Gemma Ray est visiblement une personne pleine d'humour. Non contente de faire un album chargé de quelques reprises osées et d'un fort bon calibre, la belle anglaise pousse le vice jusqu'à détourner le titre de son album mettant à la fois en scène son patronyme et faisant de son album lui même une reprise. It's a Shame about Gemma Ray étant bien évidemment un hommage au It's a Shame about Ray des Lemonheads.
Le précédent album de Gemma Ray était à multiple facette par les différentes voi(e/x)s qu'elle exploitait, allant sans aucune difficulté de la pop à la soul. Cette fois ci, la belle dame a choisi plutôt de diversifier le registre des reprises dans lequel elle pioche mais en les conformant toutes à un style très américain, entre blues et soul.
Mais le disque n'est pas pour autant monotone ou linéaire et s'il a été enregistré aux Etats-Unis avec une relative économie de moyen sur la production et la réalisation (ce qui en rien ne signifie de mauvaise qualité mais au contraire direct et immédiatement touchant), c'est certainement pour mieux s'imprégner de l'esprit de quelques unes de ceux et celles qui ont fait le rock que l'on aime.
Ainsi on trouvera parmi les artistes repris des gens aussi différents que Gershwin ou Sonic Youth, Ella Fitzgerald, Gallon Drunk ou Mudhoney... dans des versions totalement revisitées, comme ce melange de "Rosemary baby" avec "Drunken Butterfly" de Sonic Youth ou "Ghost on the highway" de Gun Club tout a fait remarquables.
Parallèlement aux reprises en elles-mêmes, ce qui fait la qualité de cet album est la façon dont les titres sont interprétés, Gemma Ray prenant un malin plaisir à offrir des interprétations qui ne cherchent surtout pas à être fidèles aux titres d'origine mais offrant au contraire la lecture toute personnelle de la jeune britannique.
Oscillant entre la sensualité romantique de Shivaree ou de Lisa Germano et l'érotisme des Kills ("Touch me I'm sick"), Gemma Ray aidée par le savoir-faire de Matt Verta-Ray à la production (celui-là même qui officie auprès de Jon Spencer dans Heavy Trash) réussit joliment l'exercice du disque de reprises et se démarque de ses petites collègues britanniques, Duffy en tête, comme autre chose qu'une énième chanteuse de soul au kilomètre, en nous offrant cette fenêtre musicale sur son univers, en attendant son prochain album, cette fois ci rempli de compositions originales.
Il n'y a plus qu'à souhaiter qu'il soit à la hauteur de la belle démonstration faite sur ce disque, loin d'être honteux au final. Ah, l'humour britannique... |