Lecture par Jean-louis Trintignant accompagné par Daniel Mille à l'accordéon et Grégoire Korniluk au violoncelle, dans une mise en scène de Gabor Rassov.
A l’avant-scène du grand plateau de la salle mythique de l’Odéon, ils sont assis côte à côte : Daniel Mille accordéoniste, Grégoire Korniluk violoncelliste et lui, chacun sur un fauteuil de velours rouge.
Jean-Louis Trintignant a choisi une vingtaine de poèmes, dont certains très courts, de trois poètes libertaires : Jacques Prévert, Boris Vian et Robert Desnos. Des textes sur l’amour et la mort.
Dans la plus grande sobriété, dirigé par Gabor Rassov, il dit de sa voix inimitable, rocailleuse à la finale toute en onctuosité, les mots de ces poètes comme au coin du feu, dans le cocon de lumière créé par Orazio Trotta.
Il y a l’expiration d’un souffle qui donne aux textes, même les plus concis, des résonances infinies. Et sa voix chaude et rassurante, portée par les notes magnifiques des deux musiciens tout en discrétion, exprime le désespoir, le cynisme ou la fantaisie de ces trois jongleurs de mots.
Il y a des textes bouleversants (comme ceux de Robert Desnos écrit en déportation à sa femme Youki) et des mots légers qui expriment des choses graves. Et ce n’est pas une toux persistante ("pardon, je suis enrhumé" dit-il) qui l’empêchera de faire entendre ces paroles pleines de lucidité et de cocasserie de ces trois grands poètes.
Même s’il reste assis tout au long du spectacle (sauf pour la courte nouvelle de Vian : "Les fourmis"), les gens au salut sont debout, rendant hommage à une carrière exemplaire et le remerciant de ce récital d’une grande douceur, avec l’humour blotti au cœur. Il conclut cette soirée magique par ces mots de Boris Vian : "Pourquoi que je vis ? Parce que c’est joli."
Un moment de grâce et d’exception. |