Juin 2007, nous sommes quelques centaines de personnes à nous rassembler près de la place de Clichy pour assister à une nouvelle prestation du néo-hippie-Nathalie-Portman’s-boyfriend, Devendra Banhart lui-même. Joie !
Installés dans l’amphithéâtre douillet de l’Européen, nous sommes suffisamment impatients pour espérer que la première partie soit la plus brève possible.
Les lumières s’éteignent puis se rallument sur une demoiselle peinant à s’installer sur son haut tabouret. Ses yeux sont remplis de timidité mais son sourire respire la malice. Seule, armée d’une guitare et d’un micro, elle se lance donc à l’assaut. "Hi, my name is Adele" précède les premières notes d’une première partie qui restera dans nos mémoires comme l’une des plus marquantes de l’année passée.
Le souvenir d’une voix profonde et de mélodies charmantes est encore vif alors qu’atterrit dans mes mains ce disque 19. Nineteen, comme l’âge de la jeune femme. Encore une précoce. Pour preuve, toutes les paroles ont été écrites par sa plume entre 18 et 19 ans. Evidemment dans un tel contexte, on devine aisément les principaux sujets traités. Les garçons, l’amour et le fait que les deux ne vont pas toujours très bien ensemble. Mais la demoiselle a suffisamment de talent pour faire de ses histoires presque banales, de vrais moments de poésie. Adele aime d’ailleurs souligné un paradoxe qui la caractérise : "J’aime énormément la poésie. Je ne suis pas douée quant à sa lecture, mais j’aime l’écrire".
A l’écoute de 19, on ne peut, malgré tout ce talent, s’empêche de penser que la jeune femme prend la suite d’un chemin déjà pas mal sillonné par d’autres sisters soul. Amy Winehouse bien sûr et plus récemment (et sobrement) Duffy ou Kate Nash. Mais Adele a su s’entourer pour faire de cet album une œuvre authentique : Mark Ronson, Eg White, Jim Abiss et Jack Penate (en chœurs sur "Best For Last") ont pris part à sa confection.
19 s’ouvre sur "Daydreamer", superbe ballade permettant à tous les chanceux l’ayant vu se produire aux côtés de Devendra, de retrouver les émotions simples et pures d’un couple originel, la guitare/voix. "Chasing Pavements", premier single et véritable tube radiophonique outre-manche fait la part belle aux sentiments douloureux et complexes qui accompagnent les tourments amoureux. En s’autorisant une reprise du maître Dylan, "Make You Feel My Love", la jeune femme fait passer le message d’une assurance certaine. Et bien sûr, last but not least, "Hometown Glory", magnifique et mélancolique portrait d’une ville profondément ancrée dans son cœur, Londres.
Alors qu’Adele confiait dans une interview son angoisse de ne pas voir sa carrière décoller, nous, nous savons d’ores et déjà qu’il n’y a pas de doute quant à son avenir… prometteur. |