A un moment, on a eu peur… Peur que les Notwist soient atteints du syndrome de Kevin Shields… Vous savez, cette agaçante manie de tenir les gens en haleine (la sortie d’un disque pa exemple) et puis, walou…
Il aura donc fallu attendre six ans et demi pour que les frères Acher et leur groupe accouchent du successeur de Neon Golden, qui reste aux yeux de beaucoup comme un album majeur de ce début de millénaire.
Heureusement, on est pas resté sans nouvelles de nos teutons préférés pendant ces six longues années : Micha chez MS John Soda, Markus chez les excellents Lali Puna, Martin Greitschmann bidouille sous le nom de Console. Les Notwist se sont même acoquinés avec les rappeurs de Themselves autour du projet 13 & God.
Cela fait un mois que The Devil, YOU + Me éclipse une bonne partie de ma discothèque (et pourtant il faut y aller…). Cela fait d’ailleurs très longtemps que je n’avais pas eu de rapport aussi viscéral à un disque. La dernière fois, ça devait être avec The Ideal Crash de Deus. Ce que l’on appelle des "Soundtracks to Our Lives", la bande son de notre vie. Pour le moment, The Devil, You + Me, c’est une averse de neige sous la campagne picarde, au crépuscule, une voiture sur le toit, sur la N 104, les rouleaux de la plage de la Torche sous un soleil printanier, la campagne normande sous le déluge… Ce disque cultive un sacré paradoxe, celui d’être mélancolique et enjoué à la fois. Mélancolie douceâtre pour cœurs éteints en soins palliatifs.
Après un mois d’écoute assidue, The Devil, You + Me trouve progressivement sa place auprès de Neon Gloden. Le groupe s’inscrit toujours dans la même veine cultivée depuis le formidable Shrink, sorti en 1999, où le groupe avait commencé à fusionner avec bonheur une pop mélancolique avec des influences jazz à la Talk Talk, parsemés des habillages électroniques fulgurants de Greitschmann. L’introductif "Good Lies" pourrait d’ailleurs leurrer sur la direction prise par le groupe : un riff résolument pop, proche de "Day 7" qui ouvrait Shrink.
Et puis comme toujours, au fil des écoutes, on explore un véritable mille-feuille sonore : l’alliance de l’évidence et de la complexité, les samples en embuscades sous les fondations pop ou folk.
"Where in This World" renoue un temps avec la formule de Neon Golden : cordes, beats pulsatiles, xylophones et la voix doucement désabusée d’Acher. Une jolie mélasse poisseuse mais qui ne tourne jamais à vide.
"Gloomy Planets", "The Devil You + Me", "Gone Gone Gone" évoquent un Nick Drake contemporain qui aurait habillé son folk d’arrangements électroniques. Des morceaux à la mélancolie contagieuse portés par la voix désabusée et si particulière de Markus Acher. Loin d’être un chanteur exceptionnel, Acher compense par un timbre de voix singulier qui se fond à merveille dans les paysages sonores des Notwist.
"Gravity" et "Boneless" sont de loin les deux coups de maîtres de The Devil You And Me.
"Gravity" part de quelques notes dissonantes pour peu à peu laisser place à un vibraphone, la voix d’Acher. Le morceau se perd ensuite dans un labyrinthe d’arpèges mélancoliques et de rythmique complexe fait des temps morts et de cavalcades.
"Boneless", single potentiel de l’album, dévoile le côté guilleret du groupe. Enfin guilleret comparé à l’ensemble résolument mélancolique de cet album.
Cet été, faites vous plaisir : faites vous faire un T Shirt "ICH LIEBE DIE NOTWIST ABER NICHT TOKIO HOTEL", ou mieux encore "DIE NOTWIST UBER ALLES". |