Comédie de Roland Dubillard, mise en scène de Daniel Mesguich, avec Ulysse Barbry, Louise Coldefy, Johann Cuny, Lazare Herson-Macarel, Jeanne Lepers, Juliette Séjourné, Pierre Yvon et Damien Zanoly.
En avertissement à sa pièce "Le bain de vapeur", Roland Dubillard indique qu’il s’agit non d’une pièce de boulevard mais d’une "comédie de moeurs et d’un mélodrame, rempli de bruit et de fureur" mais également qu’il donne carte blanche au metteur en scène pour " raccourcir ou rallonger cette suite de catastrophes".
Avertissement entendu par Daniel Mesguich qui n’avait sans doute guère besoin de ce blanc-seing pour faire oeuvre créatrice en assurant sa mise en scène dans le cadre des représentations publiques des Journées de juin 2011 avec sa classe d’interprétation du Conservatoire National Supérieur d’Art Dramatique.
L’opus, développé sur près de trois heures, s’avère une pépite jubilatoire menée de main de maître et excellemment interprétée par huit élèves judicieusement choisis au sein des promotions de 1ère et 2ème année.
L’action et les intrigues, tournicotées à l’envi par le débridé imaginaire dubillardien, se déroulent dans le majestueux hall d’entrée d’un cossu établissement thermal fin 19ème, supporté par les deux colonnes doriques noires fétiches, et imbriquent tous les registres théâtraux pour constituer un terrain de jeu et de jeux inépuisables pour les comédiens, l’ensemble dans une langue foisonnante qui bouleverse les codes et les genres.
Un commissaire Rouletabille (Lazare Herson-Macarel désopilant) mène une enquête obsessionnelle enquête sur la mort étrange, et non résolue, d’un conseiller, au nom évocateur de Spermiton (Ulysse Barbry), qui arrosait plusieurs maîtresses assortie de la disparition de son corps et de sa fortune constituée de 13 diamants intervenue au sein de cet établissement. Ce commissaire y croise une fidèle curiste qui fut sans doute sa maîtresse, la vicomtesse da (Louise Coldefy excellente) qui depuis vingt ans espère y trouver son amant, non pas le commissaire, mais un bellâtre pilote de course (Johann Cuny très juste) qui y séjourne effectivement.
Gontran, le groom histrionnique à l’identité shizoîde (Damien Zanoly éblouissant) à la recherche de son père inconnu, tombe amoureux de la fille de la vicomtesse, une jeune Fifi brin d’acier révolutionnaire (Juliette Séjourné explosive) , elle aussi en quête de paternité, qui se trouve être sa sœur sans l’être puisqu’elle n’est pas la fille de son père. Cela sous le regard plutôt louche d’une tenancière culbuto (Jeanne Lepers étonnante avec sa voix modulable) et d’un pseudo journaliste-bagagiste (Pierre Yvon épatant). C’est clair. Non ?
Aux allures de course folle, cours après moi que je t’attrape, le spectacle à l’abondant foisonnement mesguichéen, servi sur un rythme d’enfer et au dénouement apocalyptique, est maelstromique. Chaque scène, qui fonctionne comme un monde de loufoquerie et de folle humanité en quête d’identité et d’amour qui se prend les pieds dans le tapis, cueille, et pour son plus grand plaisir, chaque fois le spectateur par surprise.
Conclusion : un travail accompli regorgeant de trouvailles et jouissant d’une interprétation irréprochable.