"- Comment tu t’appelles ? - Katerine…"
Evidemment je n’avais jamais convolé en vélib, la nuit sous ecstasy, à Paris avec Katerine, je ne savais donc pas à quoi m’attendre ce soir au Fil à Saint-Etienne. Qui est le public de Philippe Katerine ? De jeunes fous décérébrés, de vieux poètes en quête d’amour, de durs rockers en pause sensible… ? Serions-nous cent, serions-nous mille ? Finalement, c’est un peu tout ça à la fois, de vieux costards croisent de jeunes sourires, le public est un doux mélange de poètes décérébrés en quête de folie pour l’occasion. Nous sommes bien plus de cent et bien moins de mille. L’écran se lève, c’est parti ! Et "Bla bla bla"…
"- Comment tu t’appelles ? – Katerine."
Devant l’écran, trois musiciens – guitare / basse / batterie – s’exécutent ; derrière l’écran deux créatures se contorsionnent pour mieux entourer Philippe Katerine, qui de son côté fait dans le vieux jogging vintage. Katerine déroule sûrement les trois premiers morceaux en devant de scène, pour planter consciencieusement le décor de la soirée. Avec prudence et délectation il nous honore d’un mélodieux "bonjour je suis la reine d’Angleterre et je vous chie à la raie" et égraine un alphabet parfais. Surpris, encore entre deux eaux, nous entrons sans nous en rendre compte, pas à pas, dans l’univers de Philipe Katerine. Les chansons sont très courtes, mais les mélodies sont des invitations à chaque fois assez puissantes pour nous porter. Le sens n’est pas à chercher forcément dans l’unité-chanson, sous peine de se noyer dans sa propre tempête de crane, mais l’ensemble proposé dessine une cohérence surprenante qui prend forme au fur et à mesure que le concert avance.
"- Comment tu t’appelles ? – Katerine !"
La chaleur monte, les musiciens ne relâchent rien, Katerine se déshabille un peu et les filles se tortillent davantage. De leur voix elles assurent les chœurs, de leur corps les cœurs. Elles attendent des bisous, des bisous des bisous. La rotondité lunaire de leur postérieur devient d’avantageuses percussions pour "J’aime tes fesses". Une pluie de bananes, lancée du public, offre un stock conséquent à l’artiste pour vivre une retraite nu sur la plage sans manquer.
Katerine évolue maintenant en caleçon, léger : "Je me sens bien". Nous sommes tous comme des "sacs en plastique qui volent au vent".
Du haut de notre balade onirique nous croisons Johnny, des mors-vivants, des téléphones géants, et au milieu de ces touches abstraites, des taches de concret qui nous rappellent que le monde réel n’est jamais bien loin : "Marine Le Pen", "Juif - Arabes ensemble". Le tableau se complète, le conte est riche.
"- Comment tu t’appelles ? – KATERINE !!!!"
Philippe Katerine donne à voir une vraie expertise de la scène. Vingt ans de parcours musical au service de l’équilibre trouvé. Le personnage Katerine n’en fait pas trop. Il danse sur le fil, exubérant mais timide, touchant mais provocant, dérangeant, fragile et généreux. Une heure trente de concert, vingt-huit chansons, dont une majorité tirée du dernier album. Des rappels à l’énergie savamment entretenue. Un "Louxor J’adore" tombé à point nommé.
Katerine nous a offert un moment, certes de pur délire, mais dans lequel on déambule avec plaisir, regardant ce paysage incroyable aux formes et couleurs originales. Ce patchwork de flashs musicaux nous laisse en fin de concert béat, le sourire aux lèvres, comme de grands enfants surpris par la fin de l’histoire et un peu honteux du plaisir pris par l’expérience Katerine. Saluons cet artiste qui, laissant notre tête se reposer un peu, sait s’adresser à nos cœurs d’enfants et nos tripes d’ado mal dégrossi.
"- Comment tu t’appelles ? – TA GUEULE !!!!"
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