Comédie
dramatique de Paul Claudel, mise en scène de Antoine Caubet, avec Pierre Baux, Antoine Caubet, Cécile Cholet
et Victor de Oliveira.
Antoine Caubet a choisi de monter le
"Partage de midi",
de Paul Claudel dans une lecture différente
de celle traditionnellement célébrée avec
un lyrisme extatique et révérent, plus accessible
au grand public, en traitant le verbe de l'auteur dans sa matérialité
brute et dans le registre du théâtre des pulsions,
qui est également à l'image du bonhomme (Caubet),
solide et généreux.
Car comme il l'indique dans sa note d'intention "Claudel,
comme chacun d'entre nous, se débrouille ici comme il
peut avec son histoire d'amour". Les protagonistes archétypaux
de l'iconographie claudélienne que sont la femme, l'ordre
moral, l'aventurier méprisable et la quête de l'amour
transcendé sont ici, d'abord et avant tout, des hommes
et une femme, une nerveuse, un lymphatique, un sanguin et un
angoissé, soumis à leurs désirs qui, quelque
caractère qu'ils revêtent, prosaïques, amoureux,
triviaux, sont avant tout charnels, humoraux et quasiment organiques.
La mise en scène au diapason, profane, charpentée,
terrienne, de chair et de sang, s'appuie toutefois, de manière
originale, hardie et ambitieuse, sur trois déclinaisons
différentes, une par acte, en trois lieux distincts ce
qui amène le spectateur à des intermèdes
déambulatoires dans le théâtre de l'Aquarium.
Premier acte, théâtre de tréteaux et comédie
de mœurs : les tables du hall d'accueil du théâtre
font office de pont. Deuxième acte, scène circulaire
dans la pénombre, cercle de terre primitif, arène
de la passion, théâtre antique, pour la cérémonie
exaltée des corps. Dernier acte, minimalisme beckettien.
Pour interpréter ces "quatre aiguilles et la laine
à tricoter ensemble", selon les propres mots de
l'auteur, qui s'embarquent pour un voyage sans retour placé
dès le départ sous le signe de la dualité
Eros-Thanatos aussi bien dans son acception biologique que sexuelle,
Antoine Caubet qui se distribue dans le rôle d'un Almaric
à la stature de baroudeur qu'il incarne avec justesse,
a fait appel à des comédiens aguerris qui connaissent
leur métier et avec lesquels il a l'habitude de travailler
: Cécile Cholet, en contre
emploi, est une Ysé rageuse, Pierre
Baux un excellent Mésa et Victor
De Oliveira le mari.
Une proposition à découvrir donc pour un autre
regard sur une des oeuvres emblématiques de Claudel. |