Réalisé
par Paz Fabrega. Costa Rica. Drame.
Durée : 1h23.
(Sortie le 23 mars 2011). Avec Monserrat Fernandez, Lil Quesada Morua, Freddy Chavarria Araya, Annette Villalobos Soto et Luis Carlos Bogantes.
Une immense plage à marée basse avec de longs serpents jaunes rejetés par les vagues qui ondulent dans le sable à la recherche d’un peu d’eau pour survivre, c’est sans doute l’image qui restera dans la mémoire des curieux qui oseront s’aventurer en compagnie de Paz Fabrega sur la côte Pacifique du Costa-Rica.
Œuvre singulière, refusant toute touche touristique, "Agua Fria" marque vraiment l’éveil cinématographique d’une nation, en filmant un jamais filmé qui ne pourra vraiment se comparer qu’à une toute petite poignée d’autres films issus de pays eux aussi quasi vierges de 7ème art.
On pourra faire le rapprochement avec "La Barra", film colombien vu en début d’année qui posait sa caméra dans une communauté villageoise elle aussi installée sur la côte Pacifique et plongeait ses acteurs non-professionnels dans une esquisse de fiction tout en se refusant au naturalisme attendu, voire convenu, et avait, comme Paz Fabrega, la pudeur de ne pas leur imposer une belle histoire à vocation universelle.
Qu’on ne s’attende donc pas à un documentaire déguisé en simple récit épuré . Au contraire, la réalisatrice mêle deux événements : la fugue d’une petite fille indienne de condition modeste - et les interrogations existentielles à la Antonioni d’une jeune intellectuelle bourgeoise prise dans l’ennui post-climatisé. Les deux personnages féminins qui n’ont en commun que leur mal-être, leur refus diffus d’accepter le rôle qui leur est fatalement échu, sont en quête d’autre chose. Fuir suffit-il ? Et d’ailleurs que fuir ?
Cette nature mystérieuse, avec ses serpents jaunes originels porteurs de mort, est une énigme qui exacerbe leur besoin d’amour. Elles s’y perdent et s’y retrouvent dans un film frémissant de secrets.
On pourra aussi partiellement lire "Agua Fria" comme une fable écologique sur les dangers qui guettent une contrée préservée, mais suscitant la convoitise des prometteurs nord-américains. On pourra pareillement s’interroger sur le devenir de la communauté assez solidaire de ces petites gens en vraie ou fausse villégiature à petite distance d’un quasi paradis sur terre.
Reste un film qui ne ressemble qu’à lui-même et qu’il faut apprivoiser plan par plan pour en saisir toute l’évidente beauté. |