Comédie
dramatique de Emmanuelle Bataille, mise en scène de Régis
Santon, avec Marie-France Santon, Aurélie Bargème,
Marie-Christine Danède, Madgid Ziouane (en alternance
Lounès Tazaïrt), Régis Santon et David Seigneur.
On ne choisit pas ses parents" et "Les chiens font
parfois des chats". Voici deux expressions qui s'appliquent
à la situation d'une jeune femme, brillante avocate,
confrontée brutalement à une réalité
douloureuse, avec la colère et la honte en bagages, résultant
de la cohabitation forcée avec une génitrice peu
valorisante et avec laquelle les liens d'amour filial sont plus
que ténus.
Car cette mère, qui ne l'a pas élevée,
au vrai profil de personnage à la Zola, est non seulement
issue d'un milieu modeste mais également handicapée
mentale. Pas vraiment un handicap profond mais un de ces êtres
appartenant, selon une terminologie du 19ème siècle,
à la famille des imbéciles heureux, qui débarque
un beau matin dépressive, bourrée de neuroleptiques
à cause de tendances suicidaires, flanquée de
ses tics et de ses exigences ("Je fais ce que je veux de
ma cotorep !"), de son référent médico-psychologique
zen, de sa bien brave copine rockeuse basse du front et de son
amant maghrébin.
La confrontation est rude pour la jeune femme d'autant qu'il
ne s'agit pas de retrouvailles choisies mais qu'elle se trouve
prise au piège de l'état de nécessité
dans lequel se trouve sa mère ce qui l'accule à
une véritable impasse psychologique qui sera peut-être
salutaire.
Tel est le sujet traité par Emmanuelle Bataille dans
"Fille de..." qui ressortit au théâtre de
sentiment et au théâtre de bons sentiments dans
lequel elle navigue entre les écueils du mélodrame
et du sentimentalisme.
Il est aisé de comprendre pourquoi cette pièce
a retenu l'attention de Régis Santon qui en assure la
mise en scène, qui, quand il présidait aux destinées
du Théâtre Silvia Monfort, accueillait régulièrement
des spectacles interprétés par des comédiens
atteints de handicaps physiques et le Festival du Futur Composé
qui organise des spectacles créées par des professionnels
avec de jeunes handicapés mentaux.
C'est également grâce à lui et à
son long parcours de comédien et de metteur en scène
que cette pièce passe le cap du reportage-documentaire
à la "Strip-tease" pour tenir la route sur
la scène.
Egalement grâce aux comédiens qui composent efficacement
des personnages relativement monolithiques pour les besoins
de la démonstration. Car bien évidemment cette
pièce vise à démontrer que l'amour ne connaît
pas l'ostracisme et à prôner la vertu bien malmenée
dans la société contemporaine qu'est la tolérance.
A ce titre, dans le rôle de la mère, Marie-France
Santon, toujours juste et sur le fil, réussit un beau
tour de force en ne forçant pas ni sur le compassionnel
ni sur l'angélisme lénifiant mais en composant
un personnage de femme qui a, comme tout à chacun, ses qualités
et ses défauts. |