Texte de Marguerite Duras dit par Astrid Bas avec Ami Flammer au violon.

Au Théâtre National de la Colline, Astrid Bas donne à entendre "L'amant" de Marguerite Duras dans ce qu'elle qualifie modestement de "proposition". Une proposition simplement. Pour dire Duras qui constitue un exercice ardu et nécessitant une sensibilité extrême et une médiation parfaite pour donner voix à la musique, cette fameuse musicalité durassienne.

D'autant que qui ne connaît cet épisode autobiographique de la romancière, épisode vulgarisé et ex(r)otisé par Jean-Jacques Annaud dans le film au titre éponyme dans lequel officiait une voix off charismatique, celle de Jeanne Moreau. De quoi brouiller le sens vrai.

Astrid Bas propose donc une adaptation linéaire épurée et une lecture distanciée du texte, parsemée de respirations musicales composées et interprétées par Ami Flammer, dans un décor dépouillé.

Car "la petite" de Marguerite Duras se meut dans l'espace sombre du souvenir narratif, du vécu retravaillé par le temps, la période de la traversée du fleuve, sur des planches bleutées, le bac du Mékong, le fleuve de l'enfance, la mer et le bateau du retour vers la France, la lame de fond qui fait resurgir l'enfouissement. Et c'est le violon qui traduit l'affect implicite et sous jacent.

Astrid Bas, dans la plénitude de ses moyens, a la note juste dès les premiers mots, cette note unique, ce qui ne signifie pas l'absence d'intonation et d'inflexion, qui porte et nourrit le verbe de Duras. Sans dramaturgie, sans illustration anecdotique, sans incarnation, elle est l'officiant inspiré, le passeur ultime. Elle est remarquable.

Dans sa note d'intention, elle conclut "chacun a sa Duras". Sa proposition sera la nôtre.