Quand on entend pour la première fois ce nom de groupe qui sonne comme un mot anglophone, on pense en le traduisant à des troncs, un caleçon, des coffres de voiture ou bien un personnage de Dragon Ball. Bref, ces traductions assez masculines et ce mot tranchant "trunks" donnent l'envie de se dire que cela va être "bourrin". Et bien pas du tout, fausse piste ! Les apparences sont trompeuses...
Trunks est un projet qui réunit 5 musiciens d'horizons différents, qui ont déjà fait leurs preuves. Ils ont décidé de ne pas se prendre la tête et de jouer ce qui leur plaît sans suivre les courants ou bien chercher la gloire, juste faire goûter leurs saveurs mélodiques au public.
Lorsqu'on a une petite perle de bassiste au milieu de 4 mecs, on a vite fait de faire des raccourcis : "c'est le groupe expérimental de Laetitia Sheriff", et bien non, on dirait même qu'elle se met en retrait, histoire de bien laisser ses coéquipiers sur la première ligne.
Donc une basse, deux guitares, un saxo et une batterie et cela donne quoi ? Un film ! Mais de quoi parle-t-il, me direz-vous ? Leur musique donne un ressenti étrange, elle sonne sans artifice, sans effets délirants, elle n'est pas lisse, mais pas trop rugueuse non plus.
En les écoutant jouer, mon esprit s'est construit des scènes qui, placées bout à bout, ressemblent à un long-métrage.
Si je devais définir le concert de Trunks en quelques mots, je vous dirais que j'ai écouté une bande originale de film. Je n'en connais pas le titre mais il y avait une course poursuite jazzy pleine de rebondissements, une gare bruyante, de l'action rock et des moments planants où le sujet se remet de ses émotions.
Trunks possède aussi une capacité rare, celle de "déconstruire" et "reconstruire" sa musique à volonté.
Habituellement, les groupes commencent des morceaux de manière carrée et finissent en un grand brouhaha cacophonique dans l'esprit rock'n'roll.
Nos musiciens, eux, commencent souvent de manière destructurée de telle façon que l'on ne sait pas du tout quel style ils vont développer, pour progressivement amener une ligne mélodique bien cachée et finir de façon propre et structurée.
Le groupe qui suit aurait pu malsainement chantonner "I shot the sheriff" tant sa différence avec ce premier fut écrasante.
Quand on entend pour la première fois ce nom de groupe qui sonne comme des mots anglophones, je pense à mon vieil ordinateur Atari 520 ST, mes premiers jeux vidéos avec des sons Midi, à notre adolescence rebelle boostée d'hormones et à des émeutes à coups de CRS.
Et bien Atari Teenage Riot est quasiment un condensé de tout ça ! Le chant "crié" est leur unique mode d'expression, et oui c'est "hardcore", leur base mélodique est soutenue par des rafales de samples et de beats surpuissants, ça c'est leur côté "digital".
Les 3 individus montent sur scène, déterminés, prêts à mener leur combat. Nic Endo avec un t-shirt arborant un samouraï est la première à prendre posture en bord de scène, tenant son micro tel un fouet au-dessus de sa tête façon "Kill Bill".
Ensuite, Cx Kidtronic avec un blouson noir clouté, un masque de ski bling bling et une crête façon Mister T mais de travers prend, lui, position de l'autre côté de la scène pour laisser la place à Alec Empire au centre, plus sobre mais avec un t-shirt revendicatif : "Keep the Internet free from government control".
En guise de sommation, nous aurons droit à : "We are the Atari Teenage Riot" crié et répété plusieurs fois. Les premières secondes décoiffent comme une claque magistrale, le tout saupoudré de stroboscopes qui devraient être livrés avec des lunettes spéciales éclipse de soleil.
Les paroles sont minimalistes, mais provocantes et engagées, elles sont matraquées comme pour mieux les imprimer dans nos cerveaux tel "Revolution Action", "Are you ready to testify", "We f*ck the police, f*ck them all, f*ck them all, f*ck them all...".
Les 3 performeurs vont se dépenser sans compter tout le set durant, à coup de sauts, de convulsions, de contractions, se déchainant sur les pads de leurs sampleurs, torturant leurs micros. Les spectateurs les plus aguerris les suivront dans leur élan jusqu'à crier avec eux et pogoter gentiment. Le son est si fort que lorsqu'ils utilisent un mégaphone, il est à peine audible.
Kidtronic toujours prêt à slammer sur le public, apporte quelques breaks avec un flow rap bienvenu pour offrir quelques secondes de répit à nos oreilles saturées de cris.
Suite à un rappel et de généreuses poignées de mains à leurs fans avant de sortir de scène, le silence résonne comme le chaos. C'est certainement cela l'effet "Digital Hardcore" revendiqué par les ATR.
Petit conseil, si vous comptez assister à l'un de leurs concerts, prévoyez lunettes de soleil et protections auditives efficaces... On vous aura prévenus. |