Drame
historique de August Strindberg, mise en scène de Nathalie
Hamel, avec Geoffrey Vigier, Valentin Terrer, Nicolas Planchais,
Romain Jouffroy, Rodolphe Delalaine, Jean-Luc Bouzid, Laurent
Brusset, Jean-Paul Saint, Albert Piltzer, David Mersanne et
Alain Michel.
Dans le cadre de l'intégrale August Strindberg dispensée
au Théâtre du Nord-Ouest, Nathalie Hamel a choisi
de porter sur scène une des pièces historiques
du dramaturge suédois davantage connu pour ses drames
naturalistes.
"Le rossignol de Wittenberg", consacrée au
moine augustin allemand, théologien et professeur d'université
Martin Luther, retrace sa jeunesse de clerc qui le mena à
fonder le protestantisme en réaction aux préceptes
de l'Eglise catholique et aux agissements dévoyés
de ses représentants temporels.
Luther est présenté certes comme un théologien
mystique, qui entreprend une farouche croisade anti-papiste
persuadé d'être investi d'une mission divine, mais
également comme un homme "sous influence",
influence qui ici appelle même le pluriel. En effet, dans
l'Europe du 16ème siècle, il se trouve dans un
milieu de clercs au cœur de luttes tant religieuses et
politiques qu'économiques au sein d'une Allemagne morcelée
qui ne constitue pas encore un empire institutionnel.
Par ailleurs, Strindberg y introduit une dimension "surnaturelle"
avec l'intervention déterminante d'un personnage énigmatique,
le docteur Faust, lettré et magicien, éminence
occulte qui semble bien tirer les ficelles de tous ces pantins
terrestres.
Sans céder à la tentation de la contextualisation,
Nathalie Hamel, qui affectionne particulièrement le registre
des pièces historiques et religieuses, monte cette pièce
en costumes dans le respect du texte et de la dramaturgie classique.
Elle dirige efficacement une troupe masculine de comédiens
pour s'attacher à restituer avec réalisme l'humanité
des personnages. Sur scène, face au dominicain Johann
Tetzel, interprété par Jean-Paul Saint, chargé
de mener en Allemagne la fameuse campagnes des indulgences condamnée
par Luther, les principaux protagonistes de la Réforme
: l'électeur de Saxe fondateur de l'université
de Wittenberg, creuset du protestantisme, et protecteur de Luther
(Nicolas Planchais) et Spalatin, son conseiller ecclésiastique,
(Laurent Brusset), le théologien Karkstadt (Jean- Luc
Bouzid), l'influent chevalier von Sickingen (Albert Piltzer),
les poètes Hans Sachs (Rodolphe Delalaine) et Ulrich
von Huttent (Romain Jouffroy), le peintre Cranach (David Mersanne)
qui participera à la création de l'iconographie
protestante et le prédicateur Staupitz qui fut le supérieur
de Luther (Alain Michel).
Dans le rôle de Luther, Geoffrey
Vigier réussit à concilier la fougue et
le doute qui assaillent le jeune clerc qui se trouve propulsé
dans une aventure hors du commun avec à ses côtés
une "sacrée" éminence grise, émissaire
de Dieu ou émanation satanique, à la fois flamboyante
et ténébreuse, incarnée avec beaucoup de
subtilité par Valentin Terrer
qui donne une vraie épaisseur énigmatique et intemporelle
au personnage de Faust. |