Réalisé
par Christian Zerbib. France. Documentaire.
Durée : 1h30. (Sortie 9 novembre 2011).
Une des conséquences inattendues du triomphe du numérique en 2011 est l’arrivée d’un nouveau type de films documentaires qui utilise la captation d’un spectacle comme pivot de son architecture.
Il y a quelques semaines, on a pu ainsi découvrir dans le film de Fred Soupa, "Nos Plusieurs", le travail d’un groupe de comédiens autistes autour d’une représentation du Mahâbhârata.
Dans "Nos ancêtres les Gauloises", Christian Zerbib entame une réflexion sur la fameuse et fumeuse notion d’ "identité nationale" autour d’un spectacle théâtral dont il a été à l’initiateur.
ix femmes, d’origines très diverses, vivant en Bourgogne dans la région de Dijon, vont en effet monter sur les planches pour se raconter et raconter comment elles sont devenues françaises. Grand melting pot de races, de religions et de générations, le projet part de témoignages bruts remis en forme théâtrale par Stéphanie Chaudesaigues.
Ce qui aurait pu virer à la thèse unanimiste bien-pensante, genre United Colors, devient au contraire un réjouissant et chatoyant bazar dans lequel cohabitent la parole d’une bourgeoise hollandaise, la foldinguerie d’une Brésilienne, l’émotion d’une réfugiée cambodgienne de l’ère Pol-Pot et le franc-parler de mères et de grand-mères d’origine africaine.
Toutes ces femmes, toutes ces mères, confrontent leurs expériences tout en partageant la même expérience de grand bain théâtral. Jadis, Rika Zaraï chantait "C’est ça, c’est ça, la France...".
On ne retrouve évidemment pas cette légèreté démagogique dans "Nos Ancêtres les Gauloises" et Christian Zerbib s’en garde bien en emmenant ses actrices visiter un musée consacré à leurs ancêtres putatifs. Là, les fantasmes de la Troisième République sont mis à bas. Les Gaulois n’étaient pas si blonds que ça et guère plus ethniquement homogènes que toutes ces braves dames dijonnaises pas rassemblées autour des sangliers d’Obélix...
Même si on peut lire, en forçant le trait, "Nos ancêtres les Gauloises" comme une ode à la Grande Nation, on est assez loin de la France gaullienne et de la culture malrucienne.
C’est sans doute le lot de la "première génération" de n’être là que pour s’installer, que pour prendre racine et pour comprendre le "vivre ensemble" qui fait le lien des citoyens d’une même nation. Il faudrait maintenant suivre ce que sont devenus leurs enfants, voir s’ils ont pu découvrir ce qui fait la France ou si, au contraire, ils n’y ont trouvé qu’un espace de consommation vide de sens.
Mais, si l’on est sur la ligne optimiste du film de Christian Zerbib, la vision de leurs mères sur scène n’a pu que contribuer à leur faire comprendre ce qu’être Français veut dire... |