Xavier Plumas a ce quelque chose qui en impose quand il arrive sur scène.
Assis sur un tabouret, entouré de deux musiciens, il attire rapidement l'attention par ses chansons aux textes ciselés, parfois érudits auxquels il faut prêter toute l'attention nécessaire et une musique qui
tient du folk et du blues, qui voyage dans le temps et dans l'âme.
Sobre, il semble parfois être un conteur des temps modernes.
Son guitariste toujours impeccable fait des merveilles sans pour autant se sentir obligé de faire dans le bling et le clarinettiste, et autres instruments à vent, apporte une ambiance toujours en accord avec les chansons, parfois grave, parfois plus ludique et parfois un peu atypique, avec quelques sons electro issus, semble-t-il, d'une drôle de flûte rectangulaire.
Plumas égrène les titres de la Gueule du Cougouar bien sûr. Parfois avec une pointe de blues en plus, ajoutant un peu de piquant et d'energie à l'interprétation, parfois avec une délicatesse qu'on connaît bien chez Tue-Loup à vous tirer les larmes.
Les 30 minutes de set sont bien courtes et franchement frustrantes et l'envie de rentrer au chaud chez soi pour se repasser en urgence l'album en caressant le chat se fait cruellement sentir mais le Dear Reader s'installe déjà, the show must go on, mais Xavier Plumas et sa musique auront bien du mal à nous quitter, ce soir, et dans l'avenir.
C'est donc au tour de Dear Reader de faire chanter l'alligator. Trio venu d'Afrique du sud, on se retrouve face à trois jeunes blanc bec, la méche bien rangée que l'on imagine mal supporter l'équipe locale de rugby ou danser avec Johnny Clegg contre l'Apartheid. De toute façon, ils sont trop jeunes.
Quoi qu'il soit, la jolie demoiselle peut s'égosiller pour nous encourager à venir visiter son pays, ces trois là et leur pop sucrée ne ressemblent pas à l'image que l'on se fait de ce lointain pays.
En fait, on dirait plutôt les suédois de ABBA faisant une musique légère et ingénue, sans matière et sans grand relief.
Enfin, c'est ce qui ressort de ces à peine 20 minutes de set, après un long moment passé à brancher une guitare, puis à suspendre un titre pour cause de sampler débranché.
Car la recette de Dear Reader semble être la superposition de voix samplées en temps reel, de la chanteuse et parfois du batteur, venant par la suite s'ajouter sur le chant "réel" afin d'ajouter un peu de matière à leurs mélodies pas toujours folichonnes.
Du coup l'ensemble, donne de jolies comptines harmoniques soutenues par quelques sons graves propres à mieux nous faire ressentir les vibrations.
Bon, OK, c'est joli, les musiciens sont jolis, et les jolis spectateurs ont joliment applaudi. Un petit rappel plus tard, on attend déjà Vetiver et les plus curieux auront noté l'adresse du Myspace épelé par la jolie chanteuse pour y découvrir le joli album du groupe qui devrait faire un joli carton printanier.
Les happy hippies de Vetiver montent enfin sur scène, barbes presque bien taillées voire absentes, chapeaux et surtout un charmant clavier occupent la scène pour une suite de complaintes et ballades acidifiées et planantes.
Si l'ami Devendra a définitivement quitté la formation pour se popiser un brin, les Vetiver font toujours dans les titres plus noirs et qui se développent doucement comme les volutes d'une fumée interdite aux effets appaisants.
Lentement mais sûrement et grâce à un set fort bien réglé, la tension monte doucement et les mélodies esquissées au début de concert laissent la place à un son plus lourd et dense, qui emporte vite l'adhésion du public lorsque les guitares s'électrisent.
C'est la force de ce groupe que d'emmener l'auditeur dans des voyages sonores, comme le fait d'ailleurs très bien Plumas. On se laisse emporter au gré des morceaux, très haut pour redescendre progressivement et sans heurts sur des rythmes où s'entrecroisent blues et rock, jazz et folk.
On se retrouve parfois avec l'impression que la musique coule toute seule, la pianiste est quasiment allongée sur sa chaise, comme sous un soleil de plomb pianotant nonchalamment son clavier, les guitares livrées à elles-mêmes pas loin, finalement, de Television et Patti Smith pour cette ambiance un peu branleur et pourtant totalement maîtrisée.
Tout est en place, sans artifice, il ne reste qu'à convoquer Neil Young en maître de cérémonie pour que la fête soit parfaite.
Un trip sans risque et pas cher aussi bon et subtile que le parfum du même nom : du caractère et de l'élégance. La classe américaine est enfin une expression que l'on peut utiliser à bon escient.
Pour les plus sceptiques, le rappel sur commande (vous voulez du lent ou du rock péchu ?) devrait définitivement vous convaincre que le rock bio de Vetiver a de beau jours devant lui. Entre old school et modernité, l'équilibre est parfait ! Et la bonne humeur au rendez-vous. |