Comédie dramatique de Emmanuelle Marie, mise en scène de Claire Mathaut, avec Nadège Cathelineau et Florence Pignarre.
La belle proximité avec le spectateur que permet le plateau de poche de l'Aktéon Théâtre agit également comme un miroir grossissant n'octroyant aucun droit à l'erreur pour les officiants notamment quand ils interviennent dans le registre du théâtre de l'intime.
Ce qui est avec "Blanc" la partition hypersensible et arachnéenne de Emmanuelle Marie qui aborde, au travers du huis clos de deux soeurs, la faille spatio-temporelle que crée les derniers jours de vie de leur mère.
Et le trio féminin qui s'y attelle sur une scène nue, vide hors deux chaises, présente un spectacle abouti d'une rare qualité en ayant trouvé le ton juste pour restituer et incarner un texte intense et plus complexe qu'il n'y paraît sous les dialogues dont la simplicité et l'ordinarité apparentes recèlent des questionnements profonds qui n'affleurent pas toujours à la conscience des personnages.
Avec ses ramifications oniriques et, surtout, psychanalytiques, ce texte explore plus la vie que la mort et la féminité que la sororité au travers du deuil de la mère qui, quel que soit le moment où elle intervient, constitue une tragédie source d'un traumatisme majeur, traumatisme que Emmanuelle Marie aborde sous l'angle de la problématique narcissique et de la négativité issue de la pulsion de mort qui le régissent et la fonction salvatrice de la figure paternelle.
Sous la direction de Claire Mathaut, Nadège Cathelineau, la brune, et Florence Pignarre, la blonde, maîtrisent le verbe, parfois elliptique, de l'auteur qui intellectualise le pathos et la trivialité de la mort sous une forme en résonance avec le quotidien dans lequel s'insinuent des digressions fantasmatiques et lui donnent corps.
Elles portent magistralement la douleur et le désemparement de ces deux jeunes femmes saisies dans leur veille d'une mère agonisante qui renvoie chacune, selon un tempérament et un choix de vie différents, vers le sens de sa propre vie.