Texte de Marguerite Duras,mise en scène de Laetitia Letrrier, avec Emmanuelle Grivelet-Sonier et Yannick Barnole.

Cette pièce à l’écriture très cinétique de Marguerite Duras, créée par elle-même avec Miou-Miou et Sami Frey au Théâtre Renaud-Barrault en 1985, dit la déchirure encore intacte d’un amour défunt.

Une musique dont on connait tous au moins quelques notes. Par son écriture caractéristique faite de phrases simples mais chargées de non-dits et de sous-entendus, l’auteure décrit entre braises et cendres, une passion qui a vécue et revient hanter les lieux.

Le décor des retrouvailles, bar d’hôtel à l’origine, symbolise ici le lieu de la mémoire, à l’aide de draps inondant le plateau (scénographie audacieuse d’Esthel Eghnart), faisant penser à un appartement en travaux ou à un lit défait, peut-être aussi au paradis… En tout cas, un espace propre à faire revivre le souvenir, dire l’attachement et recréer la fusion passée entre ces deux amants.

Laetitia Leterrier, la metteuse en scène sait créer une ambiance. Elle sait aussi tirer le maximum de ses comédiens qui le lui rendent bien. Sa direction d’acteurs précise et délicate est une vraie réussite, donnant à ce texte pas évident à jouer une réelle profondeur et une tension de tous les instants. On ne saura jamais avant la fin ce qu’il va advenir de ce couple qui semble autant vouloir avancer que revenir en arrière et retrouve des traces, couleurs et fragments d’une histoire qui revit de façon onirique.

Yannick Barnole avec une sincérité confondante joue l’homme. Vêtu de noir et d’un chapeau melon, il exploite avec talent tous les registres, conférant à sa prestation une dimension émotionnelle rare. Emmanuelle Grivelet-Sonier fait passer également une multitude de sentiments et son jeu à fleur de peau, intense tout du long, est bouleversant.

Ce duo formidable nous offre un vrai cadeau d’émotion brute dans un spectacle sublime et déchirant où il joue sans aucune fausse note la musique d’un amour fantôme, planant pour quelques instants avant de disparaitre tout à fait.