Réalisé
par Antoine Blossier. France. Fantastique. Durée : 1h20 (Sortie le 13 juillet 2011). Avec Grégoire Colin, François Levantal, Fred Ulysse, Bérénice Béjo, Isabelle Renauld et Joseph Mallerba.
Ces derniers mois, on a pu constater un frémissement "fantastique" dans le cinéma français, grâce à de jeunes réalisateurs qui, àl’instar de leurs homologues européens, notamment espagnols, n’hésitent plus à s’emparer du genre pour le parer de couleurs tricolores.
On a ainsi pu voir un hommage au "giallo" avec "Amer" ou "Les nuits rouges du bourreau de jade", assister au retour d’un cinéma baignant dans l’étrange avec "La lisière" et même faire un tour au pays des morts-vivants avec "La Meute".
Aujourd’hui, c’est vers le "gore à la française" que semble lorgner Antoine Blossier pour son premier film, "La traque", dont l’originalité est de faire naître la peur des fourrés d’une forêt obscure, sous la forme d’une angoisse primitive distillée par des sangliers transformés en bêtes terrifiantes à la suite de mutations génétiques dues à l’absorption de produits chimiques.
Dans ce cinéma "goret", selon le mot d’un critique trop porté sur le calembour, il y a une justice immanente : les victimes des cochons sauvages seront précisément les membres de la famille qui s’est enrichie en pourrissant la terre avec ses substances de mort.
Les écologistes devraient être les premiers à se réjouir de ce spectacle où les chasseurs deviennent les chassés, où les viandards sont les proies de leur gibier. Ils aimeront voir les chasseurs s’embourber, s’enfoncer, s’envaser dans la terre originelle, s’enduire des substances visqueuses et peu ragoûtantes avant d’être passablement massacrés par des animaux dont on n’apercevra symboliquement que quelques groins ou quelques dents bien affûtées.
Ils devront par la même occasion féliciter les acteurs, Grégoire Colin, François Levantal et Fred Ulysse en tête, pour avoir accepté des rôles si physiques et organiques qu’ils feraient passer les performances de John Rambo dans les bois pour d’aimables virées parmi les scouts ou les castors juniors.
Tout n’est peut-être pas parfait dans ce scénario qui use de ficelles souvent grosses comme des cordes et ne s’embarrasse pas de vraisemblance pour mijoter aux petits oignons un beau carnage qui restera dans les annales, mais Antoine Blossier se tire habilement de ce premier passage derrière la caméra.
On peut supposer que ce disciple de Stephen King est un adepte volontaire du film de genre et que son ambition servie par des moyens décuplés, il s’inscrira dans le registre d’un cinéma populaire qui, à juste raison, n’a cure de futiles détails pour parvenir à ses fins : distraire efficacement.
On espère que le cinéma français saura utiliser de pareilles qualités et lui permettra de continuer son exploration des sentiers non battus en le laissant s’aventurer vers d’autres forêts regorgeantes de mystère et d’imaginaire. |