Est-il
besoin de reprendre l'historique de Air,
groupe majeur de la scène électronique française?
La sortie de Talkie Walkie, leur nouvel
album (qui confirme leur rythme d'une production par an) est un
évènement mondial, tant le groupe versaillais est
une référence en la matière de compositions
électroniques.
Pour aller à l'essentiel, Talkie Walkie surprend d'abord
par sa pochette, qui d'ailleurs n'est pas très jolie. Pour
la première fois, Jean-Benoît Dunkel
et Nicolas Godin, les deux acolytes de
Air, s'exposent en couverture. La photo a beau être mise en
scène par un grand phoptographe, le fond matheux surprend.
Habitué aux dessins futuristes, le groupe semble montrer
d'amblée q'il va ici suivre un autre chemin... Et les formulse
mathématiques de faire écho à l'extrême
méticulosité du groupe, son souci du détail,
de la perfection.
Mais parlons aussi musique. Car cette volonté de sortir
du carcan futuriste dans lequel on les assigne se ressent dès
les premières notes, et surtout par cette voix non trafiquée.
Certes, "Venus" est une chanson
d'astronautes ("you could be from Venus, I could be from Mars")
mais d'astronaute qui ont musicalement les pieds sur terre.
Air n'est pas qu'un duo compositeur-bidouilleur et producteur de
sons hybrides et perfectionnés, Air produit aussi des chansons
aux paroles poétiques, d'une simplicité étonnante
au regard de l'émotion procurée par la musique. C'est
le mot simplicité qui est la trame conductrice de ce nouvel
album. Simplicité des mélodies, des arrangements,
bref l'opposé total du précédent 10
000Hz Legend, et également de Moon
Safari. Mais cette simplicité est un gage de survie
pour le groupe, qui a su, après avoir pris la vague de la
french touch, continuer une carrière (on pense notamment
aux déboires de Daft Punk, qui
sortent un best of de leurs deux albums). L'an dernier, le groupe
signait l'accompagnement de lectures de textes de Alexandro
Barrico, et l'automne 2003 a été l'occasion
de composer une musique pour un ballet. Autant de collaborations
qui viennent étayer le CV du groupe, et compléter
leur expériences musicales.
Talkie Walkie est donc à la fois un album tournant et un
album bilan. A la fois retour aux sources (on est souvent proche
des premiers maxi, comme "J'ai dormi sous
l'eau") et pas en avant (alléger l'électronique
pour la coupler aux sonorités accoustiques). Il en ressort
des chansons étonnantes comme Universal
Traveler, proche des Kings of Convenience,
des pistes musicales d'une sérénité provocante
comme "Mike Mills", des retours
sur soi, retour au Air de Moon Safari ("Run")
ou de 10 000Hz Legend ("Biological"),
des allusions à l'excellente B.O. de Virgin Suicide ("Another
day"), et puis des Ovni : "Surfing
on a rocket", "Alpha Beta
Gaga" (qui vous laisse cette agaçante envie de
siffler pendant des heures).
Talkie Walkie est un album complet, qui procure chez l'auditeur
un sentiment d'apaisement, une sorte de flottement poétique.
Air a majestueusement réussi son passage au XXIe siècle
en trouvant toujours les moyens de se réinventer.
Bravo.
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