Comédie dramatique de Michel Marc Bouchard, mise en scène de Marie Frédérique Auger, avec Hélène Blondel, Claire Chauchat, Jeanne Henry et Boris Ravaine.

Dans un petit village du Québec, trois sœurs et un frère se retrouvent pour Pâques après des années. Cette réunion donnera lieu à des confrontations, des explications mais surtout une interprétation commune du réel et la mise à plat d’un lourd héritage psychique.

Après un début un peu trop tonitruant et précipité, les comédiens trouvent le bon rythme et nous embarquent avec cette famille démolie par l’absence d’un père et l’abandon d’une mère devenue un mythe et qui ne cesse d’alimenter les rêves des enfants et les réunit aujourd’hui, autant qu’elle les a éloigné dans le passé, même si certains s’en défendent.

Marie-Frédérique Auger a réalisé un spectacle tendu, dense, haletant, fort, drôle et remarquablement tenu d’un bout à l’autre. Grâce à un travail exigeant effectué avec les comédiens, le résultat est largement convaincant. Sur une scénographie astucieuse et dépouillée de Luce Noyer, l’espace est utilisé au mieux et des objets simples donnent de l’épaisseur à ce huis-clos familial.

Les costumes, originaux, donnent à tous un petit bout de la mère et les lient entre eux par un motif à pois, qu’on retrouve à des endroits différents sur chacun. Et qui les rassemble en une grande "corrida" peuplée des non-dits, des rancoeurs, et des fantômes du passé comme de ceux sortis de leurs imaginations.

Les comédiens sont tous formidables et loin des clichés. Hélène Blondel est une ainée crédible, empêtrée dans ses responsabilités et ses contradictions. Jeanne Henry est sobre et juste d’un bout à l’autre dans le personnage sans doute le plus difficile à interpréter car le moins "écrit". Claire Chauchat, touchante, affirme une vraie présence dans le personnage de la benjamine, qu’elle joue avec beaucoup de nuances et d’intelligence. Boris Ravaine, enfin, est un Luc assez loin de ce qu’on voit d’habitude du personnage mais qui se révèle au final tout aussi complexe et fragile.

A eux quatre, ils tiennent la scène sans temps morts et nous captivent jusqu’au dénouement. Un bien beau travail.