Musique sep Théâtre sep Expos sep Cinéma sep Lecture sep Bien Vivre
  Galerie Photos sep Nos Podcasts sep Twitch
 
recherche
recherche
Activer la recherche avancée
Accueil
 
puce puce
puce Anthony Joseph
Interview  (Paris)  novembre 2008

C'est au mois de novembre 2008 que nous avions rencontré Anthony Joseph, venu à Paris pour parler de son nouvel album, Bird Head Son, à qui voulait bien l'entendre.

Pourtant, il suffit de prêter l'oreille quelques instants au disque aussi bien qu'à la personne pour comprendre que la rencontre de l'un comme de l'autre ne peut être que bénéfique.

Succès non annoncé, mais prévisible pour ce poète des temps modernes à la bonne humeur communicative.

Discussion sur la religion et les Caraïbes, le punk et la musique noire...

Tout d’abord, peux-tu nous parler un peu de toi, car le public français ne te connait pas encore très bien ?

Je suis donc Anthony Joseph, je suis né à Trinidad, et c’est là que j’ai passé la plus grande partie de ma vie. Je vis en Angleterre depuis 1989. Au départ, je suis un poète mais je suis aussi chanteur, musicien, écrivain.

C’est en Angleterre que tu as commencé à écrire ?

Non, j’écris depuis tout petit, depuis l’âge de 10 ans pratiquement, mais c’est vrai que c’est vers 1990-1991 que je me suis mis sérieusement à l’écriture, que j’ai envisagé cela comme une carrière. J’ai commencé par écrire des poèmes, j’ai publié mon premier recueil en 1994. Et un autre en 1997 et en 2006, j’ai écrit un roman et puis ce mois ci (ndlr : novembre 2008), je publie un nouveau livre.

Donc tu continues d’écrire des livres en même temps que ta carrière de musicien ?

Oui exactement. Ca va même plus loin que cela puisqu’en fait, les paroles de ce nouvel album, Bird Head Son sont toutes issues du nouveau livre. C’est quand même légèrement différent, c’est adapté mais cela reste la même chose bien sûr.

Et est-ce que le livre sera publié avec le disque, dans un même package ?

Non pas du tout, ce sont vraiment deux choses différentes. D’ailleurs, le livre et le disque ne sont pas publiés par le même éditeur. Et chacun sera distribué comme un livre et l’autre comme un disque sans rapport entre eux. Ceci dit, le livre sort en novembre 2008 mais le disque sortira seulement en mars là-bas. Alors qu’il sort en janvier 2009 en France.

C’est étrange, pourquoi cette différence ?

Le marché anglais est particulier, il faut d’abord se construire un profil là-bas, commencer à faire parler de soi, sinon le disque passera inaperçu. Alors on commence à le lancer à l’étranger, on lance le bouquin et ensuite viendra le disque. Mais avant, il faut vraiment se faire connaitre, faire plus de livre, nous en avons fait très peu pour l’instant.

Le livre sortira en France ? Dans une traduction française ? Tes précédents livres ne sont jamais sortis en France ?

Pour l’instant, le livre ne sortira pas en France mais Naive, ma maison de disques est intéressée pour le sortir peut-être un peu plus tard. Quant aux autres livres, ils ne sont jamais sortis en France, ou tout du moins ils n’ont jamais été traduits mais on peut les acheter en anglais bien sûr.

Comment et pourquoi avoir choisi de passer de l’écriture à la musique et surtout d’où vient l’idée de chanter les textes de tes livres ?

Hum (ndlr : il réfléchit quelques secondes). En fait, j’ai grandi à Trinidad et la musique y est omniprésente. C’était un rêve de pouvoir faire de la musique. Mais je crois que tout le monde a un jour ou l’autre ce rêve de faire de la musique, d’avoir un groupe de rock. Comme beaucoup d’enfants rêvent d’être pompiers par exemple.
C’est vrai que je me suis plus dirigé au départ vers l’écriture vers la poésie, mais au fil du temps je me suis rendu compte que la poésie pouvait exister dans d’autres domaines que de simples mots. La musique peut être quelque chose de très poétique. Et je ne pense pas qu’il y ait une barrière entre l’écriture de poèmes et le fait de les mettre en musique avec un groupe.

A propos de groupe, le Spasmband c’est ton groupe à toi ou des musiciens qui sont juste là pour cet album ?

Oui c’est mon groupe, nous formons un tout. Mais ce n’est pas mon premier groupe. Avant ça, quand je suis arrivé à Londres, j’ai joué dans un groupe de heavy metal, des trucs comme ca (rires).
Et puis j’ai un peu laissé tombé la musique lorsque j’ai vraiment commencé à écrire, je voulais vraiment donner plus d’importance à l’écriture, pouvoir faire des choses plus personnelles.
Après avoir publié mon roman, j’ai eu envie de revenir dans la musique, cela me paraissait nécessaire. Alors on a monté ce groupe qui était composé au départ de 4 personnes, et nous avons publié un premier album courant 2007, Lego the lion.

Mais d'après ce que tu dis, il y a un sacré écart entre tes premiers groupes et ce que l’on entend aujourd'hui sur Bird Head Son...

Et bien quand je faisais du rock, je pense que j’étais un peu naif. Depuis, j’ai grandi et je sais mieux ce que je veux. Et avant tout ce que je veux, c’est monter un petit groupe, me faire plaisir, faire plaisir aux musiciens, et faire la musique dont j’ai envie. Sans pression, sans ego.  Sans producteur qui nous impose des choses.

Cet album a été fait sans producteur également ?

Non, seulement le premier, qui a été fait très vite. Celui-ci a été fait correctement mais sans pression pour autant. Le seul truc, c’est qu’on m’a dit de faire si possible des chansons plus courtes car sur le premier album, les chansons pouvaient durer 10 minutes (rires).

Ces chansons de 10 minutes ne te manquent pas ? Est-ce que sur scène le groupe est tenté de prolonger un peu les nouvelles chansons ?

Oh non pas trop, on essaie quand même de garder quelque chose de fidèle, même si on se sent libre sur scène bien sûr et que l’on s’autorise plus de liberté avec les chansons.

A propos des paroles qui sont d’autant plus importantes qu’elles constituent un livre, c’est pour toi le moyen de faire passer des messages, une thérapie ?

Je crois qu’il y a un peu des deux. Mais s'il y a un message, ce n’est pas conscient. Du moins, ce n’est pas pour dire aux gens qu’il faut penser de telle ou telle autre façon. Si tu écoutes ma musique et que tu ressens un message au travers de celle-ci, je serais heureux pour toi mais ce n’est pas mon but premier de faire passer MON message.
Je crois que moi-même je ne me comprends pas toujours. Il y a toujours une part de mystère. Le seul véritable message finalement est : voilà comment je suis en ce moment, voilà ce que je ressens. C’est finalement très personnel  mais je pense que les choses personnelles peuvent devenir universelles. Une chose qui  m’est arrivée à moi peut très bien t’arriver à toi pourquoi pas. Et finalement, plus c’est personnel et plus ca peut tendre vers l’universel. Chacun peut se retrouver dans telle ou telle tranche de vie.
On peut écrire des chansons sur la paix et l’amour bien sûr. Mais ce que je cherche, c’est avant tout la paix intérieure. Tout cela pour dire qu’il n’y a pas de réel message mais que c’est vraiment des choses personnelles qui peuvent, j’espère, toucher d’autres gens.

Comment fais-tu pour mettre tes mots en musique ?

J’écris mes textes et puis on va en studio avec le groupe et on commence à improviser des trucs. Selon ce qui sort de la musique, je cherche dans mon cahier un texte qui irait bien avec cette musique là. Après, on arrange la musique et le texte pour que ca colle bien ensemble.

Tu n’écris donc pas de façon "classique"  avec ta guitare tout seul dans ton coin ?

Non, pas du tout. Il m’arrive d’avoir une idée de mélodie de base mais cela s’arrête là. Je ne vais pas imaginer des choeurs et des arrangements.

Tu parles souvent de ton départ de Trinidad comme d’un exil. As-tu envie de retourner là-bas ? Quel est ton rapport avec Trinidad ?

Je suis toujours très marqué par Trinidad, il y a beaucoup de référence au calypso dans mon album notamment.
Pour ce qui est de l’exil, en fait c’est un peu particulier. Nous, les gens des Caraïbes, de toute façon nous sommes dans une sorte d’exil permanent. Nous ne sommes pas des gens originaires des Caraibes par définition. Nous venons d’Afrique. On ne vit pas AUX Caraibes mais on vit LES Caraibes. Je me sens plus que jamais caraïbéens sans pourtant y vivre géographiquement. Ce sont mes racines, c’est ce qui a fait ce que je suis.

Tu vis donc en Angleterre. Est ce que l’Angleterre t’a également apporté certaines choses musicalement ?

Inconsciemment certainement. C’est certain que la musique que tu entends dans le pays dans lequel tu vis t’apporte quelque chose. En ce qui me concerne, c’est notamment la musique punk. Je trouve que le punk est un bon conducteur vers la musique religieuse, car cela partage la même transcendance. Cette façon d’exploser.
Et puis à Londres, il y a ce mélange de cultures musicales qui vient du fait qu’il y a de nombreuses cultures différentes qui y vivent.

C’est ce qu’on pourrait appeler de la World Music ?

Oui c’est vrai, même si je n’aime pas trop ce terme, on met toujours n’importe quoi là-dedans (rires).

Pour continuer avec les mélanges, parlons de Keziah Jones qui joue sur ton album. C’est un ami à toi je crois. A-t-il beaucoup apporté au disque ou bien s’est il juste contenté de jouer en invité ?

Il y a bien longtemps que je le connais c’est vrai et nous sommes amis.  Il est plus qu’un musicien à mon avis, c’est un génie, il est incroyable. Et quand il a fait ces quelques morceaux sur l’album, il a fait cela en une seule prise. Il demandait exactement ce qu’il voulait et ca marchait du premier coup. Il aurait voulu en faire encore plus mais ce n’était pas possible pour des problèmes de temps.
Et ce qu’il a apporté à l’album, c’est sa marque de fabrique, son touché si particulier. Quelque chose de magique, de vraiment spécial. Car même si on lui demande de jouer quelque chose de déjà écrit, alors on reconnaitra tout de même sa patte.

Il est beaucoup question de religion sur le disque, en tout cas il dégage une certaine spiritualité. C’est un sujet qui t’est cher ?

Oui c’est très important… mais ce n’est pas forcément quelque chose... On dit souvent "la dernière chose dont un poisson a conscience, c’est l’eau". Je suis seulement moi-même, je ne force rien.
Quand j’étais petit mes grands-parents fréquentaient ces églises africaines, c’est presque plus proche du vaudou en fait. Tous les week-ends j’y allais, c’est une partie très importante de ma vie. C’était une petite église au milieu de la cambrousse. L’approche de la religion des africains est quelque chose qui touche beaucoup au chant et à la musique, l’exorcisme, des sortes de transes. Les gens étaient secoués de spasmes (ndlr : le groupe de Anthony Joseph se nomme Spasmband). C’était des choses très profondes, mais quand on baigne dedans, on ne se rend pas compte, c’est naturel.

Dans ta bio il est question de prêcheur, d’apprenti sorcier… Penses-tu que dans un sens tu es une sorte de prêcheur ?

En un sens peut-être.  Mon pêre est un prêcheur, mon frère est un poète également, il y a une certaine tradition du "parler" dans notre famille. C’est un cadeau que nous avons reçu.

Pour revenir sur la musique, il y a beaucoup de genres mélangés dans ton disque. Tu n’as pas peur de perdre un peu l’auditeur ou de ne pas trouver ton public ?

Je ne crois pas car il y a quand même une continuité dans les morceaux.  Ne serait-ce que parce que c’est le même groupe, le même son. Quelle que soit la musique, son style, qu’elle soit noire ou blanche, il ne faut pas sous estimer l’auditeur. Je pense que les gens sont très capables d’assimiler tout cela, ce mélange de jazz de funk , de folk… Le tout, c’est que cela fasse au final une belle musique.

Tu parles de musique noire et de musique blanche, c’est une distinction importante pour toi ?

Non, ce sont des catégories toutes faites, et bien sûr la musique est de ma couleur, c’est logique. Mais il n’y a pas vraiment de règles. Evidemment, j’écoute de la musique noire, de la musique des Caraïbes mais j’écoute aussi Ravel, Beethoven ou encore les Doors (j’adore Jim Morrisson). J’écoute de la musique indé, j’écoute Duke Ellington. D’ailleurs Duke Ellington disait, il y a seulement deux sortes de musique, la bonne et la mauvaise ! (rires).
Mais ca reste important d’avoir de la reconnaissance pour la musique qui a été créée par les noirs comme le jazz par exemple. Mais c’est faux de dire qu’il y a de la musique noire et de la musique blanche. C’est trop réducteur.

Dernière question, quel disque offrirais-tu à ton meilleur ami s’il devait partir loin et que tu ne devais jamais le revoir pour qu’il se souvienne de toi en l'écoutant ?

Pas évidemment… Je dirais What’s Going on de Marvin Gaye !

 

A lire aussi sur Froggy's Delight :

La chronique de l'album Bird head son de Anthony Joseph and the Spasm Band
La chronique de l'album Rubber Orchestras de Anthony Joseph & The Spasm Band
La chronique de l'album The Rich are only defeated when running for their lives de Anthony Joseph
Anthony Joseph en concert au Festival GéNéRiQ 2009

En savoir plus :
Le site officiel de Anthony Joseph
Le Myspace de Anthony Joseph

Crédits photos : Thomy Keat (Retrouvez toute la série sur Taste Of Indie)


David         
deco
Nouveau Actualités Voir aussi Contact
deco
decodeco
• A lire aussi sur Froggy's Delight :


# 24 mars 2024 : Enfin le printemps !

Le printemps, les giboulées de mars, les balades au soleil ... la vie presque parfaite s'il n'y avait pas tant de méchants qui font la guerre. Pour se détendre, cultivons nous !. Ajoutons à cela nos chaines Youtube et Twitch et la semaine sera bien remplie.

Du côté de la musique:

"Dans ta direction" de Camille Benatre
"Elevator angels" de CocoRosie
"Belluaires" de Ecr.Linf
"Queenside Castle" de Iamverydumb
"Five to the floor" de Jean Marc Millière / Sonic Winter
"Invincible shield" de Judas Priest
"All is dust" de Karkara
"Jeu" de Louise Jallu
"Berg, Brahms, Schumann, Poulenc" de Michel Portal & Michel Dalberto
quelques clips avec Bad Juice, Watertank, Intrusive Thoughts, The Darts, Mélys

et toujours :
"Almost dead" de Chester Remington
"Nairi" de Claude Tchamitchian Trio
"Dragging bodies to the fall" de Junon
"Atmosphérique" de Les Diggers
quelques clips avec Nicolas Jules, Ravage Club, Nouriture, Les Tambours du Bronx, Heeka
"Motan" de Tangomotan
"Sekoya" de Tara
"Rita Graham partie 3, Notoriété", 24eme épisode de notre podcast Le Morceau Caché

Au théâtre

les nouveautés :

"Gosse de riche" au Théâtre Athénée Louis Jouvet
"L'abolition des privilèges" au Théâtre 13
"Lisbeth's" au Théâtre de la Manufacture des Abbesses
"Music hall Colette" au Théâtre Tristan Bernard
"Pauline & Carton" au Théâtre La Scala
"Rebota rebota y en tu cara explota" au Théâtre de la Bastille

"Une vie" au Théâtre Le Guichet Montparnasse
"Le papier peint jaune" au Théâtre de La Reine Blanche

et toujours :
"Lichen" au Théâtre de Belleville
"Cavalières" au Théâtre de la Colline
"Painkiller" au Théâtre de la Colline
"Les bonnes" au théâtre 14

Du cinéma avec :

"L'innondation" de Igor Miniaev
"Laissez-moi" de Maxime Rappaz
"Le jeu de la Reine" de Karim Ainouz

"El Bola" de Achero Manas qui ressort en salle

"Blue giant" de Yuzuru Tachikawa
"Alice (1988)" de Jan Svankmajer
et toujours :
 "Universal Theory" de Timm Kroger
"Elaha" de Milena Aboyan

Lecture avec :

"Au nord de la frontière" de R.J. Ellory
"Anna 0" de Matthew Blake
"La sainte paix" de André Marois
"Récifs" de Romesh Gunesekera

et toujours :
"L'été d'avant" de Lisa Gardner
"Mirror bay" de Catriona Ward
"Le masque de Dimitrios" de Eric Ambler
"La vie précieuse" de Yrsa Daley-Ward
"Le bureau des prémonitions" de Sam Knight
"Histoire politique de l'antisémitsme en France" Sous la direction d'Alexandre Bande, Pierre-Jerome Biscarat et Rudy Reichstadt
"Disparue à cette adresse" de Linwood Barclay
"Metropolis" de Ben Wilson

Et toute la semaine des émissions en direct et en replay sur notre chaine TWITCH

Bonne lecture, bonne culture, et à la semaine prochaine.

           
twitch.com/froggysdelight | www.tasteofindie.com   bleu rouge vert métal
 
© froggy's delight 2008
Recherche Avancée Fermer la fenêtre
Rechercher
par mots clés :
Titres  Chroniques
  0 résultat(s) trouvé(s)

Album=Concert=Interview=Oldies but Goodies= Livre=Dossier=Spectacle=Film=