Comédie darmatique de Harold Pinter, mise en scène de Libby Penn, avec Nathalie Clarke, Otis Waby et Will Featherstone.
Le Théâtre Essaïon propose pour quelques représentations, la pièce d'Harold Pinter "Trahison", dans sa langue d'origine, montée par une jeune troupe britannique.
La pièce, l'histoire d'un couple adultère, agencée en chronologie inversée sur une dizaine d'années, révèle, au fur et à mesure que le temps s'écoule à l'envers, que le ver était dans le fruit dès le début de cette relation extra-conjugale. Il dévoile aussi, les arrangements des protagonistes, par rapport à cette situation. Là où le drame aurait dû amener un nœud théâtral, l'inversion de la chronologie dévoile les faiblesses, l'acceptation, le non-dit des uns envers les autres.
Le texte de Pinter, calqué sur le mode parlé, se comprend facilement, même lorsqu'on n'a pas l'anglais comme langue maternelle.
La bonne idée de mise en scène par Liby Penn est de couvrir littéralement la scène d'enveloppes. En effet, c'est à cause de l'indiscrétion d'une lettre que la relation entre les amants sera révélée. On se rend compte aussi que les amants entretiennent, finalement, au fil des années, une relation au moins aussi épistolaire que physique.
Le Théâtre Essaïon, sorte de cave dont on projette sur le mur du fonds la date de l'action, est l'endroit idoine où installer cette pièce. Il amène l'espace clos, le "home" dans lequel les amants se retrouvent. Ce n'est pas une demeure, qui vit de cris d'enfants, qui protège une structure familiale, cet endroit à la froideur des briques nues, de la scène occupée par une table, deux chaises et quelques bouteilles. La scène trois, dans laquelle les amants décident de mettre un terme à leur aventure, s'y prête parfaitement.
Les acteurs, en particulier Will Featherstone dans le rôle de Jerry, l'amant, et Nathalie Clarke dans celui d'Emma, la femme, sont excellents. Ils amènent une véritable épaisseur à leur personnage. Leur diction, très BBC pour un public français, facilite l'appréhension du texte. Le seul reproche qu'on peut leur faire est leur jeunesse par rapport aux rôles interprétés, ils y sont cependant crédibles.
Au final, d'une pièce forte et originale par sa structure, Libby Penn a su jouer du lieu pour en extraire, avec la complicité d'acteurs jeunes mais talentueux, sa substantielle moelle.