Comédie
de Hanokh Levin, mise en scène Frédéric
Bélier-Garcia, avec Manuel Le Lièvre, David Migeot
et Agnès Pontier.
L'humour du désespoir et l'incorrigible humanisme de
l'auteur israélien Hanokh Levin sont fidèles au
rendez-vous dans la "comédie en trente tableaux
et douze chansons" intitulée tout simplement "Yaacobi
et Leidental".
Yaacobi décide un beau jour de s'émanciper des
parties de dominos autour d'une tasse de thé avec son
ami Leidental qui occupent ses soirées pour trouver l'amour
et se marier de préférence avec une dame artiste
dotée, de surcroît, de consistantes rondeurs fessières.
Et il lui suffit de pointer le nez dehors pour se faire embobiner
par la vraie fausse pianiste Ruth Gros-popotin pour qui le mariage
est un simple viatique. D'où des déconvenues prévisibles
qui se déroulent en présence de Leidental devenu
l'homme à tout faire de la maisonnée.
Voulant se démarquer du folklore et de cabaret grivois
qui sont, selon lui, les registres dans lesquels les metteurs
en scène cantonnent cette fable convulsive, Frédéric
Bélier-Garcia, directeur du Centre Dramatique National
d'Angers, y substitue une autre convention tenant à la
comédie sentimentale des années Legrand qui se
déroulerait selon le rythme d'un film en accéléré.
Dans un très réussi décor beauf-récup-kitsch
avec un joli clin d'œil à Hans Bellmer, de Sophie
Perez, les deux amis faux frères, Manuel Le Lièvre,
dont le potentiel tragi-comique est patent, se démène
comme un beau diable et David Migeot incarne de manière
convaincante la transparence lénifiante de l'ami sous
influences.
Mais la sauce ne prend pas sans doute en raison de la conversion
de la démesure du tragique propre à Hanock Levin
en hyperactivité brouillonne et de la mutation infligée
au personnage pivot féminin, campée par Agnès
Pontier, en l'espèce davantage une Ruth Gros-lolos hystérique,
fort éloignée du personnage original qui tient
de la mante religieuse et de la veuve noire.
En effet, les personnages s'agitent en permanence de manière
frénétique, désordonnée, peu esthétique,
voire peu compréhensible. Ainsi, sur fond de parodie
musicale, de Bécaud à la soap variété
transalpine, concoctée par Reinhardt Wagner, avec micros
et voix approximatives de radio crochet de campagne, la succulente
farce de la vie vue par Hanock Levin tourne à la bouffonnerie.
Question de goût. |