"Hark
! " chorégraphie, costumes et lumière de
Emanuel Gat, avec Stéphanie Romberg, Amélie Lamoureux,
Marie-Solène Boulet, Christelle Granier, Laura Hecquet,
Ludmila Pagliero, Lucie Clement, Marion Barbeau, Valentine Colasante,
Leila Dilhac, Peggy Dursort, Ninon Raux et Jennifer Visocchi.
"White Darkness" chorégraphie de Nacho Duato,
avec Marie-Agnès Gillot et Stéphane Bullion.
" MC14/22 Ceci est mon corps", chorégraphie
de Angelin Preljocaj, avec Bruno Bouché, Mallory Gaudion,
Jean-Christophe Guerri, Emmanuel Hoff, Aurélien Houette,
Gil Isoart, Yong Geol Kim, Alexis Renaud, Simon Valastro, Pascal
Aubin, Vincent Cordier et Sylvain Groud (danseur invité).
Le programme présenté à l'Opéra
Garnier de trois chorégraphes contemporains était
très homogène dans la noirceur.
Le premier programme, "Hark !" du chorégraphe
israélien Emanuel Gat, se joue
dans les gris sombre. Devant le décor d'un rideau de
fer, les treize danseuses, en justaucorps noirs, les cheveux
tirés en arrières par une queue de cheval, composent
un ensemble qu'on pourrait, par leur port, qualifier de religieux.
Seules les deux solistes se reconnaissent au fait qu'elle ne
portent ni collants opaques, ni pointes.
Le style du ballet est épuré. Les mouvements
d'ensemble légèrement désynchronisés
lorsque les danseuses viennent de l'arrière de la scène
vers le devant. Certains passages sont très rapides,
puis les danseuses continuent par de longues stations en pointe.
Les deux rôles principaux ont du mal à tirer leur
épingle du jeu dans un ensemble relativement homogène.
Cette pièce est agréable par les mouvements
d'ensemble, mais son austérité, la lumière
grise qui la berce, ne la rende pas particulièrement
aimable.
A l'aune des applaudissements, c'est la seconde pièce,
"White Darkness", de l'espagnol
Nacho Duato qui a été
la plus appréciée. Cette chorégraphie suit
le rythme de la musique. Marie-Agnès
Gillot, grande danseuse dans une longue robe rouge, et
Stéphane Bullion forment un
beau couple. Souvent, il la pousse ou la traîne au sol.
Comme pour les autres couples, les mouvements sont virtuoses,
les corps virevoltent, l'énergie est palpable.
Je n'ai cependant pas apprécié la scénographie
sur la symbolique de l'addiction à la cocaïne. De
la poudre blanche qui tombe du plafond recouvre la scène
noire par endroit. La scène en est même rendu difficilement
praticable puisque l'une des danseuses a même chuté.
Les puits de lumière qui éclairent le sable tombant
en pluie blanche sur les danseurs, m'a semblé être
(sans mauvais jeu de mots) de la poudre aux yeux, un procédé
facilement lyrique et spectaculaire, trop souvent répété,
qui ne rend pas justice à la danse. La scène,
plus rapide et énergique, qui voit les danseurs se démener
dans des cages de lumière blanche m'a, de ce point de
vue-là, semblé largement plus réussi.
L'ensemble donne une pièce d'une grande maîtrise
au niveau de la gestuelle, des sauts, des portés, mais
qui m'a semblé sonner faux quant au traitement de son
sujet.
Après l'entracte vient la troisième pièce,
"MC14/22 Ceci est mon corps"d'Angelin
Preljocaj, qui s'essaie à l'esthétique
de la souffrance et de la torture. Difficile de rire lorsqu'on
scotche un danseur, memebre après membre, pour l'empécher
de s'exprimer, c'est pourtant ainsi qu'a réagi une partie
du public. Certes, la volonté "comique" semble
présente, mais rend-elle l'exercice intéressant?
Sur des tables métalliques, les corps d'homme bougent,
se touchent, se maltraitent.
La lumière est verte, orange, rouge. Les mouvements
sont souvents hachés, avant que ne soient prises des
poses qui évoquent plus les orgies romaines que la Cène,
malgré le titre de cette pièce.
On en ressort persuadé de la virtuosité des
artistes, surpris par les qualités de chant de Sylvain
Groud, mais avec l'impression d'avoir été
certes dérangé mais sans que le message n'ait
été compris. |