Le mythe est affaire de héros.
Le bouquin d’Alex Nikolavitch que les Editions Les Moutons Électriques viennent de sortir est aujourd’hui disponible dans les meilleures librairies. Une bible.
Justement, puisque nous parlons du "loup", depuis peu a débarqué sur nos écrans, le dernier en date, un Dieu mythique "Thor", film aux effets 3D époustouflants. Un film produit par la maison Marvell, les éditeurs à l’origine de la parution du premier des Supers Héros.
En effet la naissance de Superman dans les pages du numéro 1 d’Action Comics signe, en 1938, le début mythologique d’un monde, qui loin de n’être que de papier se rapprochera, de par sa complexité, des contes ancestraux qui ont nourri les mythes de la civilisation.
"Mythe et Super Héros" est un livre à découvrir, et qui se lit comme l’Odyssée. La découverte est prenante. Elle relate au fil des pages la création des personnages et leurs caractères complexes (plus qu’on peut le supposer), leurs adaptations à la société qu’ils défendent…
Le travail de l’auteur, fouillé, met en parallèle l’évolution des Super-Héros et leurs racines mythologiques (la représentation des Dieux antiques). Un travail de recherche qui nous plonge tête la première dans la réalité imaginaire d’un monde qui ne serait peut-être pas ce qu’il est aujourd’hui sans eux. Car la vrai force de ses personnages ce sont (pour beaucoup d’entre eux) leurs dédoublements. Cette confrontation identitaire qu’ils sont obligés de taire. Cette lutte continuelle entre le simple mortel qu’ils représentent aux yeux de tous et leurs identité secrète de sauveur.
Comment gérer cette schizophrénie ?
Une force Shakespearienne.
La dramaturgie prendra vite le dessus. Le souci identitaire de se savoir unique deviendra pour beaucoup de ces sauveurs le poids à porter. Admirés dans leurs solitudes de héros ! Orphelins de leurs identités. Ils sont ces enfants adoptés par un monde qui pensent en égoïste à leurs seules tranquillités comme valeurs de vie.
Les héros n’existent que pour la tranquillité du mortel.
La problématique est là. Et l’on ne s’en sortira pas.
Naturellement, tout le monde est d’accord, il ne s’agit que de héros sans vie, tout droit sortis du cerveau d’un Siegel et d’un Shuster (Superman), d’un Bob Kane (Batman) ou encore plus tard le célèbre Spider Man. Les héros sont multiples et nous les connaissons tous aujourd’hui, peut-être même plus grâce au cinéma (les adaptations pleuvent devant le succès toujours garanti) que par les fanzines que s’arrachent les collectionneurs.
Nos Super Héros empruntent à la mythologie (antique et nordique) la justice du puissant contre les "malfaisants". Avec comme rhétorique, celle de sauver (si possible) la race humaine de ses déviations sociales et autoritaires. Certains d’entre eux vivront la guerre auprès des alliés contre le nazisme… Face au communisme… Mais également ils se verront poignardés dans le dos par ceux même qu’ils auront sauvé.
C’est qu’en ces temps là, mon bon monsieur, on ne rigolait pas devant ces héros qui prônaient une justice sociale. Les comics books furent alors montrés du doigt par la sacro-sainte commission anti-américaine. Même les héros furent bannis par la chasse aux sorcières et l’anticommunisme des années 50, vidant des cases de BD ces personnages mis à l’index… On alla jusqu’à imposer un code de bonne conduite !
Le maccartisme aura tout brûlé sur son passage.
Rien ne sera plus comme avant…
Les personnages ont perdu leurs illusions. Comme les Dieux face à leur création. Un constat navrant… Mais bien réel, il faut prendre les humains pour ce qu’ils sont.
Il faut souligner le travail encyclopédique d’Alex Nikolavitch, l’illustration riche qui jalonne cette formidable aventure qu’il nous conte. Ces personnages riches de la bande dessinée d’une Amérique (pas qu'elle d’ailleurs) qui naquirent après la grande dépression et qui aujourd’hui se refont une santé. Il ne peut pas y avoir de Héros sans Mythe. Et sans Mythe, l’homme semble bien petit dans l’univers.
Encore un bouquin qu’il faut vous procurer. Pour le plaisir réel de croire qu’à travers une case de comics le monde n’est pas aussi pourri qu’on veut bien nous le faire croire. |