Pièce
chorégraphique de William Forsythe exécutée
par le Ballet Royal de Flandre.
"Impressing the Czar" de William Forsythe est une
pièce qui ne se voit pas sans quelques explications préalables.
D'abord ce titre, "Impressionner le Tsar", ce qui
devait se faire en danse classique à la cour. Ensuite
l'enchaînement de tableaux. D'abord, en première
partie, une référence à la danse classique,
en second, une pièce épurée néoclassique,
puis une fin en trois tableaux délirants.
Dans le premier acte, les danseurs effectuent des pas de deux,
des mouvements d'ensemble, multiplient les pointes et les arrondis
des bras dans la tradition de la danse classique. Les décors
de Michael Simon sont très
riches, des plots dorés, un trône, un parquet de
bois incliné. Les costumes rappellent aussi les conventions
du ballet classique, tutus longs ou contemporains, justaucorps
sombres.
Cependant au milieu de ces schémas traditionnels, deux
fillettes en robe plissée se parlent en anglais, deux
escogriffes à lunettes dansent de manière saccadés,
un cupidon décoche ses flèches. Les danseurs occupent
tout l'espace, que celui-ci soit éclairé ou non,
des mouvements d'ensemble se déroulent à plusieurs
endroits sur le plateau en même temps à en devenir
étourdissant. Forsythe offre un tableau foisonnant, riche,
une visite au pas de course du musée de la danse classique
par des élèves survoltés.
Le second acte est une illustration de la danse comme art abstrait.
En justaucorps verts, dans un décor vide, sur une scène
noire et sous une lumière crue, 3 couples et 3 solistes
se livrent à un enchaînement rapide de mouvements
d'ensemble et de soli, sous deux cerises gigantesques dorées
pendues au plafond. La musique de Thom Willems rappelle les
ambiances d'Art of Noise. Cette partie du spectacle est un moment
de pure beauté, épuré et fascinant, qui
a été applaudi de manière nourrie, et en
particulier les performances des solistes Claire Pascal, Aki
Saito et Wim Vanlessen.
Enfin, dans le troisième acte, se succèdent trois
parties. D'abord une scène de vente aux enchères
des instruments du ballet classique. Ensuite l'ensemble des
danseuses et danseurs, tous vêtus de chemisiers blancs
et de jupes plissées se livrent à une danse quasi
tribale dans de larges mouvements concentriques qui m'a rappelé
le Boléro de Béjart. Et enfin, le maître
de cérémonie, tel le joueur de flûte, emmène
tous les danseurs dans de larges rondes débordant d'énergie.
Peut-être peut-on voir dans cet enchaînement un
message, celui que la danse, malgré les impératifs
financiers auquel le chorégraphe doit se plier, renaîtra
toujours car c'est le moyen d'expression primitif par excellence.
Quoiqu'il en soit, ce fut un spectacle d'une grande énergie
et d'une beauté fulgurante qui a été donné
par la troupe du Ballet Royal de Flandre. |