Comédie dramatique écrite par Arezki Mellal, mise en scène de Maria Zachenska avec Jacques Allaire, Criss Niangouna et Chantal Trichet.

Plongé un décor tapissé de tissus africains dont l'un d'entre eux se différencie radicalement - un drap de plage bleu et blanc, rappelant plutôt une ambiance de Club Med - le spectateur va voyager dans un univers un peu spécial...

L'Afrique, ce continent où les touristes viennent parfois juste en terre conquise, mais aussi parfois à la recherche de beaux hommes noirs robustes. Dans cette pièce tel est le cas pour ce couple mère/fils venu découvrir l'Afrique. Même si leurs aspirations sont très différentes, lui, l'argent et elle, du sexe-réconfort, il n'en reste pas moins que leur aventure africaine est directement liée à leur vie et leur relation en Occident. Un lien très complexe, décapant et dur, qui se situe dans le registre "je t'aime moi non plus", réunit cette mère et son fils.

L'écriture d'Arezki Mellal, à la fois comique, subtile et crue, permet de décortiquer et de comprendre les méandres de cette relation. Le style de l'auteur pose également un regard très inspiré sur les rapports entre les touristes français et l'Afrique de l'Ouest. S'ajoute au rythme déjà effréné de cette histoire, un personnage-clef, Moussa. Moussa est, entre autres, un guide africain, car ce n'est son unique voire vrai métier. Il est l'aide pour assouvir les moindres désirs de deux français...

"En remontant le Niger" est une pièce drôle, piquante, grinçante qui pointe du doigt les failles de nos sociétés. Les artistes choisis par Arezki Mellal pour interpréter ces trois personnages s'imposent comme une évidence. Le rôle de la mère vieillissante en quête d'aventures, interprété par Chantal Trichet, prend tout son sens. Elle alterne volontiers entre la bêtise et la souffrance. Classe, spontanée, passionnée, Chantal Trichet, et Isabelle (la mère) ne font qu'un.

Le fils mal aimé, cupide alias Jacques Allaire, fait froid dans le dos tant le réalisme de l'interprétation est parfaite. Jacques Allaire a su donner toute sa puissance à ce personnage déjanté, nerveux, aux envies de meurtre. Il est omniprésent, ne lâche jamais le morceau quitte à se faire exploser le bras. Peu importe, il tuerait père et surtout mère pour arriver à ses fins.

Et le fameux Moussa, plus communément appelé "Lustrucru" pour le plus grand bonheur du fils qui a su trouver tout seul avec son intelligence un peu limitée, un surnom débile à leur guide. Cependant, Moussa est d'un calme déconcertant. Il explore, étudie les comportements des blancs, les emmènent là où lui souhaite les amener...

Mais qui est-il réellement ? Que cherche-t-il ? Et que va-t-il trouver ? C'est toute la complexité de ce personnage aux fausses apparences. Grâce au jeu de comédien savamment recherché par Criss Niangouna, Moussa est à l'opposé des préjugés, des idées préconçues que se font les touristes de l'Afrique et de son peuple. Il incarne le bon côté du miroir...

Une remontée du Niger semée d'embûches au travers de laquelle le touriste, quel qu'il soit, se laisse happer littéralement.