Comédie dramatique de Marie-Françoise Hans, mise en scène de Régis Mardon, avec Gaëlle Billaut-Danno et Xavier Clion.
Sur une idée de Jean-Luc Moreau, Marie-Françoise Hans s'est attelée à l'écriture d'une pièce retranscrivant la dernière nuit des deux amants terribles : George Sand et Alfred Musset qui s'aimèrent, se disputèrent, se réconcilièrent pour mieux se tromper, se retrouver et se déchirer encore, jusqu'au bord de la folie, jusqu'à cette dernière nuit qui marqua la fin de leur histoire.
"La dernière nuit de Sand et Musset"
s'ouvre au retour du désastreux voyage à Venise des amants. George y contracte la dysenterie pendant qu'Alfred va courir les catins. Souffrant à son tour de la terrible maladie, il délire et proche de la folie manque de tuer sa belle. George lassée des infidélités d'Alfred et de la vie de passion destructrice qu'ils vivent tout deux, prend un amant. Ils se retrouvent en France et se réconcilient mais Musset fou de jalousie et en proie à son penchant morbide pour le malheur, fait vivre à Sand un véritable enfer émotionnel. C'est au cœur de cette dernière nuit que va se jouer le sort de ce couple atypique.
Il est génial. Elle est la première femme se voulant libre dans une société patriarcale. Il est rêveur, jouisseur, destructeur, avec un penchant pour la boisson. Elle est terre à terre, travailleuse, castratrice, toujours en lutte contre la société.
Au fil des mots se révèle la personnalité trempée de ces monstres de la littérature française (Marie-Françoise Hans n'a pas oublié de distiller quelques phrases empruntées respectivement aux deux auteurs), sans oublier pourtant que ce sont avant tout un homme et une femme, des êtres humains qui vivent les affres de la passion et se disputent comme un couple lambda, rongé par ses problèmes domestiques.
Sont-ils fait pour vivre ensemble ? Peut-être, peut-être pas... la vraie question est: arriveront-ils à dépasser leurs blessures respectives ? L'amour peut-il survivre à tant de douleur ? Doit-on faire le choix du bonheur par dessus celui de la passion ?
Les deux comédiens, Gaëlle Billaut-Danno et Xavier Clion, sont criants de vérité. Ils retranscrivent parfaitement les revirements d'humeurs et les affres désespérés que leur font tout deux subir leurs sentiments, dans une longue discussion, qui glisse souvent vers la dispute orageuse, flirtant également avec la douceur du sentiment amoureux, sans pour autant éviter les écueils des reproches amers, voire des menaces à peine voilées.
La mise en scène de Régis Mardon place le spectateur au cœur de la chambre des amants, symbolisée par un immense lit, seul élément du décor. C'est sur ce lit, véritable radeau de la méduse, que nos amants à la dérive jouent toute la pièce, ne posant finalement que rarement le pied à terre, comme pour marquer l'isolement dans lequel leur relation les a plongé. Le lit, d'abord lieu de débauche amoureuse, devient tour à tour le bureau de George, le ring de leur lutte, le terrain neutre de leur entente.
Cette partition à deux voix est suivie avec autant de passion que les personnages la vivent, en ayant parfois l'impression douloureuse et gênante d'assister à une vraie dispute d'un couple d'amis et d'en pénétrer l'intimité, ce qui peut mettre mal à l'aise. L'intérêt psychologique et historique de la pièce l'emporte cependant comme la justesse du propos et l'impeccable et passionnée prestation des comédiens qui touchent ou agacent mais ne laissent certainement pas indifférent. |