Voilà une idée qu’elle est bonne ! Sortir un bouquin sur Emir Kusturica, le cinéaste aux deux Palmes d’or, pendant le Festival. N’y voyez aucune malice.

Le rebelle est de retour voguant entre les lignes de son livre que l’on pourrait classer au rayon biographie, mais que je préfère voir en itinérance. L’indispensable marche. Cette impression que nous donne la lecture de cette aventure. Aventure,  c’est aussi celle d’un cinéma. Une cinématographie de tout bord qui a nourri la soif d’image d’Emir depuis son enfance.

Jubilatoire cette façon d’aborder le cinéma populaire, racine de sa vocation d’artiste.

Entre les dates qui ponctuent les repères et les titres de films que le réalisateur d’"Underground" , a goulûment dévoré, il ne reste plus rien. Tout, le tout est en lui. Il n’y a pas chez cet auteur d’amalgame contradictoire. Il est UN, sans autre forme de salut. Un Homme entier. Il se nourrit d’images, trop peut-être, peu importe tellement l’importance du 7ème Art jalonne sa vie d’homme.

Une aventure humaine, Une bête humaine ! 

La gouaille d’un type qui ne se laisse pas marcher sur les pieds. Une fierté tzigane qui défend bec et ongle sa vision artistique. Pas seulement. Le fond est aussi important, tout en nuance sociale et humaine.

Le roman de son existence ponctue les chapitres de sa vie comme des titres de films "La souris fait son tour d’honneur", "Au revoir, pays bien aimé", "La terre et les larmes"… Il y a dans le choix de l’écrit le mélodrame serbe qui chante la guerre sans nom.

On perçoit à travers les méandres de ses confessions l’identité d’un cinéaste qui se cherche. Loin d’avoir les anecdotes comme seules ponctuations, le livre d’Emir Kusturica est dense, profond et en même temps jouissif dans son cheminement.

Les points de repères sont semés comme les cailloux blancs du conte. Il est malin l’homme, il sait nous prendre par le regard et nous emmener aux frontières de son intimité sans pour autant rien dévoiler. Naturellement, en lisant le livre qui a la couleur de ses films, on ne peut s’empêcher d’entendre la bande son, cette fanfare lointaine qui ponctue notre lecture.

"Où suis-je dans cette histoire ?" Ce titre en forme d’interrogation nous interroge. Humainement. Et le livre d’Emir Kusturica nous rappelle la valeur d’un type comme lui. Terriblement vivant. Et oui, quoi de mieux ? Rien. Et c’est ce que l’on peut lire. Il est bon de se sentir ainsi, le livre en main, compagnon de route.