Reine morte" en 2007 au Festival d’Anjou et de Terre-Neuve. Et puis quand mon ami Emmanuel Dechartre, le directeur du Théâtre 14 qui est un théâtre que j'aime énormément, comme j'éprouve une grande affection pour Emmanuel Dechartre, m'a proposé de venir jouer cette pièce dans ce lieu, j'ai accepté. Nous avons un grand plaisir à jouer cette pièce dans ce théâtre qui bénéficie d'une très grande scène, une des plus grandes de Paris, qui par ailleurs est très proche du public. Pourquoi "La Reine morte" ? Parce que c'est une pièce qui comporte les thèmes essentiels de la vie.

Dans "La Reine morte" vous êtes entouré de comédiens qui sont ou ont été vos élèves.

Jean-Laurent Cochet : Pas seulement par fidélité, ce qui serait déjà normal, mais parce que je ne pourrais pas trouver mieux. Je n'ai jamais distribué des élèves ou des amis de préférence à d'autres qui auraient été meilleurs. Quand j'utilise mes comédiens, c’est parce qu'ils sont les meilleurs pour le rôle. En l'occurrence, par exemple, je ne vois personne qui puisse jouer comme elle joue le rôle de l'infante, Elisabeth Ventura. Le rôle d'Inès de Castro a l'air d'avoir été écrit pour Catherine Griffoni.

Souvent pour ce rôle, car les gens, et même ceux qui les montent, ne savent pas lire les pièces, on distribue dans ce rôle une petite jeune fille, blondasse et hésitante, alors que tout raconte dans la pièce qu'il ne s'agit pas de cela. En plus, si on veut être fidèle aux tempéraments, tous les problèmes de famille entre le père et le fils viennent aussi de la mort de la mère très jeune et son père ne l'aimant pas ou ne l'aimant plus, le jeune prince a besoin d'affection et trouve une femme qui le protège qui est maternelle.

Comment avez-vous conçu la distribution ?

Jean-Laurent Cochet : En fonction d'un équilibre nécessaire. Et je bénéficie d'une distribution absolument idéale, même dans les plus petits rôles. Quand je dis petits rôles comme celui de Egas Coelho que joue si bien Pierre Delavène, ce n'est pas un plus petit rôle que celui de Marcel Herrand dans "Les enfants du paradis". Il est d'ailleurs remarquable de perfidie souriante, inquiétante. Il faut des comédiens qui représentent un grand emploi, dont on puisse dire ce sont des comédiens classiques, dans le sens noble du terme, et qui, en même temps, parlent le texte avec cette familiarité comme il faut faire parler tous les textes, d'Euripide à Feydeau. Il n'y a pas un ton à prendre, il y a un style à conserver mais ces personnages sont leur vie quotidienne et leur vie quotidienne, c'est la grandeur chez les uns, la médiocrité chez les autres.

Là, c'est un équilibre merveilleux entre le roi Ferrante, qui a eu son fils un peu tardivement et qui n'a pas pu, sa mère étant morte, l'aimer comme il l'aurait voulu à cause des affaires de l'Etat et la désillusion de voir que ce fils, à qui il veut laisser son royaume, n'a pas le sens de la gravité et de la grandeur, n'aime pas du tout cela et va se réfugier dans les bras d'une femme qui a pu lui donner l'autorité qu'il n'a toujours pas face à son père qui le terrorise. Mais leurs sentiments sont beaucoup plus complexes qu'on pourrait en parler On y trouve de l'ambiguïté, une subtilité, un mélange de tendresse, de non-aveu. Derrière le texte, il y a tous les informulés qui sont d'une richesse et d'une complexité…

Ce n'est pas une tragédie, comme les tragédies classiques de Corneille et, surtout, de Racine, mais on y trouve des trios ou des quatuors infernaux tels Oreste qui aime Hermione qui aime Pyrrhus qui aime Andromaque qui est fidèle à son époux mort. Dans "La Reine morte", c'est pareil entre l'amour, le règne, la faiblesse. Le fils du roi est un personnage merveilleux car il est un peu sacrifié, relativement aux femmes qui sont plus violentes que lui, par son père et on croit qu'il est en lui-même une chiffe molle. Non, c'est parce qu'il a été effroyablement lésé de ne pas être aimé par son père qu'il se réfugie dans l'amour, hors du royaume, et dans cet amour, en revanche, il est d'une véhémence extraordinaire. Et cela, Xavier Delambre le représente merveilleusement. D'abord, non seulement il est beau comme un dieu, mais il est grand ce qui fait que, tout en étant dans les bras d'une femme plus mûre que lui, il la domine.

Et ce qui est amusant c'est que, petit à petit, Ferrante se laisse séduire, lui aussi, par Inès parce qu'il n'a plus de femme profondément reliée à lui depuis la mort de son épouse et qu'il sent dans cette femme tout ce qu'elle a pu apporter à son fils. Et c'est presque par amour qu'il va la tuer et pour préserver la succession au trône quand il apprend qu'elle attend un enfant bâtard. C'est une des raisons qu'il donne pour expliquer sa décision. Mais aussi parce que, comme il sent qu'il va mourir dans les heures qui suivent, pour la retrouver là-bas, pour une union entre eux. Il vole presque Inès à son fils. Ferrante est une fripouille avec en même temps des sentiments d'une profondeur incroyable. On ne sait jamais totalement les raisons de sa décision et lui-même se demande pourquoi il la tue.

Et ce monologue que Montherlant a mis dans sa bouche est tout à fait étonnant. Ainsi se fait une distribution quand, comme moi, on a la chance d'avoir autour de soi des gens de talent. Tout devient évident : l'équilibre entre les âges de Pierre Delavène et de Xavier Delambre, entre la jeune infante qui n'a jamais connu l'amour et dont on sent, et Montherlant l'a souligné dans ses notes, l'amour saphique qui se manifeste en elle face à Inès qui, elle, lui parle comme une mère. Cette pièce est d'une grande richesse, comme les poupées russes.

A propos de richesse, vous interprétez le rôle du roi Ferrante à travers lequel tous les grands thèmes universels sont abordés : la vie de l'homme, le pouvoir et la raison d'Etat, la paternité, l'amour filial, l'amour avec deux personnages de femmes qui sont aux antipodes l'une de l'autre…

Jean-Laurent Cochet : Oui : la violence de l'infante faite pour le règne sa profondeur, sa singularité, et chez Inès la toute femme qui aurait été une reine idéale. Avant tout, chez Ferrante, c'est le pouvoir qui domine et il pourrait dire ce que dit l'infante : "J'ai été élevé pour le règne". Ce sont des personnages royaux de droit divin, pas seulement des conquérants, ayant avant tout cette passion de leur pays et surtout, ce qui se sent si bien, comme dans les pièces d'Obey sur le monde espagnol, ce sont les contradictions de ce peuple face au Portugal.

Ce qui est très important est que Ferrante se trouve au crépuscule de sa vie, et c'est ce que dit l'infante : "Le roi souffre de bientôt mourir". Il souffre de bientôt mourir parce qu'il va être obligé de tout abandonner, puisqu'il ne peut donner à son fils son royaume même si les circonstances l'y obligent pour le forcer à régner, et puis, il a peur parce qu'il pense à Dieu tout en s'interrogeant sur l'après et dit "trancher ces nœuds de contradiction qu'il y a en moi pour savoir ce que je suis". C'est un homme qui est à la recherche de lui-même à travers tout ce qu'il a fait.

Ferrante le magnanime est un des plus grands personnages de l'histoire et, à la fin de la pièce, il dit qu'il n'est qu'un pauvre pêcheur : "Tout ce que j'ai fait est défait, tout sera détruit parce que le temps bouleverse les choses, on n'est plus rien" et même le petit page à qui il a dit: "Ne me quitte pas même si je meurs", et bien quand arrive le cadavre de la reine, le petit page l'abandonne, seul dans son coin, pour s'adouber au nouveau roi. Cette pièce est pathétique avec cependant de l'humour, on ne peut pas dire mieux, ce n'est pas de l'esprit, c'est de l'humour qui est inclus dans une forme de désespoir.

Je parle toujours comme exemple quand je fais travailler "Phèdre" en particulier, Monsieur Rollan en parlait très bien et il n'était pas le seul, de tout l'humour, de tous les sourires qu'il peut y avoir dans une tragédie et notamment chez Racine, quand les personnages se survolent et se disent non seulement il m'arrive ça mais en plus il m'arrive ça. Phèdre tombe amoureuse de son beau-fils qui ne la veut pas et, un jour, en plus, elle apprend qu'il en aime une autre.

Cela me rappelle une anecdote que je raconte à mes élèves. J'étais bien jeune déjà, encore plutôt, (rires), je revenais du lycée et en rentrant chez moi à Romainville dans un vieil autobus à plate-forme avec la tirette pour demander l'arrêt. Je m'assois et j'entends derrière moi une réflexion incroyable. Une dame, en s'asseyant, a du piétiner le pied d'une dame déjà assise et cette dame très hargneuse de dire : "Ah, mais faites donc attention où vous mettez les pieds ! Comme si ça ne suffisait pas que je n'ai qu'un œil !". Bien évidemment on n'a envie que de rire même si c'est tragique pour cette pauvre dame qui est borgne. On trouve cela dans Montherlant.

Quand le roi vient d'apprendre que Pedro s'est marié et avec cette femme-là, alors qu'il doit épouser l'infante mariage dont dépend le sort du royaume du fait de l'alliance avec l'Aragon, il dit "Pourquoi vous vous mariez? Vous aviez déjà le lit, ce n'est pas assez ?", ce qui est déjà cocasse, et à la réponse du prince qui dit que c'est pour être plus heureux, il rétorque que c'est une obsession, tout le monde voulant être heureux. Les gens font un effet comique sans que j'aie besoin de vouloir les faire rire parce que c'est la pointe extrême de l'intelligence, qui au-delà du désespoir, et qui peut définir l'humour relativement à l'esprit. C'est grisant de jouer de tels personnages.

En utilisant une métaphore avec l'aigle, Ferrante dit qu'il est arrivé au zénith de son vol et qu'il va enfin connaître l'indicible et qui il est. Par là Ferrante est très proche de vous dans sa conception de la vie. Au début de la pièce il se trouve dans un état d'exaltation alors qu'à la fin, compte tenu des révélations qu'il a eues, il paraît assailli de doutes.

Jean-Laurent Cochet : Tout ce qui s'est passé est important parce que, pour parler abruptement, c'est un homme qui n'avait pas peur de la mort et qui désirait enfin savoir qui il était. Mais cet épouvantable drame qui fait que, de son vivant, juste avant de mourir, il constate et il le dit : "Tout ce que j'ai fait est détruit". Il a été ce qu'il y a de plus grand au monde et, soudain, il n'est plus rien. Et il attend maintenant, non seulement la délivrance par la mort, cette mort qui comme il le dit nous met enfin hors d'atteinte, parce qu'il est exaspéré au-delà de la fatigue de ce qui arrive, mais aussi, ce qu'il voudrait justement savoir à la minute qui précède la mort avec sa dernière parcelle de vie, c'est le regard qu'on peut jeter sur lui.

Et d'ailleurs, on peut l'imaginer, à travers ses derniers mots, qui sont un mélange de délire et de sur-clairvoyance. Ses toutes dernières paroles sont des paroles suspensives, grâce au Ciel cela ne se termine pas une belle phrase bien faite comme dans Corneille, quand il se débat dans le dernier souffle. Je m'emploie à le traduire comme ça ; dans la brochure, il a écrit simplement : "Quand je ressusciterai, mon Dieu, ayez pitié de moi" et il meurt. Là je suis tout entier sur ce petit page qui représente ce que lui, depuis sa naissance a voulu être, bien meilleur et bien pire, il regarde ce petit page qui dans son intimité a remplacé le fils défait et je considère cela déjà comme une réponse.

En tout cas, il pense à la résurrection. Il ne s'en va pas dans la terreur. C'est du théâtre grandiose et tellement humain. Il y a tous les caractères : les personnages les plus forts de la pièce sont aussi les plus démunis et quelquefois les personnages les plus égarés les plus faibles manifestent une puissance étonnante pour défendre ce qui leur tient à cœur. Ce n'est pas du tout manichéen.

Il y a également un thème récurrent chez Montherlant qui est la fascination pour le génie de l'enfance qui, sans doute, doit être lié à son vécu personnel.

Jean-Laurent Cochet : Comme pour les romains, pour Montherlant il n'y a pas le petit garçon, puis l'adolescent, le jeune homme puis l'adulte. Il y a l'homme et l'homme, s'il est bien élevé pour la grandeur, à 13 ans tout est joué. Je pense que dans sa vie il a adoré sa mère et il est peu bavard sur son père. Il a peut être toujours, peut être pas rêvé d'être père, puisqu'il savait que ce n'était pas son penchant qui pourrait l'entraîner à avoir un fils, mais cela me semble avoir été quand même important pour lui.

Ce qui dit Ferrante est très beau : "Bébé nous ne m'intéressiez guère, mais de 5 à 13 ans je vous ai follement aimé. 13 ans a été l'année de votre grande gloire". C'est merveilleux de dire cela. Et ensuite, à chaque fois qu'il l'évoque, même pour lui dire des choses qui ne sont pas agréables, on sent comment il a aimé cet enfant, son innocent sourire. Le fait, pour Ferrante, d'arriver au terme de sa vie, ravive toutes ces choses de l'enfance, de la filiation, un peu comme on revoit sa vie au moment de mourir, et pour cause, à travers l'amour filial, justement, à cause de ce petit page. Ah, l'idée de créer ce petit page !

Les gens en sont abasourdis et en parlent en disant : "C'est sublime ! On a ri, on a pleuré." Et, après, les mêmes nous écrivent et nous parlent des personnages. Il y a une chose je crois - et ça c'est pour me lancer des fleurs, une fois de plus, faut pas se gêner - que tout le monde a souligné et, comme je le souhaitais, c'est d'ailleurs pourquoi je l'ai fait, c'est le prologue. J'aime bien, et quand c'est utile, on ne va pas mettre un prologue à Guitry, mais j'aime bien insérer une espèce de prologue, pas un rajoutis pour dire moi aussi je suis auteur, non pas du tout, un prologue qui peut être muet ou simplement le décor qui apparaît d'abord derrière un tulle pour créer une distance.

Là c'est ce qui m'est venu, et plus encore que je ne l'ai voulu, dans la mise en scène, c'est que tous les personnages - et ça tous les gens l'ont très bien compris, que ce soit Jean-Marie Rouart qui a parlé merveilleusement du spectacle, ou Gabriel Matzneff, et Dieu sait qu'il est Montherlant quasiment ressuscité - et ont remarqué que cette façon de faire entrer dans le costume de leur rôle les comédiens qui viennent faire tapisserie pour dire: "voilà ce que l'on va jouer et quels vont être nos rapports".

Et puis, on passe tout naturellement des comédiens, avec leur présence intemporelle, à la présence, comme si on était allé les chercher dans le passé, des gens qui ont vécu il y a des siècles mais qui pourraient être nos contemporains. Ce prologue fait entrer le public dans notre jeu au lieu que cela se passe uniquement devant lui comme une démonstration théâtrale. Ca déthéâtralise la pièce dans la mesure où elle est suffisamment théâtrale par elle-même pour qu'on n'ait pas à souligner ou à solenniser.

Comment avez-vous abordé le rôle de Ferrante ?

Jean-Laurent Cochet : Ferrante est un personnage comme tous les grands personnages de la Renaissance, les cardinaux redoutables, perfides, terrifiants d'intelligence incroyable sur le plan du règne et de la conduite de l'Etat, mais qui sont des vicieux. Cela va du pape Borgia au cardinal Cibo dans "Lorenzaccio" de Musset. Ferrante fait partie des terrifiants despotes intelligents, rusés, matois, de la Renaissance au moment où ils se défont.

Pour ma part quand j'ai senti que j'arrivai vers ces personnages, et pas seulement pour une question physique - on peut voir pour Ferrante un homme enveloppé comme moi comme on peut voir un cadavre, quoi que ce soit moins drôle de voir mourir un cadavre - je me suis remémoré les grands comédiens du passé et, notamment ceux à qui on avait fait jouer de façon ridicule ce grand premier rôle tragique.

Louis Seigner jouait ces emplois mais toujours en restant un peu paterne, un peu bonhomme, même s'il le faisait merveilleusement. Parmi les exemples, il y a Harry Baur, à qui on peut penser pour tous les rôles même pour un ingénu, mais là pour une fois c'est moins sur lui que je me suis appuyé, sauf pour la malice des phrases quand elles ne sont que marmonnées - il y a des gens qui ne comprennent pas non plus ce parti pris et à qui je dis que, avant d'écrire à la pointe Bic on écrivait avec des pleins et des déliés comme disait Guitry - donc on n'a pas besoin de tout faire entendre distinctement comme si tout le public était sourd et n'écoutait que les mots.

Non ! Il y a le sens derrière les mots, et en dépit des mots quelquefois. Cela m'a enthousiasmé d'accrocher un peu les mots. Justement j'aimerai qu'on se demande si c'est vraiment dans le texte ou si c'est moi; c'est cela jouer la comédie, ce n'est pas seulement dire bien des mots. C'est même le contraire. Je n'ai pas souvent jouer ce genre de personnage quoique cela rejoigne le drame de Monsieur Vernet qui se passe sur une plage normande. Mais c'est aussi tragique pour lui que ce qui se passe à la cour du roi du Portugal.

Donc pour travailler ce rôle, j'ai surtout pensé à un acteur que peu de gens ont connu et que j'ai vu sur scène, puisque j'ai commencé à aller au théâtre très jeune. Il s'agissait d'un des plus grands acteurs italiens de notre temps qui s'appelait Ermete Zacconi et que tous les cinéphiles se doivent de connaître, et ont vu même sans savoir que c'est lui, car ils l'ont vu dans le rôle du vieux pape dans "Les perles de la couronne" de Guitry. Il est complètement Ferrante dans 4 plans.

J'avais pu le voir sur scène quand j'avais 6-7 ans, à l'époque où la Comédie Française était la Comédie Française non seulement parce que c'était un grand théâtre mais parce que c'était français. On savait recevoir des Roumains en accueillant Vera Korène et Jean Yonnel mais c'étaient des gens qui n'avaient pas d'accent pour déformer Molière. C'était l'époque où on faisait venir des acteurs anglais comme Charles Laughton pour jouer Shakespeare et "Le médecin malgré lui" en français. C'était ça les échanges à l'époque.

Oui, je vois Ermette Zacconi, lippu, avec l'œil lourd comme on dit dans la pièce "l'œil lourd des lions à la fin des parties de taureaux", non pas qu'on n'ait jamais fait combattre des lions et des taureaux, et puis Charles Laughton. C'était une filiation à travers le pays d'emplois. En France, c'était Harry Baur, qui pouvait jouer Volpone dans un vaudeville comme les personnages terrifiants comme le juge Porphyre, Charles Laughton et Ermete Zacconi.

La programmation de "La reine morte" au Théâtre 14 est prévue jusqu'au 19 avril 2008. Le succès est déjà assuré et les réservations sont quasiment complètes. Y aura-t-il une possibilité de prolongation et une tournée éventuelle ?

Jean-Laurent Cochet : Hélas, la prolongation au Théâtre 14 n'est pas possible compte tenu des impératifs de leur calendrier et il n'est pas envisagé de tournée. En revanche, nous jouerons "La Reine morte" à La Roche-sur-Yon mais dans une salle couverte pour éviter les déboires pluvieux rencontrés en 2007. Par ailleurs, nous jouerons également "Aux deux colombes" au Festival de Terre-Neuve à Fontenay-le-Comte et à Sisteron.

Le cadre n'est pas forcément approprié mais maintenant cela se fait partout car on ne peut pas jouer que du Shakespeare. On joue bien "Fin de partie" ou "En attendant Godot" devant des murs Renaissance ! Ca il vaut mieux le jouer nulle part ! Mais cela m'amuse bien de jouer des pièces quasiment de boulevard en les stylisant, sans décor construit et cela passe très bien. Et puis nous entamerons en octobre la grande tourné prévue avec "Aux deux colombes".

 

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Crédits photos : Laurent (Plus de photos sur Taste of Indie)



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