Thomas
Le Douarec, metteur en scène très doué
de la nouvelle génération, a été l'adaptateur
et le metteur en scène des deux spectacles des Monty Python
Flying Circus qui ont cartonné la saison dernière
en proposant aux spectateurs parisiens une version française
de grande qualité des sketches des fameux Monty Python anglo-saxons.
Acteur, metteur en scène, auteur, directeur de la Compagnie
Thomas Le Douarec, il a un emploi du temps bien rempli et a néanmoins
accepté de nous rencontrer pour une interview
Vous avez monté les Monty Python Flying Circus.
Que vous a apporté ce spectacle au plan artistique ainsi
qu'en termes de carrière personnelle?
Thomas Le Douarec : Au niveau de ma carrière,
c'est encore un peu récent. Mais il n'y a aucune retombée
pour le moment. J'avais déjà beaucoup travaillé
auparavant et j'ai monté de spectacles qui ont eu un succès
beaucoup plus important même si les Monty Python étaient
un beau succès parisien. Mais ce n'était qu’un
succès parisien. Et le spectacle a été assez
marginalisé par la profession et n'a pas été
assez soutenu par les médias. Donc pas de retombée
ni médiatique ni professionnelle. Ce qui m'a fait plaisir
dans ce projet c'est de renouer avec un travail de troupe car j'ai
retrouvé mes vieux compères de la bande, de la Compagnie
Le Douarec et du cours Florent.
Le producteur Rémy Renoux a eu l'idée
de me proposer ce projet car nous avions déjà travaillé
ensemble sur "Le dindon" que j'avais monté au théâtre
Tristan Bernard, une adaptation assez personnelle du dindon de Feydeau,
avec Charles Ardillon, Grégoire Bonnet et Marie Parouty,
qui étaient à l'origine de la compagnie constituée
par une bande de joyeux lurons et il s’était occupé
de la tournée. Il nous a cotoyé et a adoré
le spectacle et l'expérience du dindon. Quand il a eu l'idée
du spectacle des Monty Python, qui était avant tout un projet
de producteur, il a immédiatement pensé à notre
petite bande. Or, cela faisait déjà un long moment
que nous ne travaillions plus ensemble pour des raisons diverses
et variées et nous avions tous envie de nous retrouver dans
un projet commun. Nous avons reconstitué notre petite équipe.
Par ailleurs j'avais travaillé avec Yvan Garouel pour "Vol
au dessus d'un nid de coucou" et avec Lucien Jean-Baptiste.
En revanche, c'était la première fois pour Eric Savin
et Philippe Vieux.
Ce qui était merveilleux était de
se retrouver ensemble et de renouer avec le succès en faisant
un spectacle populaire, retrouver l'atmosphère du dindon.
Même si avec le temps je regrette, enfin je ne regrette rien,
mais je pense que le spectacle aurait encore mieux fonctionner si
on avait davantage axé l'accent sur la promotion autour de
cette bande qui apportait sa part à l'univers des Monty Python.
C'est très prétentieux mais le premier Monty Python
était plus classique, plus fidèle au Monty Python
anglo-saxon par rapport au deuxième où nous étions
plus libérés et nous avons fait un spectacle plus
personnel.
L'autre élément important, qui constitue
un grand souvenir, est d'avoir rencontré des gens aussi simples
que Terry Gilliam qui est venu voir deux fois le spectacle. Le premier
soir il est tombé en larmes dans mes bras à la fin
de la représentation et c'était extrêmement
émouvant. Nous avons passé une nuit blanche ensemble
à faire la fête. C'est un très beau souvenir.
Ça fait partie des choses qui me resteront.
Autre fait mémorable, la création au
Palais des Glaces qui était extraordinaire car on ne savait
pas où on allait ni si le public nous suivrait. Il faut dire
qu'au début j'étais très sceptique car adapter
au théâtre des sketches télévisuels me
paraissait absurde et en tout cas c'était une gageure. De
plus, c'est un humour très anglais, qui a vieilli, il est
un peu désuet, et qui a été tellement copié
depuis les Nuls jusqu'au Robin des Bois. Donc l'adaptation à
notre humour et l'adapter au théâtre ne me semblaient
pas simple. J'y suis allé en traînant un peu la patte
et la motivation essentielle était de retrouver les anciens
de la compagnie. Et puis petit à petit, nous avons pris confiance
en nous et nous nous sommes appropriés les sketches. Enfin,
pas tous. Le producteur tenait à certains sketches mais qui
ne fonctionnaient pas. Ce qui a été magique, ce qui
peut nous honorer, est d'avoir pu réconcilier certains spectateurs
avec les Monty Python u leur faire découvrir leur humour
qui a priori ne les faisait pas rire.
Autre expérience extraordinaire pour moi,
l'adaptation de ces sketches. Pour le Monty Python 1, une grande
partie de l'adaptation avait été faite par deux suisses
Martine Jeanneret et Lova Golovtchiner . Ils avaient réussi,
avant nous, à monter le spectacle mais sans en avoir les
droits. Ce spectacle a très bien marché, il y a longtemps
déjà, et ils l'ont joué à Paris où,
au bout d'un mois, ils ont dû arrêter suite à
l'interdiction des Monty Python. Rémy Renoux n'a obtenu les
droits que très tardivement, un mois avant le début
du spectacle. Il existait donc déjà une matière
et Golovtchiner et Jeanneret nous ont autorisé à utiliser
leur travail. Comme nous disposions de peu de temps entre le feu
vert des Monty et le début du spectacle, cet existant nous
a permis de démarrer et nous avions donc du temps pour adapter
d'autres sketches. En revanche, pour le 2, j'ai assuré l'adaptation
de tous les sketches et là j'ai vraiment pris mon pied et
de plus cela m'a permis de prendre confiance en moi pour l'écriture.
Vous avez déjà une carte de visite
impressionnante . Vous êtes acteur, auteur, metteur en scène,
directeur de compagnie, vous avez également enseigné
l'art dramatique. D'où viennent cette passion du théâtre
et la volonté d'en faire non de manière passive, en
vous limitant à être acteur, mais également
en étant à l'origine de projets?
Thomas Le Douarec : Tout a une seule origine. Au début,
je suis acteur. J'ai commencé le théâtre dans
un atelier au lycée. C'était une passion mais je n'avais
jamais envisagé d'en faire un métier. Après
le bac, je suis monté de province à Paris pour faire
une préparation à Sciences Po et le même été
j'ai fait un stage à l'école Florent où je
rencontre Francis Huster qui me propose de rentrer directement en
seconde année. Je me suis dit : "Ça me paraît
facile le théâtre, alors pourquoi pas ?" Au lycée
j'étais très apprécié par mes camarades
et j'avais des facilités, j'avais toujours les premiers rôles
dans l'atelier théâtre. Donc je fonce et malheureusement
je me suis fait avoir parce que je me suis pris au jeu. Venant de
ma province, auréolé de mes succès, je suis
vite retombé face à la réalité car c'était
très dur.
Les 8 premiers mois à l'Ecole Florent ont été
épouvantables. Ça ne marchait pas, je ne trouvais
pas ma place. C'était une belle chute. Et puis j'ai commencé
à faire des castings. Et là c'était horrible
! Je n'ai pas supporté ce système où on est
dépendant du bon plaisir, du bon vouloir de petits assistants
qui nous traitaient comme de la merde. Mon orgueil en a pris un
coup. J'ai pris sur moi et je me suis dit :"Plus jamais ça
! "
Je ne voulais plus subir cela et c'est par orgueil
que j'ai réagi en créant ma propre compagnie et pour
être totalement autonome. Pour survivre économiquement
j'ai commencé à donner des cours car j'en avais marre
des petits boulots. J'ai travaillé pendant 4 ans au Théâtre
de la Ville où j'étais contrôleur et je déchirais
les billets. C'était bien parce que cela me permettait d'acquérir
une véritable culture théâtrale en voyant les
mêmes spectacles plusieurs fois. C'était très
formateur quant à l'approfondissement de la mise en scène
et l'évolution du jeu de l'acteur sur la durée. Ainsi
j'ai ouvert mon petit cours de théâtre qui m'a permis
de vivre jusqu'au moment où la mise en scène m'a permis
de vivre.
Mon premier succès populaire et commercial
"Le dindon" m'a permis de gagner suffisamment d'argent
pour tenter ma chance dans ce métier et j'ai arrêté
l'enseignement. J'ai donc gardé ma troupe et je me suis orienté
vers la mise en scène. L'origine est donc la fuite des contraintes
du comédien. Je suis admiratif pour la plupart des acteurs
mais moi je ne pouvais pas me vendre ainsi. C'est très violent
de passer une audition et de ne pas être choisi, désiré
par quelqu'un.
La mise en scène s'est rajoutée ensuite?
Thomas Le Douarec : Oui et heureusement il n'y a pas
d'école pour ça.
Il y a l'assistanat..
Thomas Le Douarec : Oui, mais je n'ai jamais assisté
personne. J'ai appris sur le tas. C'était un accident de
parcours puisqu'en tant qu'acteur je n'avais pas de proposition
intéressante. Ma chance je la dois au système de l'école
Florent car pendant la 2ème année on nous autorise
à faire des ateliers. Les élèves montent leur
propre spectacle. Personne ne voulait de moi comme acteur car je
n'étais pas star de cours. On m'a quand même laissé
une chance en me donnant un rôle dans un atelier qui montait
deux petites pièces de Sacha Guitry et j'en étais
ravi. La plupart travaillait sur plusieurs ateliers mais moi je
n'avais que celui-là. Le metteur en scène David Caris,
qui est devenu un ami, qui avait monté le projet a abandonné
15 jours avant la première.
Nous étions complètement effondrés
car nous avions énormément travaillé. Et je
me suis lancé. J'avais toujours eu envie de faire de la mise
en scène sans en avoir le courage. Donc j'ai proposé
de reprendre la mise ne scène. Il sont accepté et
ce qui s'est passé est assez surprenant car ça a été
une révélation pour moi, tout d'un coup on rencontre
son destin. J'avais trouvé ma place et les gens m'ont suivi
aveuglément dans mon délire car j'ai réécris
Guitry. Le spectacle s'est appelé "Maledictis".
Le spectacle a eu tellement de succès auprès du cours
Florent que j'ai obtenu des Jacques, sorte de Molière interne
à l'école : le Jacques de la meilleure mise en scène,
le Jacques de la meilleure adaptation et celui du meilleur spectacle
et meilleur acteur pour un second rôle. Tout s'est éclairci
pour moi : je suis rentré dans la classe libre et l'école
Florent a créé pour moi et Michael Cohen, un de mes
amis et élèves de la même classe, une classe
libre de mise en scène qui nous permettait de créer
des spectacles avec tous les élèves du cours.
Ensuite j'ai monté "Dommage qu'elle
soit une putain" de John Ford, un contemporain de Shakespeare.
François Florent m'a donné énormément
de moyens ; nous étions 35 à travailler sur ce projet.
Cela m'a permis de créer ma compagnie et de quitter l'école
avec ce spectacle qui nous a permis de faire le festival Avignon.
C'était du théâtre rock que nous avons ensuite
joué dans plusieurs salles à Paris. Nous l'avons aussi
créé lors de l'ouverture du théâtre du
Trianon. Ensuite j'ai écrit un spectacle qui s'appelait "Sur
le dos d'un éléphant" puis "Les sorcières
de Salem" qui a vraiment fait connaître la compagnie.
Ensuite sont venus "Le Cid", "Le dindon", "Le
portrait de Dorian Gray", "Du vent dans les branches de
sassafras" et plein d'autres ont suivi.
Mes trois premiers spectacles ont été
les plus importants, ceux où on dit tout ce que l'on a à
dire. Ensuite, on passe son temps à se répéter.
Et quand on se répète on découvre autre chose
: on découvre l'autre. On a subitement tout à apprendre
de l'autre ce qui est un signe de maturité. On ne va plus
forcément chercher en soi, car au départ on a des
choses à sortir de soi et j'étais donc très
dirigiste. Quand, comme j'ai eu la chance de la faire, on peut s'exprimer
pleinement, on se nourrit alors des auteurs et des acteurs. Le metteur
en scène reçoit alors cette nourriture de toute part
et essaie de transmettre au spectateur.
Vous avez travaillé avec Jean Luc Jeener,
auteur, metteur en scène et directeur du Théâtre
du Nord-Ouest dans les caprices de Marianne. Que vous a-t-il apporté
et que pensez-vous de sa conception du théâtre de l'incarnation?
Par ailleurs nous avons également rencontrés les fondateurs
du Théâtre Vivant dont Yvan Garouel. Où vous
situez-vous?
Thomas Le Douarec : Nous formons une famille théâtrale.
Ce n'est pas un hasard si j'ai travaillé avec Yvan Garouel
ou Jean Luc Jeener. J'ai rencontré ce dernier qui était
venu voir mes spectacles en tant que critique. Il a été
un des premiers à soutenir mon travail et ma compagnie et
a fait d'excellents critiques. Il ne m'a pas toujours encensé
et il a été terrible parfois. Mais il a fait une très
bonne critique pour "Les sorcières de Salem" où
je faisais un travail d'incarnation, ce qui l'avait touché.
Le théâtre de l'incarnation part du principe que le
théâtre est un miroir pour l'homme et que nous, acteurs,
sommes des pionniers du sentiment et que nous allons donné
chair à nos angoisses, à nos sentiments, à
notre part d'ombre et de ténèbres. Donner vie à
tout cela et montrer aux autres hommes, aux spectateurs comment
vivre pleinement la vie. Car nous sommes des vivant !
C'est pour cela qu'il y a le théâtre
vivant aussi avec notamment Carlotta Clerici et Yvan Garouel. Même
si moi je n'ai rien à voir avec leur forme de théâtre
mais dans le fond, on fait le même théâtre. Alors
après il y a la forme et là c'est très différent.
Moi dans tous mes spectacles il y a la fête, j'aime la fête
malgré tout, ce qu'il y a moins chez Jean Luc (sourire).
Moi j'ai besoin de cette folie, c'est cela qui me différencie
d'eux, c'est ce besoin d'aller le plus possible dans une folie.
Ce que j'aime dans le théâtre c'est le surpassement
de soi, et Jean Luc sera peut être d'accord avec moi, même
si il ne le dit pas forcément. Je pense que l'homme est fait
pour se surpasser. Et le théâtre nous offre la possibilité
de dépasser nos limites, pour moi c'est comme une piste de
décollage. Nous sommes des avions et c'est tellement difficile
de quitter le sol, d'être touché par la grâce
c'est tellement rare d'arriver à se sortir, de décoller
de la réalité du quotidien que j'ai toujours espéré
que le théâtre m'offre cette possibilité de
décoller en fait.
Et même en tant qu'acteur, j'ai eu, dans
certains rôles, dans certaines pièces le sentiments
de flotter sur un plateau et tout d'un coup d’être touché
par la grâce. J'ai été touché par la
grâce 2 ou 3 fois dans ma vie d'acteur et 2 ou 3 fois aussi
dans ma vie de metteur en scène. Tout à coup le spectacle
que j'avais devant les yeux, que j'avais mis en scène, qui
était ma vision…J'ai vu tout d'un coup ma vision me
dépasser. C'est comme quand on rêve d'un spectacle
et quand on le présente aux spectateurs il est non seulement
comme on l'a rêvé mais en plus il nous apprend quelque
chose, il nous apporte… Et ce sont ces très courts
moments qui me motiveront toute ma vie.
La Compagnie du Théâtre Vivant a
une vision politique du théâtre et se disent investi
d'une mission.
Thomas Le Douarec : Oui c'est vrai, et je les aime
beaucoup, je les admire en fait. Moi je dois vous avouer que je
ne suis ni militant ni politique pour 2 sous, et je ne sais pas
si je le regrette ou si je me déçois. Je me déçois
sans doute parce que je suis comme je suis et je vais pas me changer
pour autant. Je suis avant tout quelqu'un de léger malgré
une certaine émotion, dans mes spectacles il y a toujours
une part d'émotion et j'ai fait des spectacles émouvants,
j'en suis tout à fait capable mais en fait je n'arrive pas
à me prendre au sérieux même si j'y arrive un
peu en vous répondant, en théorisant un peu mon théâtre.
Mais je ne suis pas suffisamment prétentieux
pour penser que mon théâtre a un sens ou que je suis
moi même en train de réaliser une œuvre. Je doute
en permanence, je cherche en permanence et ce qui me fascine chez
Yvan Garouel ou chez Jean Luc Jeener et chez les gens du théâtre
vivant (ndlr : Yvan Garouel, Carlotta Clérici, Anne
Coutureau, Mitch Hooper) c'est qu'ils sont
persuadés de détenir quelque chose. Et moi je ne pense
détenir aucune vérité, je n'ai aucune assurance
et aucune conviction pour savoir si ce que je fais est bien ou pas
bien. Je pense que je fais cela parce que c'est ce que je sais faire
et c'est pourquoi j'ai été fait. Je sais donner du.
plaisir aux gens. J'arrive à les faire rire et j'arrive à
les faire pleurer et ça me demande beaucoup d'énergie
pour le faire et c'est jamais simple, monter un spectacle demande
une énergie phénoménale, j'ai cette énergie
là et c'est déjà énorme !
Quelle est votre actualité, "L'amour
à 3" s'interrompant jusqu'à septembre ?
Thomas Le Douarec : Oui les représentations
reprendront avec les mêmes acteurs du 21 septembre 2004 au
2 janvier 2005, tout les soirs du mardi au dimanche à 20
heures et les dimanche à 17 heures.
D’ici là quels sont vos projets ?
Thomas Le Douarec : Avec ma compagnie je crée
un ballet flamenco en Avignon et je le reprendrais la saison prochaine
au théâtre Trévise. Avec 4 magnifiques danseuses
qui vont bouleverser l'âme du flamenco car c'est un spectacle
très original, très puissant, très fort et
qui une fois de plus me différencie de mes compères.
Je touche à tout puisque récemment j'ai aussi monté
un concert avec Marianne James à la Cigale dont j'ai assuré
la scénographie et la mise en lumière et puis avec
Marianne cela fait un an et demi que l'on écrit un spectacle
tous les deux qui est dans la droite lignée de l'Ultima récital,
un spectacle musical complètement fou que je me suis remis
à écrire récemment, car je n'avais pas écrit
depuis "Sur le dos d'un éléphant" car je
ne m'en sentais pas capable.
En fait les Monty Python m'ont redonné confiance
et sans cela je n'aurais sans doute pas recommencé à
écrire avec Marianne James. Marianne et moi avons un univers
assez semblable et on s'éclate bien. La pièce, qui
s'appellera "Marianne 2037", est quasiment terminée
et on espère la monter en septembre 2005. D'autre part on
reprendra les 7, 8 et 9 octobre 2004 le concert avec Marianne James
et puis je prépare aussi une opérette pour la saison
2005/2006. Je prépare aussi une pièce pour le théâtre
Marigny mais je peux rien en dire encore. Et ma compagnie présente
un spectacle qui s'appelle "Je ne veux pas être seul"
qui s'est joué au Sudden Théâtre mis en scène
par un jeune metteur en scène qui s'appelle Jean Christophe
Emo et dans laquelle joue mon frère Stéfan. Cela va
être repris à partir du 1er juin 2004 au théâtre
Trévise.
La Compagnie Thomas Le Douarec existe donc toujours
?
Thomas Le Douarec : Toujours et c'est elle qui
produit "Je veux pas être seul", "L’amour
à 3",qui produira le spectacle de flamenco et sans aucune
subvention puisque je n'ai jamais eu de subventions depuis qu'elle
existe, c'est à dire depuis 1991. Ce n'est pas faute d'en
avoir demandé mais je suis considéré comme
un metteur en scène commercial donc….
Vous réinvestissez donc l'argent de vos
précédents spectacles ?
Thomas Le Douarec : Exactement et quand j'arrive
à un succès comme celui de "Arrête de pleurer
Pénélope" cela me permet de vivre ce qui fait
que tout l'argent que je peux gagner ailleurs je le réinvestis
dans d'autres spectacles. Je suis entièrement privé
et je ne m'en plains pas. J'ai pas à me plaindre.
Et qu'en est il des projets londoniens pour les
Monty Python ?
Thomas Le Douarec : En fait notre producteur a
du jeté l'éponge car il a fait faillite. Donc cela
compromet tous ces projets. Mais MG Production a repris la production
du spectacle et donc ça va nous permettre de faire ce Best
of en Avignon avec Yvan Garouel, Marie Parouty, peut être
Grégoire Bonnet mais il joue actuellement dans Décalage
Lombaire à la Comédie de paris. Lui est convaincu
qu'il va pouvoir le faire. Charles ne pourra pas le faire car il
joue la prochaine création du Splendid et Eric Savin le fera
à mon avis et Philippe Vieux reviendra.
Une reprise du spectacle est-elle envisagée
?
Thomas Le Douarec : Non, MG prod souhaiterait reprendre
le spectacle à Paris en septembre mais je ne pousse pas à
la roue, le spectacle à bien vécu déjà
et puis j'avais une super équipe. Ce qu'il faudrait c'est
avoir suffisamment de moyens mais l'équipe est épuisée,
usée. On l'a joué 2 ans et demi ce spectacle et on
l'a monté en 1 mois et demi pour le premier, 1 mois pour
le second, c'était scandaleux et on s'est retrouvé
dans des situations telles que l'on est usé.
Pour revenir aux futurs spectacles, jouerez vous
dans certains ou bien privilégiez vous la mise en scène
?
Thomas Le Douarec : J'ai toujours privilégié
la mise en scène mais ce n'est pas un choix, c'est parce
que cela a toujours été ma priorité et puis
je ne suis pas connu comme comédien. Et puis en France, les
metteurs en scène sollicitent rarement d'autres metteurs
en scène.
C'est difficile de faire l'acteur pour d'autres
metteurs en scène ?
Thomas Le Douarec : Non, ça ne me pose pas
de problème, j'ai d'ailleurs mis en scène moi aussi
des metteurs en scène comme Yvan Garouel et c'est un bonheur.
D'ailleurs je pense que c'est la même chose pour lui. J'ai
aussi joué sous la direction de Jean Luc Jeener dans "Les
caprices de Marianne" et cela ne me dérange pas du tout.
C'est un bonheur de faire l'acteur, mais de façon générale
les metteurs en scène ont peur de travailler avec d'autres
metteurs en scène je crois. Ils pensent justement qu'ils
peuvent avoir un avis sur leur travail etc.. ce qui est faux car
il n'y a pas plus souple qu'un metteur en scène car on veut
surtout pas faire chier le metteur en scène parce que nous
même on est passé par là.
Mais peu de metteurs en scène m'ont sollicité,
il y a eu Jacques Descombes et Jean Luc Jeener c'est tout . Et moi
je n'aime pas trop me mettre en scène moi même, je
commence un petit peu mais ce n'est pas agréable. Avant je
détestais ça, maintenant, avec l'expérience
cela m'est un peu plus facile. Et puis avec la vidéo maintenant
ça aide, on peut regarder, voir les problèmes.
Vous avez monté plusieurs fois René
de Obaldia. Pourquoi ?
Thomas Le Douarec : C'est un ami. En fait la pièce
que je voulais absolument monter de lui et qui m'a permis de le
rencontrer c'était "Du vent dans les branches de sassafras"
que j'ai monté au Ranelagh et au Petit théâtre
de Paris par la suite avec notamment Grégoire Bonnet, Charles
Ardillon, Marie Parouty aussi …Enfin donc on s'est rencontré
à cette occasion et on est devenu ami et je lui ai demandé
de se remettre à l'écriture car cela faisait longtemps
qu'il n'écrivait plus pour le théâtre et il
m'a fait l'honneur d'écrire "Obaldiableries" qui
est une pièce qu'il a donc écrite pour moi et j'en
ai été très flatté.
Et puis ensuite cela m'énervait qu'il ne
soit plus du tout monté et par amitié pour lui j'ai
monté à nouveau" L'amour à 3". Parce
que je suis un fidèle moi, ce n'est pas un hasard si je travaille
un peu toujours avec les mêmes personnes. J'aime beaucoup
ce monsieur. J'aime beaucoup les vieux monsieurs. C'est un dinosaure
et ils vont disparaître et avec eux disparaitra une partie
de notre culture. On ne réalise pas à quel point le
monde a changé. Et il a changé à une telle
vitesse que ces gens là sont les derniers défenseurs
d'une certaine forme de culture, d'une certaine forme de théâtre,
d'une langue. Ce n'est pas un hasard s’il est à l'Académie
française aujourd'hui Obadia. J'ai beaucoup d'admiration
pour lui et c'est dommage qu'il ne soit plus à la mode, qu'il
ne soit plus monté.
Et Dubillard serait dans le même cas s’il
n'y avait pas un farfelu comme Jean Michel Ribes pour le monter
et décider de faire une saison Dubillard. Et j'admire Ribes
pour ça. Il emmerde tout le monde. Il dit Dubillard est pas
à la mode, mais moi j'ai envie de le monter, j'ai la chance
d'être directeur d'un théâtre comme le Rond point
et je vous emmerde et je monte Dubillard et j'exige que tous ceux
qui veulent jouer au Rond point cette saison monte Dubillard. Et
il a raison et si j'avais la possibilité de le faire avec
Obaldia je le ferais.
Vous parliez de la langue, est ce qu'il y a des
auteurs contemporains que vous auriez envie de monter ?
Thomas Le Douarec : Tous les noms que je pourrais
vous dire et que les gens connaissent sont énormément
montés donc il n'ont pas besoin de moi. Ils sont toujours
montés par les mêmes metteurs en scène donc
je ne vais pas commencer à marcher sur leur plates bandes.
J'aimerais faire découvrir de nouveaux auteurs par contre.
Vous recevez des textes?
Thomas Le Douarec : Enormément. Et notamment
par les gens du métier car si je suis connu ce n'est pas
vraiment par le grand public, le théâtre reste quand
même quelque chose d'assez artisanal. Je reçois donc
pas mal et je lis beaucoup mais il y a peu de choses intéressantes.
Malgré ce que l'on peut dire et ce que l'on peut croire,
je ne crois pas qu'il y ai de génie méconnu. Quand
quelqu'un a du talent on s'en aperçoit vite. Mais il y a
des choses intéressantes, j'ai monté un auteur qui
s'appelle Jean Pierre About, une pièce qui s'appelle "Le
manège du pouvoir" qui s'est joué au Théâtre
14 et que j'ai rencontré comme ça, en lisant des pièces.
Je vais monter sa prochaine pièce aussi qui s'appelle "Séparation
dans un jardin".
J'ai récemment déjeuner avec un auteur
dont j'ai lu 2 pièces qui s'appelle Emmanuel Rodie qui est
un auteur brillant, à découvrir.
Maintenant à savoir si je vais le monter, si j'aurais le
courage, si j'aurais le temps… je n'ai que 2 bras et 24 heures
dans la journée et c'est difficile de créer un auteur
contemporain.
Et si vous aviez toute latitude pour monter un
auteur, un spectacle de vos rêves, ce serait quoi ?
Thomas Le Douarec : J'aimerais bien monter "le
Roi Lear" mais dans des conditions exceptionnelles avec l'acteur
de mes rêves, vraiment capable de jouer le Roi Lear. Je l'avais
proposé à Michel Serrault et il n'a pas voulu. Je
l'ai proposé à Jean Rochefort, Michel Bouquet, Michel
Aumont. Tous ceux qui seraient capables de le jouer. Et puis j'aimerais
le proposer à un acteur que j'aime beaucoup et qui serait
aussi capable de le jouer, c'est Claude Rich. Serrault aurait vraiment
été un formidable Roi Lear. Mais c'est sûr que
pour monter ce genre de pièce il faut un acteur connu. Shakespeare
n'est pas apprécié par les français. C'est
difficile mais j'adorerais monter une pièce comme cela.
J'ai longtemps voulu monter" Andromaque"
de Racine mais personne ne viendra le voir, ça emmerde tout
le monde Racine. J'ai des envies comme ça mais ça
emmerde tout le monde alors…et je n’ai pas la prétention
de vouloir emmerder tout le monde. Ceci dit j'ai monté le
Cid et c'est chiant à mourir quand c'est monté d'une
façon classique. Moi j'ai voulu le monter à ma manière
pour montrer aux gens que cela pouvait être passionnant et
Andromaque j'ai la même prétention, de le rendre accessible
pour un plus grand nombre …mais il y a du travail.
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