Je ne doute pas que l’histoire de la Normandie n’ait rien d’ordinaire, mais d’ici à ce qu’elle soit extraordinaire, il n’y a qu’un pas. C’est ce que nous montre Jacqueline Monsigny dans L’extraordinaire histoire de la Normandie.
Pour la petite histoire, cette femme a pris la plume pour la première fois lors d’un chômage forcé, pendant certains évènements de mai 68. Bien lui en a pris. D’une écriture légère et fluide, Jacqueline Monsigny retrace le destin incroyable de la terre de ses ancêtres, qui a vu naître des personnages ayant grandi la France (au sens propre comme au figuré). Des premiers Homo Sapiens aux "Tommies" américains, en passant par Rollon, l’effrayant Viking venu du Nord, Guillaume le conquérant de l’île d’Angleterre, Jeanne d’Arc, les Louis constructeurs du port de Cherbourg, François 1er, Charlotte Corday et tous les héros anonymes sacrifiés sur l’autel de la liberté pour leurs idées et leur "pays".
Il ne manque rien, ni des celtes, ni des gaulois et romains, ni des Vikings, ni des conquérants de l’Angleterre, ni des guerriers de Cent Ans, ni des Chouans de la Révolution, ni des débarqués, ni des résistants. Ah si, peut-être un petit paragraphe pour Stone et Charden.
Tout y est, même de quoi inspirer une fiction inédite, histoire de varier d’une énième reconstitution de la Grande Guerre, ou d’un énième portrait de Gaulliste ou d’un Pétainiste Hitlérien… Il y a eu des grands bonhommes avant aussi. Ceux-là mêmes qui nous donnent de l’urticaire parce qu’ils sont associés à des dates que nous ne retenons pas, car entrées de forces dans nos têtes de bêtes à examen par des professeurs pas toujours ludiques.
Et justement, Jacqueline Monsigny balaie le fastidieux en truffant son récit d’anecdotes et d’exemples concrets. Entre autres, quelle est la différence entre les corsaires de Louis XIV et les pirates ? Sa réponse : "[c’est un peu comme si Sarkozy envoyait son meilleur corsaire Desjoyaux piquer les robes et les bijoux d’Elisabeth II pour les filer à Carla]".
Nul besoin d’avoir des connaissances poussées en histoire pour suivre le récit, même s’il est obligatoirement farci de noms de personnages (avec des Louis-Charles, des Charles-Louis, des Louis et des Henri numérotés dans toutes les époques et j’en passe). L’auteur se charge de fournir les repères de base nécessaires à la compréhension du contexte. Et si un évènement ou un personnage vous inspire un peu plus (la mystérieuse vie d’Aliénor d’Aquitaine, la victoire de Bouvines, Claude Monet…), elle vous propose d’en lire l’histoire intégrale, références d’auteurs de son acabit à l’appui.
Personnellement, j’émettrai juste quelques doutes vis-à-vis de la "qualité" de la gastronomie normande que nous vante l’auteure, surtout face au cervelas, à l’andouillette, au boudin, aux tripes, aux huîtres, aux pieds de porc, aux harengs et maquereaux… J’arriverai pour le dessert aux pommes et à la brioche au beurre salé arrosés de cidre, voire même un peu avant, pour le fromage. Question de palais.
L’éditeur avait raison, voilà "l’histoire contée de façon palpitante d’un pays charnière, aux peuples aussi intrépides que d’une incroyable constance". |