Spectacle-repas sur un texte et une dramaturgie de Ana Paula Secco, Fabianna de Mello e Souza, Georgiana Goès et Marina Bezze, mise en scène de Fabianna de Mello e Souza, avec Ana Paula Secco, Georgiana Goès et Marian Bezze et le musicien Leandro Castilho.

A l’entrée, on est accueilli par des femmes tout-sourire aux accents brésiliens et aux costumes chatoyants qui, après nous avoir proposé de se laver les mains, nous guident jusqu’à l’une des trois grandes tablées, installées dans une ambiance de guinguette. On prend alors place à côté d’autres spectateurs qui seront nos compagnons de route pour cette aventure.

La première scène réunit une mère et ses deux filles pour la préparation d’une salade traditionnelle de Bali. Elles s’interpellent et tout est prétexte à discuter : des ingrédients et des différentes interprétations d’une recette, comme de se rappeler des anecdotes familiales en rapport avec les repas.

On commence déjà à se dire qu’on aimerait bien goûter la fameuse salade, quand arrivent des grands plats qu’il ne nous reste plus qu’à partager entre voisins de table. Alors qu’on sert le vin à nos nouveaux camarades, démarre déjà un nouveau tableau sur la scène de l’autre côté : les trois avec costumes et masques balinais en sont à la préparation de gnocchis d’igname, plat traditionnel encore une fois, dans lequel elles incorporent tout ce qu’elles (et le public) veulent y mettre : des sentiments, des valeurs mais surtout : de l’amour. Révélant par là le secret d’une bonne cuisine. Et on savoure peu après ces gnocchis fondants et parfumés, non sans s'extasier.

La troisième partie, la plus bouleversante, fait intervenir nos trois comédiennes en grand-mères qui circulent de table en table racontant, précieux livres jaunis en main et photos d’époque qu’elles font passer, des histoires de recettes transmises de génération en génération . Cette création collective est en effet le résultat d’un travail de recherche mené par le Grupo Pedras et mis en scène par Fabianna de Mello e Souza (qui a dédié une émouvante prière à sa mère), illustrant le lien très fort qui passe à travers la cuisine.

Une séquence terrifiante suivra qui verra deux couples modernes se réunir dans un bon restaurant où soudain tout va dérailler : les quatre sont pendus à leurs portables et vont dévorer des saucisses aseptisées, tandis que derrière sur un écran, après quelques plans bucoliques dans la nature, défilent des images insoutenables d’animaux en batterie ou à l’abattoir. Et les quatre, bouches sanguinolantes, semblent devenir fous tandis que l’accordéon s’emballe, désaccordé.

Après un thé au gingembre pour se remettre, voici l’heure du dessert et de retrouver l’idée de fête avec une chorégraphie sensuelle dansée par les trois belles, célébrant le chocolat et la gourmandise et digne d’un carnaval de Rio. Alors qu’on goûte des desserts typiques brésiliens, le spectacle se clos sur des chansons traditionnelles donnant tout son sens à cet instant unique de convivialité, de partage et de fête.

Un moment magique, chaleureux et rare qui est une belle réflexion sur notre relation à la nourriture et aux autres. Un spectacle-diner débordant d’amour et de vie à ne rater sous aucun prétexte.