Réalisé par Otto Preminger. Etats Unis. Comédie dramatique. Durée : 1h35. (Sortie initiale en 5 janvier 1949 - nouvelle sortie le 5 mai 2010). Avec Dana Andrews, Alice Faye, Linda Darnell, Charles Bickford et John Carradine.

Si l’on veut avoir un aperçu de ce qu’était l’âge d’or hollywoodien, la reprise sur grand écran de "Crime passionnel" ("Fallen Angel") tombe à pic.

Tourné à l’époque "heureuse" de l’après-guerre où Hollywood ne fantasme pas encore sur le péril communiste et ne craint pas la concurrence du petit écran, le film d’Otto Preminger est peut-être le "film noir" par excellence.

On y suit un héros portant sa poisse au fond de l’Amérique profonde, coincé entre la blonde et la brune, entre la réussite sociale et la satisfaction sexuelle. On y découvre des personnages bien plus complexes que les stéréotypes qui les définissent. On y vit l’éternel affrontement d’Eros et Thanatos, cette fois sous la forme du terrible destin d’une serveuse sexy.

Pas la peine d’entrer dans les détails : le récit va vite et à l’essentiel. Un regard de Dana Andrews sur Linda Darnell en train de servir un café en dit plus long qu’une longue scène torride.

Ici, Dana Andrews en tête, Preminger reconstitue l’équipe gagnante de son chef d’œuvre, "Laura", tourné l’année précédente avec Gene Tierney. Pas besoin d’être un cinéphile diplômé pour comprendre que le noir et blanc conçu par le directeur de la photographie Joseph LaShelle est une merveille, et que la musique de David Raskin est en soi une œuvre de grande qualité.

Pas besoin non plus d’être expert en direction d’acteurs pour s’apercevoir que Preminger est un faiseur de stars. Après Gene Tierney, et avant Jean Seberg, c’est Linda Darnell qu’il façonne devant nos yeux avant d’achever son modelage en la magnifiant dans ce monument filmique de sensualité romanesque qu’est "Ambre".

Mais, pour l’heure, c’est "Crime passionnel" qu’il faut aller voir en salles, non pas avec le respect esthétique dû à un classique annoncé, mais, si possible, avec l’œil du spectateur du samedi soir de jadis, qui venait, de confiance, passer un bon moment au cinéma.