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puce La guerre est déclarée
Valérie Donzelli  (août 2011) 

Réalisé par Valérie Donzelli. France. Comédie dramatique. Durée : 1h10 (Sortie le 31 août 2011). Avec Valérie Donzelli, Jérémie Elkaïm, César Desseix, Brigitte Sy, Elina Lowensohn, Anne le Ny, Béatrice de Staël et Philippe Laudenbach.

Pas question de se dédire : en son temps, on avait vanté "La Reine des pommes", le premier film de la doublette Donzelli-Elkaïm. On avait beaucoup aimé le côté bricolo-bricolette du film. Pareillement, on avait réédité nos louanges pour nos deux tourtereaux pour saluer la fraîcheur cinématographique de "Belleville Tokyo" d’Élise Girard.

On s’apprêtait donc à copier-coller nos compliments pour "La guerre est déclarée". On s’y apprêtait d’autant que les articles dithyrambiques tombaient comme des missiles sur Tripoli et qu’on comprenait à demi-mot que seuls Marc Dutroux et Hannibal Lecter n’allaient pas apprécier cette histoire vraie d’enfant atteint d’une abominable tumeur au cerveau...

Et puis... Aïe ! Badaboum ! La faute technique ! La faute inexcusable qui transforme illico un grand zozo de cinquante ans en négationniste à mettre au ban de toutes les cinémathèques du monde : on n’aimait pas, mais alors pas du tout ce film déplaisant.

Question immédiate, donc : pourquoi un film aussi déplaisant plaît tant (à la critique) ?

Commençons par mettre un premier pas devant l’autre, avant d’être bastonné par toute l’armada des laudateurs : parlons d’abord de la forme du film. Voulant nous montrer leur parcours de cœurs battants happés par la douleur d’être confrontés à la maladie de leur bébé, Valérie et Jérémie insistent sur les va-et-vient, les déplacements incessants, les galopades frénétiques dans les hôpitaux suivis d’attentes infinies et de désespoirs soudains.

Du coup, le spectateur est perpétuellement pris en main, n’a pas le temps d’avoir son mot à dire ; à la sécurité sociale, on parlerait de maladie prise en charge à 100 %. Ainsi, qu’ils le fassent exprès ou pas, nos deux malheureux parents nous manipulent, pratiquent comme des Spielberg estampillés art et essai toute la panoplie des chantages émotionnels pour nous empêcher de ne pas nous apitoyer.

Et peu à peu - c’est là que le doute en nous s’immisce sur leur totale "honnêteté" - on a l’impression que ces malins naïfs relâchent leur "attention" et qu’ils se permettent des mièvreries filmiques (la voix off confidente à la François Truffaut, les chansons cuculs complaisantes à la Christophe Honoré, les courses-traveling à la Léos Carax), toute une panoplie maniérée qui affleurait dans leurs précédents films, mais qui ne portait pas à conséquence puisque elle ne s’appliquait qu’aux petits bobos de la vie de bobos.

Nous voilà donc arrivés sur le fond "déplaisant" du film : un cinéma bobo, un cinéma égoïstement bobo. C’est triste à écrire mais le malheur qui les frappe paraît plus beau et bobo que le malheur des autres, surtout quand ils sont laids et prolos. Emblématique est le désir constamment renouvelé de Valérie Donzelli que son fils soit seul dans une chambre, soit traité par le meilleur chirurgien.

Bon, on comprend la naturelle angoisse d’une mère, mais on comprend moins le désir de la cinéaste quand elle laisse son compagnon parler de "petit personnel" à propos des infirmières de l’accueil ; on comprend encore moins - ou encore plus si on est un peu cruel - cette scène frappante dans laquelle Jérémie tourne la manivelle d’une boîte à musique qui joue "L’Internationale" (sic !) pour leur petit garçon pendant que les parents de son voisin de lit écoutent une radio diffusant de la publicité.

Valérie Donzelli et Julien Elkaïm pensent bien et n’aiment pas la promiscuité. Ils n’hésitent d’ailleurs pas à s’attaquer à une bête plus immonde que le cancer : le Front national. Car, disent-ils, voter FN serait la pire séquelle qui pourrait arriver au petit Adam, pire que d’être aveugle, sourd ou paralysé.

Et là, franchement, on ne peut plus marcher. Si, on se remet dans le contexte chronologique du film, celle de l’attente d’une grave opération, on serait parents d’un enfant qui peut mourir dans les heures à venir on se moquerait pas mal de ses penchants politiques futurs, voire on signerait avec un diable d’opérette pour qu’il soit sauvé à si bas prix.

Dans ce monde "réel" reconstitué après le bonheur de s’en être sorti miraculeusement, le couple d’élite nous paraît donc infiniment déplaisant et calculateur. C’est d’ailleurs ça le hic (heureux) du film : ils s’en sont sortis. Qu’ils le veuillent ou non, ils sont dans l’artifice, la post-compassion, l’auto-célébration de leur chance.

Dans les années 1970, Nadine Trintignant avait tourné "Ça n’arrive qu’aux autres", avec pour sujet la mort précoce d’un de ses enfants. On lui avait reproché son "voyeurisme", cette "exploitation" de sa douleur. Ici, on devrait être moralement encore plus sévère, d’autant plus sévère que Valérie ne pense jamais aux autres à qui ça arrive. Et puis, qu’aurait dit la critique si elle n’avait pas su que l’histoire racontée était autobiographique ? Aurait-elle accepté le sujet surtout traité avec cette désinvolture ?

Après avoir bien mouillé nos mouchoirs, salué aussi le travail pas évident de la monteuse Pauline Gaillard devant ce déferlement presque clipesque d’images, on fera un petit coucou au petit bonhomme bien vivant désormais qu’est Gabriel Elkaïm. On lui dira gentiment qu’il aurait pu demander à sa maman de ne pas l’obliger à jouer avec sa DS face au docteur qui lui a sauvé la vie dans la scène finale du film...

Bah... ce n’est pas grave, l’addiction aux jeux vidéos, ce n’est pas une séquelle de son mal, non ?

 

Philippe Person         
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