Conte philosophique de David Harrower, mise en scène de Grégoire Strecker, avec Julian Blight, Alban Laval et Béatrice Venet.

Au début, il y a cette fumée, omniprésente et dense, qui s’insinue partout. Et ce couple : le laboureur et sa femme. Lui, travaille durement aux champs pendant qu’elle doit apporter le grain au meunier, un personnage à l’écart du village et quasiment banni dont le passé trouble alimente toutes les suspicions et catalyse les rancoeurs.

Dans "Des couteaux dans les poules", l’auteur évoque à la fois le monde rural et l’histoire de la femme du laboureur qui va peu à peu prendre conscience de ce qui l’entoure et de ce qu’elle veut, à la faveur de sa rencontre avec le meunier, si différent des gens du village et dont le langage l’interroge sur son propre désir de liberté.

De gestes lents en actions répétitives, se noue peu à peu le récit de ce trio et de plusieurs histoires enchevêtrées. L’écriture de David Arrower, d’une langue âpre et concise, demande un temps d’adaptation mais fascine peu à peu par tout ce qu’elle laisse transparaître.

D’une apparente simplicité, les mots, par la grâce des comédiens et de la mise en scène de Grégoire Strecker, épurée et précise, créent ce fil tendu qu’on suit avec intérêt. Merveilleusement interprété par de jeunes comédiens investis (Alban Laval notamment, dans le rôle du meunier est tout à fait prodigieux de retenue et de complexité), la pièce, opaque et hallucinatoire envoûte le spectateur dès les premières minutes et le laisse reconnaissant du voyage à l’issue de ce conte dramatique au rythme lancinant.

Un spectacle intense et singulier.