Pour clôturer sa première saison muséale, qui a commencé avec l'exposition "Le jardin de Monet : l'invention d'un paysage", le Musée des Impressionnismes de Giverny consacre un exposition monographique à Joan Mitchell.
Joan Mitchell, peintre américain issue de l'École de New-York des années 1950, rattachée au mouvement expressionniste abstrait de la seconde génération, a vécu longtemps à Vétheuil situé à quelques kilomètres de Giverny dans une maison où avait séjourné Monet.
Mais ce n’est pas cette seule circonstance géographique qui motive l’exposition mais bien la filiation perçue entre les œuvres des deux peintres, celle de Joan Mitchell, commençant là où finit celle de Monet avec ses œuvres tardives avec la dilution de la forme au profit du mouvement, qui en font le précurseur de l’expressionnisme abstrait.
Conçue en collaboration avec la Kunsthalle d’Emden en Allemagne et le Palazzo Magnani de Reggio Emilia, l’exposition "Joan Mitchell - Peintures" présente une sélection exceptionnelle de toiles monumentales, dont ses polyptyques si caractéristiques de sa manière, dans lesquelles elle applique les techniques de l’expressionnisme abstrait au traitement des paysages et de la nature.

Joan Mitchell, to convey the feeling of the dying sunflower
Le polyptyque, tendance en vogue dans la peinture américaine de l’époque, peinture panoramique ou séquentielle ? A ce sujet, un film inédit en France, réalisé en 1976 par Angeliki Haas, et diffusé au sein de l’exposition, montre la difficulté de l‘artiste à commenter sa propre œuvre et donne un éclairage intéressant notamment sur la prédilection pour ce format que Joan Mitchell explique comme la simple résolution de sa difficulté à peindre des toiles horizontales de grand format.
Ce
télescopage des émotions ressenties face à
la nature a imprègné l’âme après
avoir impressionné les sens ("La Grande Vallée",
"Les tournesols", "Bleuets".
Et le souvenir des événements personnels ("Goodbye
Door", "Last Time", "Before") font
de Joan Mitchell un peintre de l’émotion mnésique
à la manière proustienne, qui peint dans son atelier
les volets clos dans un isolement propice à la catharsis
picturale.
Une peinture essentiellement vibratoire qui capture l'émotion fugace dans ce qu'elle a de plus prégnant, de plus essentiel, quelques couleurs, un mouvement, comme un phénomène de persistance rétinienne, vivement happés par le dripping ou les envolées brutales du pinceau.
Joan Mitchell refusait tant l'étiquetage "expressionnisme abstrait" qu'elle réfutait l'influence de Monet. Alors peut-être le chaînon manquant entre les deux.
