La
brume grise qui nimbe la cime des arbres dénudés
des Jardins du Palais Royal annonce
les frimas, les quelques promeneurs pressent le pas et tombent
en arrêt. Une meute de loups traverse les allées
de tilleuls et de chênes en direction du grand bassin
encore en eaux comme pour venir s'y désaltérer.
Cela sonne comme le début d'un roman policier de Fred
Vargas. Mais les loups sont pétrifiés, comme saisis
dans leur course, muscles tendus, gueules écumantes ou
hurlant à la mort.
Ce
sont "Les loups d'Estoppey",
œuvres réalisées par le sculpteur suisse
Olivier Estoppey que les cinéphiles
reconnaîtront pour les avoir vus dans le film "Le
crime est notre affaire" réalisé par Pascal
Thomas qui est également l'inattendu commissaire
de cette exposition.
Magnifiques pièces uniques réalisées en
béton coulé dans des moules en plâtre conçu
à partir de sculpture en argile modelées à
la main, ce qui leur donne cette force vivante et organique,
ces sculptures qui ressortissent à la sculpture animalière
ne tendent cependant pas au réalisme mais davantage vers
la représentation fantasmatique de la symbolique du loup
attachée aux mythes et légendes et aux peurs ancestrales.
Pour inoffensive que soit cette déferlante grise, elle
réveille néanmoins les peurs ancestrales et la
nette différenciation de chaque individu par leur attitude,
du dominant tous crocs dehors au hurleur, du rabatteur au suiveur,
permet d'y projeter ses propres chimères. |