Voilà un concert dont l’histoire remonte à 1991…
1991 : un mur est tombé depuis deux ans, d’autres verront le jour, bien plus hauts et bien plus longs… Le monde se réorganise comme il peut mais "le monde se trompe" dans le quatrième et dernier album studio des Pixies.
Piste 3 de cet album : "Alec Eiffel".
Quelques années plus tard, en 1998, un groupe meurt : Oobik & The Pucks, renaît sous une nouvelle forme et, en clin d’œil aux Pixies, choisira pour nom de baptême celui d’une troisième piste d’un monde qui se trompe : Eiffel.
La même année, des ados répètent dans une cave à Saint-Étienne et se demandent bien comment ils vont trouver une place dans notre histoire…
En 2005, Romain Humeau, chanteur guitariste d’Eiffel est en tournée pour son album solo L’Eternité de l’instant. Eiffel fait partie des groupes français qui comptent et influence déjà son lot de musiciens. La même année, nos ados devenus grands, après des heures de répétitions et de concerts stéphanois, décident de prendre leur envol. Grands admirateurs des Pixies et d’Eiffel, ils prendront ce qu’il reste de la piste 3 et répondront désormais au nom d’Alec !
L’histoire se tresse en peu plus et commence à prendre forme… En 2007, après un dernier album studio, une tournée et un premier Olympia, Effel disparaît. Alec continue à tourner et sort son premier album en 2008 : Partir vers l’ouest. Cette même année, Eiffel s’active dans l’ombre, revient au grand jour le temps d’une cerise avec Noir Désir et laisse planer l’espoir pour les fans d’un nouvel album. La conclusion de notre histoire approche À tout moment avec la sortie du nouvel album d’Eiffel en 2009.
29 octobre 2009, notre histoire transforme une soirée au Fil en Piste 3 : Alec - Eiffel…
Alec en première partie de soirée vit un moment que l’on comprend pour eux d’une intensité immense. Consécration pour ces fans de la première heure, Alec joue pour la première fois avec son grand frère. Ce moment restera pour eux, on l’imagine, un souvenir fort, ainsi que pour une partie du public, venu en nombre assister à cette rencontre Alec - Eiffel. Globalement, le groupe a déployé une grande énergie et nous renvoie un vrai plaisir de jouer, malgré la pression du regard attentif de Romain Humeau présent en coulisse pendant tout le set. Mais assez vite le style rock bien connu est cerné, malgré quelques détours plus oniriques. On ne passe pas un mauvais moment pour autant, loin de là, mais la fraîcheur du jeune groupe est parfois en opposition avec des postures scéniques trop téléphonées, déjà vues. Soulignons une fin de set honorable et particulièrement efficace, libérée dans les derniers mètres de la lourdeur des figures imposées.
Pour autant pouvait-on imaginer meilleure introduction au retour d’Eiffel ?
Ce soir est la première date de leur tournée qui s’étalera sur 2009 -2010. Un tour de chauffe a bien eu lieu en septembre au festival suisse du Chant du Gros, mais c’est bien ici à Saint-Étienne que les choses sérieuses commencent.
C’est en toute simplicité qu’Eiffel a abordé cette première date, Romain Humeau se chargeant des derniers réglages son sur scène, quelques minutes avant le démarrage.
Le décor est planté, nous ne sommes pas dans un numéro bien huilé de star américaine, mais bien dans la simplicité d’un groupe de musiciens qui a envie de retrouver son public et de jouer ensemble après un long travail studio.
Mais tout n’est pas si simple… Ce dernier album s’est construit autour de la voix de son chanteur toujours plus ciselée et travaillée. L’enregistrement de plus de 10 mois s’est construit à partir d’une structure acoustique/voix, avec des ajouts instrumentaux dans un deuxième temps, laissant une voix contenue, présente, tout en subtilité qui enveloppe l’oreille à la première écoute. Le live ne permettant pas le même travail, cette première date est aussi le grand test qui permettra de passer des titres plus anciens du groupe aux nouveaux morceaux sans perdre en unité.
Si une qualité de son un peu en dessous a parfois desservi la prestation, les choix musicaux fonctionnent bien. L’entame de concert franche et sobre avec le tout nouveau titre "Minouche" a planté le décor. Le public a accueilli le retour du groupe avec un enthousiasme palpable qui ne s’est pas égrainé au long du concert. Parfois, Estelle et Romain semblent bien figés, comme un peu gênés dans un tout nouveau costume et donnent l’impression de légers flottements. Mais le public ayant conscience de l’événement que représente une première date, aborde le concert comme il vient, ces détails accentuant un peu plus le profil unique de la soirée.
La prestation est réussie et il convient de souligner le vrai plaisir qu’il y avait à partager celui du groupe. Un plaisir simple et authentique. La confrontation d’univers différents amenés par les différents albums permet de trouver un rythme agréable.
Les fans ont été ravis de retrouver Eiffel et les curieux heureux d’assister à ce premier concert qui, finalement, permet de partager avec le groupe, les doutes, les approximations mais aussi les bonnes surprises.
La musique d’Eiffel reste définitivement solide sur scène, fermement campée sur une histoire et conserve bien des choses à nous dire. Il n’y a qu’à tendre l’oreille, pour se souvenir que "à tout moment la rue peut aussi dire non !".
Alors si le monde se trompe depuis presque 20 ans, il n’a qu’à bien se tenir : la tournée ne fait que commencer ! |