Il suffit de regarder Konstantin Gropper, pour comprendre.
Rares sont les artistes à porter aussi franchement sur eux leur univers musical, mais pour le protagoniste de Get Well Soon, c’est tout simplement une évidence. De lui se dégagent, mélancolie, romantisme, étrangeté, intelligence, douceur, troublante et attirante beauté. C’est exactement et précisément ce que nous évoque ce nouvel album Vexations, tout comme l’avait déjà fait son prédécesseur Rest Now, Weary Head ! You Will Get Well Soon.
A 27 ans, ce berlinois d’adoption impressionne par sa maturité artistique acquise à force d’expériences musicales diverses (apprentissage classique en passant par le punk ou encore l’électro), mais aussi par une érudition impressionnante. Amateur d’art sous toutes ses formes, l’intérêt du jeune allemand est exacerbé lorsque celui-ci vient côtoyer des thèmes philosophiques chers à son cœur, tels la mort, la frustration ou la colère. Pour son nouvel opus Vexations, après avoir listé plusieurs sujets auxquels il tenait particulièrement, Konstantin tombe "sur un recueil de textes de Sénèque dont les titres "De la colère", "Sur la vie heureuse" , "De la brièveté de la vie" correspondaient étrangement à [ses] thèmes. [Il a] alors choisi de partir de citations d’œuvres d'autres artistes pour bâtir [ses] chansons" . Avec un concept aussi audacieux, il fallait un album à la hauteur. C’est chose faite.
Comme pour Rest Now… , Vexations est principalement composé d’orchestrations flamboyantes. Les cuivres et les instruments à cordes les plus nobles ne cessent leurs allers-retours, tout comme les nombreux chœurs féminins.
"Nausea" démarre l’album en déstabilisent nos émotions. Mélange de sonorités presque antinomiques - des scintillements féeriques, des chants d’oiseaux font face à des violons tristes et endoloris – ce titre a l’esthétique idéale pour officier comme BO d’une série ayant pour héros un serial-killer-justicier. Changement d’énergie avec "Serena’s Silence", probablement le tube de ce nouvel album. C’est cette fois-ci une véritable envolée lyrique, parfaitement maîtrisée, qui nous porte avec ses chœurs et son final explosif. Frissons ensuite avec "Red Nose Day", Konstantin nous ballade tout près de l’oreille alors qu’en fond, une chanteuse d’opéra fait quelques apparitions bouleversantes. Avec 5 steps – 7 words, l’heure est grave. Tout commence au beau milieu d’une prêche passionnée ornée de cuivres dramatiques. Mais pour mettre en musique la théorie des 5 étapes du deuil, il fallait ça. Avec "Werner Herzog Gets Shot", Konstantion Gropper en profite pour rendre un hommage simple et admiratif au plus radical et jusqu’au boutiste des réalisateurs allemands. Dernier sursaut d’énergie avec "Angry Young Man". Etrange et brutale intro metal qui disparaît aussi vite qu’elle est arrivée, laisse place à une nouvelle leçon d’orchestration. Alternance de rythmiques fortes portées par une batterie et des violons urgents, et de moments plus troubles, plus intimes. Un autre tube évident de ce nouvel album qu’il est bon de découvrir via son superbe clip.
Evidemment Vexations est une réussite artistique. Plus lyrique, plus lent, il ne bénéficie effectivement pas d’autant de tubes que son prédécesseur Rest Now… Pourtant, impossible de ne pas s’émerveiller devant tant de maîtrise et de beauté. On aurait aimé être une souris pour voir de nos yeux tout le travail de réalisation nécessaire à la création de tant de richesses. |