Comédie musicale écrite et composée par Tancrède et Fabrice Lehman, mise en scène de Stephan Druet, avec Frédéric Norbert, François Briault, Valérie Zaccomer, Amala Landré, Sinan Bertrand, Alice Decelle, Alma de Villalobos, Laurie May et Cécile Nodie.

A l'approche de l'hiver et des fêtes de fin d'année fleurissent les spectacles musicaux et la catégorie "comédie musicale" reprend du poil de la bête face au prisé "théâtre musical". Il y a les grosses locomotives et les petites productions artisanales, les petits succès et les gros flops, les boutiquages ringards et les revivals racoleurs, à chacun d'y associer le titre ad hoc.

A l'affiche du Trianon, "Audimat", concocté par les frères Lehman, Tancrède pour la musique et les lyrics, et Fabrice Lehman pour le livret, s'avère un spectacle réussi qui ravira les fans de comédie musicale, réconciliera ceux qui se sont détournés de ce registre souvent exploité de manière indigente et sera peut être source de découverte pour ceux qui, a priori, font la fine bouche face à ce registre souvent qualifié de mineur.

Les auteurs se montrent bons faiseurs à tous points de vue en choisissant des valeurs sûres et fédératrices et en respectant les règles du genre qui tiennent notamment à l'équilibre entre la comédie, le chant et la danse et en octroyant des partitions pondérées pour chaque comédien.

L'intrigue est classique, rivalités professionnelles et idylles amoureuses, mais déclinée de manière cocasse et satirique dans le petit monde du paf. Comme l'indique le titre, celui-ci est soumis à la culture, voire la dictature, du résultat symbolisé par l'indice de satisfaction du corps audiovisuel cible, les fameuses ménagères de moins de 50 ans. Un indice qui est à l'origine d'une impitoyable guerre des chaînes par animateurs vedettes interposés lesquels sont réduits à des pantins qui n'ont pas inventé le fil à couper le beurre mais qui n'en n'ont pas moins un petit coeur qui bat.

Musicalement, ils ne cèdent pas à la vogue variétale mais compose un patchwork de mélodies et de rythmes, du jazz au swing en passant par la chanson française et puisant même dans l'opéra, qui sonne résolument à l'oreille avec un petit air de déjà entendu. Sur scène, la distribution est judicieuse avec des comédiens-chanteurs et, pour la plupart, danseurs de surcroît, qui ne sont pas des inconnus, ont du métier et tournent déjà régulièrement dans des spectacles musicaux.

Terrorisés par Valérie Zaccomer, directrice d'un institut de sondage, Frédéric Norbert, rusé producteur télé de la vieille école, voix sirupeuse, brushing et aimant les toutous, qui retombe toujours sur ses pattes, et François Briault, jeune requin hyperactif et compulsif, affublés successivement d'une assistante qui ache bien ses dents longues, Alice Decelle parfaite en gourde, manipulent les jeunes premiers, les délicieux Amala Landré et Sinan Bertrand.

Les ménagères qui manient la guillotine télévisuelle qu'est la zapette sont représentées par un excellent trio composé de Alma de Villalobos, qui a signé la chorégraphie du spectacle, Laurie May et Cécile Nodie, érigé en chœur antique qui assure avec efficacité les intermèdes entre les tableaux.

Dans un simple et astucieux décor à géométrie variable crée par Gilles Jauffret à partir des lettres audimat, à mi-chemin entre music hall, comédie de Broadway et Parapluies de Cherbourg, le spectacle amusant et divertissant, truffé de clins d'œil, est emmené par une troupe pleine d'énergie et de bonne humeur que Stephan Druet, qui a déjà une belle carte de visite en matière de mise en scène de théâtre et d'opérette, dirige de manière tonique, fluide et chorale.