Un nouvel album de Sonic Youth est toujours un événement… Pardon, je recommence. Un nouvel album de Sonic Youth était toujours un événement, en effet depuis quelques années, soit je vieillis (ça, c’est inéluctable !), soit ce sont eux.
Toujours est-il que le dernier album qui vaille le détour chez les new-yorkais, date d’il y a fort longtemps. Washing Machine ? Je ne sais même plus. Les diverses productions des dernières années ne m’ont pas, et je ne suis pas le seul, beaucoup emballé. A telle enseigne, que je n’ai même pas prêté l’oreille aux deux derniers albums, et il parait d’ailleurs que c’est un tort, mais bon. Mis à part les séries SYR, qui sont dans l’ensemble, des tortures auditives peu intéressantes, les albums réguliers pêchaient au niveau du fond de commerce. Soit la bande de Thurston Moore se singeait elle-même (Murray Street), soit elle partait dans des envolées peu intéressantes et onanistes (NYC Ghosts and Flowers).
Aujourd’hui, la (plus très) jeunesse sonique a changé de maison de disques et officialise l’arrivée d’un nouveau membre, Mark Ibold, qui collabore avec eux depuis quelques années. The Eternal est donc le nouvel opus et ne déclenche pas l’émoi que cela provoquait quelques années auparavant.
Bon, il faut bien que je me plonge dans l’écoute… Il semble que le groupe ait décidé d’arrêter de se caricaturer et soit revenu à un son plus standard. Les envolées et digressions sonores sont maitrisées et ne partent pas dans des délires interminables et sans fin. Le seul problème, c’est que tout ce qu’on entend, ils l’ont déjà fait dans les vieux albums, et presque à l’identique. Le titre "The Antenna" en est l’exemple parfait. "Calming the Snake" est un titre sauvage comme Kim Gordon aime à nous les servir. Ici aussi, rien de très neuf.
Les titres à retenir, car il y en a, sont tout de même légion, à commencer par "Sacred Trickster", un morceau très rentre dedans, très bien orchestré, dans le plus pur classicisme soniquien. Le titre suivant "Anti-Orgasm" est, lui, marqué par un travail à plusieurs voix qui se répondent sur une instrumentation radicale et encore une fois, pas très novatrice. La mélodie vocale de "Poison Arrow" est particulièrement intéressante. L’ensemble est impeccablement réalisé et mené à terme. Pour finir l’album, un titre de plus de neufs minutes, "Massage The History", qui prend son temps pour développer des idées, Kim Gordon y chante parfaitement, un excellent titre peut-être le plus haletant et novateur de tout ce disque.
Pour l’enregistrement, Sonic Youth a changé ses méthodes de travail, en programmant des enregistrements prévus à l’avance de deux ou trois titres par session, en fonction de leurs planning, plutôt que de réserver une longue période de studio intensif, comme à leur habitude. Peut-être cela a rendu l’écriture plus efficace, en tout cas l’album est largement écoutable, voire vaudrait même le détour, s'il n’était pas le seizième album du groupe. Pas de renouvellement de genre ici, on creuse le sillon initié il y a quelques années. Ce qui pose la question de la durée de vie d’un groupe, mais aussi de la durée de vie d’un auditeur.
En effet, loin de porter les torts au groupe, c’est du côté de l’auditeur qu’une partie de la réponse se trouve. Suis-je prêt au changement quand ce groupe (vénéré) a sorti ses tripes, et bien plus encore il y a des années ? Et suis-je prêt à supporter la continuité, c'est-à-dire entendre encore et toujours les mêmes schémas, les mêmes sonorités, l’œil humide de nostalgie ? Et vous autres, posez-vous la question, quel est le dernier album de Sonic Youth qui vous a marqués ? Qu’y a-t-il de différent sur celui-ci ? Lequel des deux conservera un intérêt sur la durée à vos yeux ? A mon avis, tout est de ma faute et cet album ne restera pas comme impérissable dans la discographie de nos idoles, loin de là. |