A l’aube d’une grande tournée auvergnate, les membres fondateurs du label Kütu Folk - les clermontois dont tout le monde parle - pose le temps d’une soirée leur chemise à carreaux sur la scène du Nouveau Casino à Paris.
19h30, l’équipe Froggy’s Delight venue en force entre dans l’antre (pour votre information, le hasard a voulu que bon nombre des grenouilles qui nourrissent votre webzine préféré soient originaires de cette région si chère à Valéry Giscard d’Estaing).
Il est encore tôt, on ne peut pas dire qu’il y ait foule. Accoudés au bar, nous discutons au fur et à mesure que la salle se remplit. Ça et là, nous captons quelques noms exotiques tirés de conversations : "Murol", "Riom", "La Bourboule"… Une occasion idéale pour réviser sa géographie auvergnate, qui est avouons-le sans honte, pas au top de sa forme ("Ah bon La Bourboule c’est en Auvergne ?! C’est marrant, ça sonne plutôt comme une station balnéaire de Loire-Atlantique…". En tout cas, il semblerait que chacun s’amuse à citer les noms des communes que les Kütu Folk s’apprêtent bientôt à traverser au fil de leur tournée.
Parmi les quatre groupes qui doivent se produire ce soir, Pastry Case est le premier à se lancer.
Quatre musiciens composent cette formation, dont deux que nous retrouverons plus tard, à savoir Damien alias Leopold Skin ainsi qu’Alexandre de Delano Orchestra. Leur pop-électro-folk est aussi charmante qu’elle est inventive. Tout est prétexte à la créativité musicale, les instruments qu’ils soient traditionnels, plus actuels (claviers, utilisation des samples) ou infantiles (mélodica, kazoo) y participent pleinement. Les chœurs aériens nous envoûtent et Pastry Case nous amène ainsi dans son pays des rêves torturé et séduisant. On regrette seulement leur set trop court.
S’en suit Leopold Skin. Songwriter talentueux, il est ce soir accompagné de François-Régis alias St-Augustine et d’Alexandre de Delano Orchestra. Dans un style folk bien plus traditionnel que leurs prédécesseurs scéniques, Leopold Skin excelle franchement. Des compositions bucoliques portées par un chant de velours, tout est histoire de délicatesse. A seulement 21 ans, on se dit que pour lui la sensibilité est innée. Pendant une trentaine de minutes, Leopold Skin a fait d’un simple concert une œuvre de poésie que nous ne sommes pas prêts d’oublier.
Âmes sensibles, cette soirée vous est dédiée. St-Augustine va tout simplement faire perdurer le sentiment de bien-être dans lequel Leopold Skin nous avait plongé. Damien aka Leopold Skin est d’ailleurs du voyage, tout comme Clément bassiste de Delano Orchestra ainsi qu’une charmante violoncelliste. Sous ses airs de timide, François-Régis, maître d’orchestre de cette formation pop/folk ne l’est définitivement plus lorsqu’il se met à chanter. Gorge déployée, son chant est naturellement assuré, il se dégage d’ailleurs de ce jeune homme (au visage balafré ce soir) un charisme évident. Avec ses compositions mélancoliques mais jamais tristes, il nous enveloppe de douceur et c’est sans rechigner qu’on se laisse chouchouter.
Pour clore cette soirée Kütu Folk, la grande famille qu’est ce label (vous l’aurez compris) a pris la décision de placer en tête d’affiche The Delano Orchestra.
Choix judicieux pour plusieurs raisons. D’abord parce que les Delano bénéficient d’une notoriété plus appuyée que leurs confrères, puisqu’ils s’étaient imposés comme l’une des révélations du Printemps de Bourges édition 2008.
Ensuite, parce que leur style folk-post-rock contient une énergie naturelle qu’il convient de laisser s’exprimer en toute fin de concert, tel le bouquet final d’un feu d’artifice. Et effectivement, on en prend plein les yeux et les oreilles. Les compositions construites selon un schéma clairement post-rock trouvent leur originalité dans les instruments utilisés. Au delà des classiques guitare, basse, batterie, on trouve un violoncelle ainsi qu’une trompette. Ou quand Sparkelhorse rencontre Calexico rencontre Mogwai. Une potion ultra-efficace de laquelle sort un tourbillon fou emportant avec lui une salle entière et surtout consentante.
Pari plus que réussi pour les Kütu ce soir à Paris. Les voilà déjà repartis pour leur tournée "Coopé" (ndlr : Coopérative de Mai) à travers le pays auvergnat. On envie toutes ces villes qui vont découvrir le phénomène et qui n’ont encore pas conscience du moment riche et heureux qu’elles vont vivre. On espère pour les Kütu comme pour les autres villes de France, une tournée bien plus vaste. |